REMISE DES CAHIERS DE DOLEANCES DES CENTRALES SYNDICALES :Macky Sall freine les syndicalistes sur la hausse des salaires, dénonce le recrutement politique dans les sociétés et le manque de reconnaissance de ses efforts sur la vie chère




 
 
 
Le président de la République ne veut plus entendre parler de hausse de salaires après la revalorisation salariale consentie entre 2022 et 2023. Ainsi, lorsque cette doléance a été portée, il a rappelé avoir fait le maximum sur cette question et ne peut aller au-delà. A l’endroit des acteurs de l’éducation et de la santé, il a dit qu’il ne peut consentir tous ces efforts sans une stabilité de ces secteurs en retour.
 
 
 
Lors de la remise des cahiers de doléances des centrales syndicales, certaines doléances ont encore porté sur la hausse des salaires. Une demande qui n’a pas été appréciée par le chef de l’Etat eu égard aux efforts consentis sur ce plan. A cet effet, le chef de l’Etat a fait la comparaison entre les hausses consenties par l’Etat depuis les indépendances et les dernières hausses entre 2022 et 2023. Avant son magistère, la hausse des salaires la plus conséquente a été observée en 1994 d’un montant de 15.500 francs, en plus d’autres hausses de 3000 à dix mille francs. « Le relèvement de l’indemnité d’enseignement est passé de 50 à 60% ; l’augmentation de l’indemnité de contrôle et d’encadrement est passé à 100% ; l’augmentation de l’indemnité de recherche documentaire par les Pem Pcmg a été portée à 114%, la défiscalisation de l’indemnité de logement qui est passée à cent mille francs. La revalorisation salariale pour les autres agents du public, pour l’indemnité spéciale complémentaire, le montant varie de 80.000 francs à 300.000 francs, explique le chef de l’Etat entre autres exemples. « Si le gouvernement consent tous ces efforts, il faut le dire. Ce sont des efforts énormes, des sacrifices énormes que l’Etat a consentis pour permettre aux travailleurs d’avoir une meilleure réaction par rapport au coût de la vie. Avec tous ces efforts, je croyais que j’allais rester trois ans sans qu’on ne m’amène des doléances relatives à la hausse des salaires », fait remarquer le Président Sall. A l’en croire, certes les travailleurs font la production, mais ils ne représentent pas 1% de la population. Et, l’Etat, dit-il, doit s’occuper des paysans, des travailleurs du secteur de la pêche, etc. Le chef de l’Etat n’a pas non plus apprécié la modification du décret sur l’arachide au profit de la Sonacos. Si on suit les syndicalistes dans leur raisonnement, ce sont les cultivateurs qui seront handicapés.
 
« On ne peut pas consentir tous ces efforts sans avoir une stabilité dans le secteur de l’éducation et de la santé »  
 
Les syndicalistes ont aussi théorisé le changement du décret sur la commercialisation de l’arachide pour permettre à la Sonacos de s’approvisionner d’abord. Si on le fait, de l’avis du président de la République, ce sont des millions de paysans qui seront lésés. A l’en croire, ces derniers vivent de l’arachide et l’Etat ne saurait favoriser la Sonacos au détriment des paysans. Sur le passif des entreprises dû aux travailleurs, Macky Sall se veut clair : « Si je dois passer mon temps à éponger le passif issu des dégâts causés de la mauvaise gestion de nos entreprises, je ne vais pas travailler. Cela doit nous amener à réfléchir sur les conséquences de la mauvaise gestion des entreprises ; parce que ça coute très cher à l’Etat », précise le chef de l’Etat qui en veut pour preuve, La Poste avec ses 4000 agents alors que ses activités sont révolues. « Il faut aider La Poste à faire sa mutation sinon c’est l’Etat qui va continuer à payer des gens qui n’ont pas d’activité », dit-il. Poursuivant, il se désole de constater que les charges de La Poste culminent à 19 milliards, pour des revenus de six milliards. Ainsi, même avec la subvention de l’Etat à hauteur de six milliards de subventions, il va rester un gap de six milliards. Poursuivant, il a dénoncé le recrutement politique à La Poste à l’origine de cette situation. « Si chaque directeur qui arrive procède à des recrutements clientélistes pour ensuite transférer ces charges à l’Etat, cela pose problème. Ce n’est pas durable et ce n’est pas viable », ajoute le chef de l’Etat qui révèle que le Premier ministre travaille sur un plan de sauvetage de La Poste. « On trouve des sociétés avec 3000, 4000 ou 5000 agents pour une société administrative. Ce n’est possible, c’est des choses à arrêter », martèle le Président Sall qui déplore le même procédé dans les collectivités territoriales qui recrutent des militants pour ensuite demander qu’ils soient reversés à la fonction publique locale. « Les efforts que nous consentons ont des limites objectives. Nous sommes un pays en développement et on ne peut pas consentir tous ces efforts sans avoir une stabilité dans le secteur de l’éducation ou de la santé », charge le chef de l’Etat.
 
