Ps, Justice, Mairie, Assemblée: chronique d’une liquidation



 
Passé de héros à zéro ! une expression qui résume bien la vie politique de Khalifa Sall. Accusé de détournement, condamné, le leader de la coalition Taxawu Dakar, auparavant exclu de son propre parti, a été révoqué de son poste de maire et radié de l’Assemblée nationale. Et comme si cela ne suffisait pas, son ambition présidentielle s’est brisée sur les murs du Conseil constitutionnel, qui a rejeté sa candidature. 
 
 
 
Si le régime voulait faire disparaître politiquement Khalifa Sall, comme on le lui prêtait, on peut dire qu’il ne lésine pas sur les moyens. Trainée dans la boue et devant la justice, condamné en première instance et en appel (reste le rabat d’arrêt), le pouvoir, à travers son ministre de la Justice, en a rajouté encore une couche. En effet, Ismaïla Madior Fall a saisi l’Assemblée nationale, pour que le député emprisonné soit déchu de son mandat. «C'est l'article 61 de la Constitution qui prévoit que le député, qui fait l'objet d'une condamnation définitive, est radié de la liste de députés à la demande du ministre de la Justice. On ne peut pas nous reprocher d'appliquer la constitution», s’est justifié hier le garde Des Sceaux, en marge d’un colloque international sur le «droit des activités pétrolières et gazières». C’est dire qu’Ismaïla Madior Fall n’a que faire du rabat d’arrêt qui reste à Khalifa Sall. Et sa demande de radiation a été acceptée par le bureau de l’Assemblée nationale, comme le soutient le patron du groupe parlementaire de la majorité. «Nous avons été saisis par le ministre qui nous a effectivement transmis l'arrêt de la Chambre criminelle de la Cour suprême, révèle le député Apr. Pour nous, c'est très clair : nous ne sommes pas dans le débat juridique, dans le débat de rabat d'arrêt. Nous considérons que c'est le juge qui dit le droit et le droit a été dit», a martelé Aymérou Gningue. Qui se moque pas mal de ceux qui accusent le régime d’acharnement sur l’ex-maire de Dakar. 
 
De héros à zéro : Khalifa perd un à un ses mandats électifs et voit ses ambitions politiques freinées
 
Descente aux enfers pour Khalifa Sall. En un an, le tout puissant patron politique de Dakar est passé des sommets aux bas-fonds politiques. Condamné le 30 mars dernier à 5 ans de prison et 5 millions d’amende dans le cadre de l’affaire dite de la caisse d’avance de la mairie de Dakar, il a vu sa condamnation confirmée en appel le 30 août 2018. A peine un mois après, le 29 septembre, il est remplacé à la tête de la mairie de Dakar (par son premier adjoint Soham Wardini), alors qu’il avait été révoqué par décret présidentiel, dès le lendemain de sa condamnation en appel. Condamné et exclu de la mairie de Dakar, Khalifa Sall nourrissait toujours l’espoir d’en découdre avec ses bourreaux du pouvoir à la présidentielle. Et la situation se présentait assez bien pour lui, avec l’acceptation de son dossier de parrainage. Mais hélas, la déception sera grande, quand, le 14 janvier dernier, le Conseil constitutionnel a rejeté sa candidature. 
Un rejet qui sera probablement confirmé demain, malgré son recours. Et pendant que lui et ses partisans ruminent la colère de ce énième coup, voilà qu’on le débarque de l’Assemblée nationale. Sans compter que bien avant tous ces déboires, en décembre 2017, il a été exclu du Parti socialiste qui était toute sa vie. Voudrait-on effacer le patron de la coalition Taxawu Dakar, devenu Taxawu Senegaal, on ne s’y prendrait pas autrement. Même si le pouvoir se défend de tout acharnement, mettant tout sur le compte des conséquences d’une affaire judiciaire.
 
Mbaye THIANDOUM

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