Le nouveau régime a annoncé la mise en place d'une commission d'experts chargée de renégocier les contrats pétroliers, gaziers et miniers signés sous l'ancien régime, les qualifiant de défavorables pour le pays. Deux chercheurs, Makane Moïse Mbengue qui est l'auteur de nombreuses publications sur le droit international économique et le règlement des différends internationaux et Damien Charlotin, expert en droit international public et en droit des investissements internationaux, expliquent la procédure à suivre pour mener à bien cette renégociation ainsi que les risques qui y sont liés.
Un pays commence généralement par évaluer les contrats existants à travers des audits juridiques et économiques, afin d'identifier les termes qui ne correspondent plus à ses intérêts ou à ses cadres réglementaires actuels. «Une étape essentielle, à ce stade, consiste en l'identification des clauses de renégociation, si elles existent, en ce qu'elles peuvent poser des conditions pour la révision du contrat. Pour les contrats d’hydrocarbures, de telles clauses sont courantes a minima pour renégocier les prix, car les prix internationaux peuvent fluctuer fortement. Il est également courant pour ces contrats de contenir des clauses de renégociation portant sur l’économie générale du contrat, visant à aider les parties à préserver l'équilibre convenu lors de la signature initiale, face à des circonstances changeantes», soulignent Makane Moïse Mbengue, auteur de nombreuses publications sur le droit international économique et le règlement des différends internationaux et Damien Charlotin, expert en droit international public et en droit des investissements internationaux.
Ces clauses de renégociation peuvent cependant être autant un atout ou une aide, surtout lorsqu'elles imposent des conditions ou des modalités particulières pour la renégociation de certains termes essentiels. Bien souvent, lesdites clauses jouent un rôle dans la stabilité du contrat en question. Tout dépend, in fine, du langage contractuel précis.
Mais, en l'absence de telles dispositions, «l'État peut devoir justifier la renégociation en invoquant des changements économiques substantiels ou imprévus. La marge de manœuvre dépend là du droit applicable». Pour ces spécialistes, l'approche optimale pour une telle renégociation doit s’inscrire dans une démarche à la fois économique et politique. «De façon réaliste, aucun investisseur ne souhaite nécessairement renégocier sans quiproquo - si les termes du contrat lui sont favorables, il va préférer maintenir cet avantage. La réceptivité d’un investisseur à la renégociation est encore plus faible s’il se sent désavantagé par rapport à ses concurrents — une approche de renégociation générale permet d’éviter cet écueil», disent-ils.
Les principaux risques incluent la possibilité que les investisseurs réclament des dommages-intérêts pour rupture de contrat, ce qui pourrait mener à des arbitrages internationaux coûteux. La renégociation peut également dissuader de futurs investisseurs, qui pourraient percevoir l'État impliqué comme instable ou imprévisible.
Il y a également un risque de préjudice réputationnel sur les marchés internationaux, ce qui pourrait impacter la notation de crédit ou l'accès aux financements. «Enfin, on ne renégocie pas éternellement, et un accord trouvé doit être respecté – ce qui implique de ne pas se tromper et d'anticiper sur les évolutions futures».
Samba THIAM