RAPPORT 2021 PROFIL GENRE SENEGAL DE L’UE: 16,7% de violences sexuelles des femmes se produisent dans les lieux de travail et 92,5% des cas s’exercent pendant les heures ouvrables



 
Selon le rapport profil genre Sénégal de l’Union européenne, 78% des femmes au Sénégal ont subi des violences domestiques dans leur vie. 16,7% des violences sexuelles des femmes se produisent dans des lieux de travail. S’agissant de l’accès à la terre, les hommes contrôlent 93,6% des superficies cultivées contre seulement 6,4% pour les femmes.
 
 
 
Les femmes souffrent des stéréotypes genre
 
L’Union européenne a publié son rapport sur le profil genre Sénégal de septembre 2021, dans le cadre du plan d’action genre (Gap III 2020-2024) adopté par le conseil de l’UE en novembre 2020 pour l’égalité entre les hommes et les femmes. Ainsi, il ressort du rapport que même si le Sénégal a fourni des efforts pour renforcer le mécanisme de genre et promouvoir l’égalité des sexes, grâce à plusieurs changements juridiques et institutionnels spécifiques, il reste une société patriarcale avec des pratiques, des attitudes et des croyances traditionnelles qui renforcent les rôles de genre inégaux, et contribuent de manière persistante à affecter négativement la participation des femmes dans le développement. Les femmes continuent de subir les stéréotypes de genre et les normes sociales, telles que la violence sexiste, les pratiques traditionnelles néfastes, (notamment le mariage des enfants, les grossesses précoces et les mutilations génitales féminines), ou l’accès médiocre à l’éducation ou aux terres, entre autres. La violence sexiste se produisant également dans les écoles, a un impact sur l’éducation des filles. Les stéréotypes de genre ont également un impact sur la vie, la sociabilité et le bien-être des garçons et des hommes, car le sujet de la quête de masculinités non toxiques n’est pas suffisamment abordé au Sénégal.
 
 

40% de taux d’alphabétisation chez les femmes
 
L’accès inégal à l’éducation, influencé par des facteurs tels que les grossesses précoces, le travail des enfants et les tâches ménagères, exerce une influence négative sur les taux d’alphabétisation des femmes, bien inférieurs à ceux des hommes (taux d’alphabétisation de 65% chez les hommes, contre 40% chez les femmes). Ce, même si au niveau de l’éducation primaire et secondaire, l’Etat du Sénégal a réalisé des progrès majeurs dans l’élargissement de l’accès des filles et des femmes à l’enseignement au cours des dernières années. Par exemple, l’évolution du taux de scolarisation des filles dans l’élémentaire est passée de 88,6% en 2008 à 93,86% en 2017. L’écart entre régions est significatif pour ce qui est du taux d’achèvement. Au niveau national, plus de filles 65,8% achèvent le cycle élémentaire que de garçons 54,3%. Au niveau de l’éducation supérieure, les filles sont encore une minorité. Selon le rapport, le taux d’achèvement pour les filles au niveau du baccalauréat est de 28,9% contre 34,3% pour les garçons.
 
 
34,5% des femmes sur le marché du travail
 
 
La participation des femmes au marché du travail est de 34,5%, contre 58% pour les hommes (ILO, 2015). 94,1% des femmes entrepreneurs opèrent dans le secteur informel contre 86% des hommes. Mais, 67,1% des activités informelles couvertes par le recensement général des entreprises (Rge) sont dirigées par des hommes et 32,9% par des femmes. Les femmes majoritairement représentées dans le secteur informel, ne bénéficient donc pas de services sociaux de base, et travaillent souvent de longues heures dans des conditions insalubres et parfois dangereuses. Elles sont plus affectées par le chômage (22,1% des femmes, contre 9,6% des hommes), et ont des ressources limitées (intrants agricoles, entreprises et accès à la terre). Le pourcentage des entreprises où les femmes sont majoritairement propriétaires est de 11,80% contre 88,20% pour les hommes. Le pourcentage des entreprises avec des top managers qui sont des femmes est de 14,10% contre 85,90% pour les hommes. L’autonomisation économique des femmes est d’autant plus limitée qu’elles ont moins accès aux Tic. Il existe donc une fracture numérique de genre. À titre d’exemple, 26% des femmes acquièrent un smartphone par leurs propres moyens contre 68% chez les hommes. L’accès à internet demeure plus faible tant pour les hommes 24,8% que pour les femmes 15,6%. Pour le téléphone, 81,4% des hommes y ont accès contre 73,3% pour les femmes.
 