« Si on dit que l’Etat n’a rien fait sur la vie chère, c’est un manque de reconnaissance »
 
S’agissant du coût de la vie très élevé, le chef de l’Etat estime qu’il est lié à la crise sanitaire du Covid-19 et à la guerre en Ukraine. Pour autant, il précise que le gouvernement a fait des efforts sur cette question en soutenant le privé pour préserver les emplois. En plus de l’augmentation des salaires aux travailleurs, 160 milliards en 2022 milliards et 159 milliards en 2023, soit 319 milliards en deux ans. S’y ajoute la suspension des taxes sur les produits de grande consommation, soit des pertes de recettes fiscales de l’ordre de 98 milliards. Cette perte de recettes fiscales, dit-il, est projetée à 142 milliards, compte non tenu des subventions non versées. Ce qui fait 240 milliards qui sont projetés entre 2022 et 2023 en termes de perte de recettes fiscales ; en plus des 100 milliards dégagés par l’Etat pour maintenir le pain à son prix initial. « Si on dit que l’Etat n’a rien fait, c’est un manque de reconnaissance. Quel pays de la sous-région a fait mieux que le Sénégal pour atténuer la vie chère ? », interroge le chef de l’Etat qui rappelle les subventions du pétrole, du gaz, de l’électricité pour 450 milliards, soit un montant total de 1185 milliards francs pour atténuer la vie chère entre 2022 et 2023. Tout ce rappel pour dire aux syndicalistes que l’Etat ne peut plus augmenter les salaires. « Ce n’est plus possible, on a atteint le maximum qu’on pouvait faire et on ne peut pas aller au-delà. On est allé même au-delà de l’espérance des syndicalistes », explique le Président Sall, persuadé que les fruits de la croissance doivent être partagés de façon équitable, notamment répondre à l’emploi des jeunes, etc.
 
Un jour de grève équivaut à un jour de salaire
 
Auparavant, le chef de l’Etat a dénoncé les grèves sans préavis qu’il juge « illégales ». Ces grèves, dit-il, n’ont rien à voir avec les revendications sociales des travailleurs et doivent être prohibées et punies. « Je veux bien payer, mais il faut que la productivité et le travail suivent. On ne peut pas tous les jours sans préavis se mettre en grève, c’est violer la loi. J’ai dit au gouvernement d’appliquer la loi dans toute sa rigueur un jour de grève équivaut à un jour sans salaire, c’est le minimum qu’on peut faire », charge le Président Sall.
 
  
 
M. CISS
 
 
 
Macky Sall rend hommage à Mame Less Camara et donne son nom au Cesti
 
Revenant sur les interpellations de Bamba Kassé du Synpics, le président de la République a profité de cette remise des cahiers de doléances pour rendre hommage au défunt journaliste Mame Less Camara. « Mame Less Camara a été un symbole, un monument, une boussole pour la presse. Au-delà des règles du journalisme qu’il enseignait, il a toujours prêché par l’exemple. Et, pour qu’il continue de rester une boussole pour les journalistes, je décide de donner au Cesti son nom pour perpétuer son action », a d’emblée indiqué le chef de l’Etat, avant de poursuivre : « Mame Less a été secrétaire général du Synpics et a fait évoluer positivement les conditions matérielles et morales des journalistes. La presse d’antan, Mame Less en était l’incarnation dans sa pratique professionnelle et personnelle. Cette presse d’antan a contribué à l’élargissement des bases de notre démocratie et a permis au Sénégal de franchir les seuils de démocratisation qui ont amené les alternances successives en 2000 et 2012 », explique Macky Sall. S’agissant du diagnostic sans complaisance peint par le secrétaire général du Synpics, le chef de l’Etat a partagé cette lecture. « Beaucoup sont venus vous trouver dans votre métier et ont dénaturer le secteur de la presse. Autant les professionnels que l’Etat doivent aider à mettre de l’ordre dans le secteur. Je serai attentif aux conclusions des assises sur cette question dans les trois prochains mois. Il y va de l’intérêt national d’avoir une presse autonome, une presse capable de jouer pleinement son rôle dans un Etat de droit », ajoute le président Sall. En outre, il s’est félicité des efforts déployés avec l’instauration de la carte nationale de presse. « C’est heureux que vous ayez remis plus de 1500 cartes de presse aux journalistes et techniciens des médias. Cela va aider avec la cohabitation avec la police chacun fait son travail mais dans les limites de l’exercice des autres. Il faut définir le cadre. Il doit avoir une possibilité entre le ministre de l’Intérieur et les professionnels pour trouver un code de collaboration entre les journalistes et les forces de l’ordre », fait remarquer le chef de l’Etat. Par ailleurs, en ce qui concerne le régulateur, il dira que l’Etat est d’accord de poursuivre la réflexion avec les associations de presse. « Le régulateur, dit-il, doit s’adapter avec cette évolution très rapide des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Nous devons réguler pour que cet outil ne soit pas une arme de destruction massive. Il y a un équilibre à trouver », tranche le Président Sall.  
 
M. CISS
 
LES ECHOS

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