REPRISE DU PROCES DE KHALIFA SALL ET CIE: coups, piques, et repliques à la barre

Hier, lors de la troisième comparution du maire de Dakar Khalifa Sall et de ses co-prévenus devant la Chambre correctionnelle de Dakar, la salle 4 du tribunal de Lat-Dior, qui a abrité le procès, était bondée de monde. Le débat du jour portait sur deux questions notamment la recevabilité de la constitution de partie civile de la ville de Dakar et celle de l’Etat du Sénégal. Durant les débats, les avocats n’ont pas manqué de se lancer des piques au moment où, de l’autre côté, la foule se permettait des signes d’approbation ou de désapprobation, obligeant parfois le juge à les rappeler à l’ordre. Et à la suspension de l’audience, l’assistance en a profité pour scander le nom de Khalifa Sall. Jeunes et vieux socialistes et même les vieilles dames ont tenu à apporter leur soutien au maire de Dakar. Ce, sous le contrôle strict des auxiliaires gendarmes qui manifestement avaient reçu des instructions fermes. L’ambiance était parfois rythmée.



 
 
 
 
 
Hier, lors de tenue du procès du maire de Dakar Khalifa Sall et Cie devant la Chambre correctionnelle de Dakar, un dispositif sécuritaire imposant était encore placé aux alentours du tribunal ainsi que dans le hall du palais et à l’entrée de la salle 4 où l’audience devrait se dérouler. Toutes les personnes étaient fouillées. Cette fois-ci, les agents avaient intimé l’ordre à tout le monde, sans exception, d’éteindre leurs appareils téléphoniques et interdit formellement de filmer ou d’enregistrer dans la salle. Même les envois de messages n’étaient pas admis. Ce, contrairement aux deux précédentes audiences où presque tout le monde avait des images et photos de l’ambiance de la salle. Comme si on ne voulait pas que le monde extérieur voie ce qui se passe dans la salle, via le net, facebook etc. Vers 8h55mn, tout de blanc vêtu, les bras en V, Khalifa Sall apparait dans le box des accusés pour rejoindre directement les avocats tout en affichant un large sourire à l’assistance. Ainsi, dans une ambiance très rythmée, ses inconditionnels l’ont accompagné avec la chanson de l’hymne national du pays. «Khalifa dirigé, Khalifa dirigé», scandaient-ils. Ou encore «Khalifa ya beuri doolé, Khalifa ya beuri doolé» (Khalifa tu es puissant).
Sous les cris de joie de la foule, Serigne Mansour Sy Djamil, l’ancien maire de Dakar Mamadou Diop, Idrissa Seck du parti Rewmi, le maire de Dakar-Sacré Cœur Barthélemy Dias, Bamba Fall, le maire de la Médina, Me Madické Niang etc. sont entrés dans la salle, le sourire aux lèvres. Avant l’ouverture du procès, un des gendarmes a lu un communiqué émanant de la Cour d’appel de Dakar, qui disait : «l’utilisation d’appareils servant à filmer où à enregistrer étaient interdite (...)». Malick Lamotte va préciser à son tour que toute personne qui bravera cette interdiction encourt des sanctions légales. Il est entré dans la salle à 9h9mn, accompagné de ses assesseurs Amath Sy et Magatte Diop, du procureur de la République Serigne Bassirou Guèye qui s’est renforcé de deux substituts et de trois greffiers.
 
Les partisans de Khalifa Sall très excités
 
Pour la bonne tenue de l’audience, le juge avait demandé à la défense de s’organiser dans l’ordre qu’elle le souhaitait pour commencer les plaidoiries. Il faudrait régler, selon lui, la question de la recevabilité de la constitution de partie civile de la mairie de Dakar. L’agent judiciaire Antoine Diome, qui a soulevé l’exception d’irrecevabilité de la constitution de partie civile de la ville de Dakar, reçoit les foudres de Me El Hadji Diouf.  «Ce n’est pas possible, il (l’agent judiciaire) plaide le dossier entièrement. Il a pris des avocats et il soulève des exceptions. Nous allons alors l’entendre en qualité de témoin», s’était-il indigné en criant fort dans le micro. Le juge s’est plaint de ce comportement. «Il est désolant, humiliant de voir cette situation. C’est assez triste de nous comporter ainsi. Maître, est-ce que vous avez besoin de crier pour dire ce que vous avez à dire ? Je pense que ceux qui sont venus assister aujourd’hui (hier) à ce procès devraient sortir de la salle avec des enseignements riches tirés d’ici. Que chacun respecte l’audience. Me El Hadji Diouf, la police de l’audience revient au juge, il faut la respecter», Intervient sèchement et sereinement Malick Lamotte.
 
 
Me Khoureichi Ba et la «peur» des hommes encagoulés
 
 
D’autre part, Me Khoureichi Ba a pris la parole pour demander au Tribunal d’ordonner aux forces spéciales de l’administration pénitentiaire de se mettre de côté. «J’ai un souci et je vous demande de le partager avec moi. C’est-à-dire les hommes encagoulés devraient rester dans le box des accusés. Ils sont là entre nous et tout peut se passer à tout moment. Et depuis là où je suis, j’entends leur souffle», a-t-il demandé au juge qui accepte et accède à sa demande. C’est ainsi que ces agents ont été sommés de se déplacer dans le box. Les avocats de Khalifa et Cie et ceux de l’Etat ont épilogué des heures durant sur la recevabilité avant qu’un incident n’oblige le juge à suspendre pour 15 mn. Il s’agissait d’une personne qui manipulait son téléphone avant que les gendarmes ne le confisquent. A la reprise, après plus d’un quart d’heure, le juge a rappelé les punitions qui pèsent sur toute personne n’obéissant pas aux règles édictées par le tribunal.
Après cela, à 13h48 mn, Me El Hadji Diouf prend la parole. Il ironise en s’adressant à l’agent judiciaire de l’Etat : «je vous comprends. Vous êtes un homme mort si vous ne défendez pas l’Etat. Et vous risquez d’être relevé de vos fonctions, et de perdre vos avantages si vous ne faites pas ce qu’on vous dit. Et vous pourrez vous retrouver à Kédougou…». Par contre, il a fait les éloges de la première adjointe au maire de la ville de Dakar, Rose Wardini en ces termes : «Votre maire n’est pas là, mais vous avez fait votre travail comme un homme, alors que vous ne l’êtes pas. ‘’Yalla nalla Yalla aar’’». La robe noire s’est rapprochée de la dame en la félicitant. Les yeux fermés, Soham Wardini a égrené son chapelet tout au long de la l’audience. Parfois, elle souriait lorsque Me Baboucar Cissé, avocat de l’Etat, s’en prenait à elle. C’est ainsi que les débats sur la recevabilité de la constitution de partie civile de la mairie se sont poursuivis jusqu’à 18 heures, moment où le juge a suspendu jusqu’à aujourd’hui. Dehors, les partisans se sont encore mis à scander «Libérez Khalifa ! Libérez Khalifa !».
 
 
Fatou D.DIONE (Stagiaire)
 

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