 
Deux sages-femmes pour 1000 naissances
 
 
Le Sénégal a également fourni des efforts et des progrès en matière d’accès à la santé. Mais les femmes rencontrent encore des obstacles, concernant par exemple la santé sexuelle et reproductive. S’agissant de la santé sexuelle et reproductive, 22% des femmes utilisent des contraceptifs. Environ sept femmes sur 10 ont déclaré que la décision concernant leurs propres soins de santé était prise par leur mari. 97% des femmes de 15-49 ans ayant eu une naissance vivante depuis 2015 ont reçu au moins une visite prénatale par un prestataire qualifié. Le Sénégal compte un ratio de deux sages-femmes pour 1000 naissances, alors que selon les normes de l’Oms, il faudrait six sages-femmes pour 1000 naissances.
 
Les femmes ne contrôlent que 6,4% des terres ; 38% des femmes n’ont pas confiance en la justice
 
S’agissant de l’accès à la terre, il ressort du rapport que les hommes contrôlent 93,6% des superficies cultivées et exploitent en moyenne 1,3 ha, alors que les femmes n’en contrôlent que 6,4% et n’exploitent que 0.4 ha. Quant à l’accès à la Justice, il est primordial de répandre la formation sur l’application de la législation interdisant la discrimination à l’égard des femmes, dispensée à tous les niveaux : juges, avocats, procureurs, policiers et autres agents de la force publique, ainsi que chefs locaux, traditionnels et religieux. En effet, il ressort du rapport que les obstacles pour l’accès des femmes à la justice sont la méconnaissance du droit, la stigmatisation des victimes et celle des femmes qui luttent pour leurs droits ; la crainte des représailles ; les difficultés à accéder aux infrastructures judiciaires ; les difficultés à produire les éléments de preuve. Le nombre limité de femmes parmi les policiers, en particulier en milieu rural et périurbain. 38% des femmes au Sénégal n’ont pas confiance dans le système judiciaire.
 
78% des femmes au Sénégal ont subi des violences domestiques
 
En ce qui concerne la violence faite aux femmes, le rapport révèle que 78% des femmes au Sénégal ont subi des violences domestiques dans leur vie. Les violences dans l’espace conjugal et familial demeurent une urgence pour la société sénégalaise. S’agissant des violences sexuelles, 16,7% de violences sexuelles des femmes se produisent dans les lieux de travail et 92,5% des cas s’exercent pendant les heures ouvrables. La mutilation génitale féminine constitue aussi une forme de violence qui entraîne des conséquences psychiques et physiques graves et irréversibles pour les filles et les femmes, et qui continue d’être répandue au Sénégal (21% des filles âgées de 15 à 19 ans ont enduré la mutilation génitale féminine en 2019). Selon, l’UE, il est aussi primordial d’encourager les dénonciations et la pénalisation des responsables. Le rapport a également révélé des pratiques nocives et des préjudices contre les femmes. En effet, en 2019, 29% des filles sont mariées avant 18 ans au Sénégal. La même année, 21% des filles âgées de 15 à 19 ans ont enduré la mutilation génitale féminine.
 
Mendicité : 100.000 enfants dans les rues chaque jour
 
La mendicité des enfants constitue un problème de taille au Sénégal, puisque des milliers d’enfants dits «talibés» sont, chaque année, confiés à des maîtres coraniques et sont internés dans des «daaras». Il est estimé qu’environ 100.000 enfants sont contraints de mendier chaque jour pour de l’argent ou de la nourriture. La société civile signale de graves abus commis contre des enfants talibés par des maîtres coraniques ou leurs assistants : exploitation, maltraitance et négligence. Ils vivent en outre dans des conditions de misère extrême, sans nourriture ni soins médicaux appropriés.
 
Absence de données sur l’exploitation sexuelle et la prostitution
 
Concernant les questions de l’exploitation sexuelle, de la prostitution et de la traite des personnes, il manque des données concluantes sur l’ampleur de la traite des femmes et des filles à destination et en provenance du Sénégal, ou via le territoire sénégalais. Mais les cas de traite sont en augmentation.
 
Moussa CISS
 
 
 
 
 
LES ECHOS

Dans la même rubrique :