À quelques semaines du grand Magal de Touba, les autorités religieuses de la ville sainte sont à pied d’œuvre pour la réussite de l’événement. Malheureusement, comme à presque chaque édition, ces dernières années, les problèmes d’assainissement demeurent un point noir sur le tableau. Le porte-parole du Khalife général des Mourides, qui a fait face à la presse hier, a reconnu la situation désastreuse qui sévit dans plusieurs quartiers de Touba ; néanmoins, souligne-t-il, on ne peut pas imputer la faute aux nouvelles autorités.
Il est impossible, selon Serigne Bassirou Abdou Khadre, pour le régime du Président Diomaye Faye, de régler le problème des eaux à Touba en quatre mois seulement. Le porte-parole du Khalife général des Mourides l’a dit à la presse hier à laquelle il faisait face pour parler de l’organisation du Magal.
Après les nombreux rappels et anecdotes sur l’histoire du Magal, Cheikh Bass est revenu sur les interdictions dans la ville sainte. A l’en croire, les interdictions en vigueur dans la ville sainte étaient une demande de Serigne Touba à travers son khassida «Matlaboul Fawzeyni». D’après ce dernier, Serigne Mountakha a visé les mêmes interdits que Serigne Abdou Lahat, à son époque. Les deux éléments nouveaux sur la liste sont le football et la politique qui n’avaient pas cette aura à l’époque.
«Les tensions qui découlaient de la politique n’en valaient pas la peine, d’où son interdiction»
Le porte-parole du Khalife général des Mourides assure : «si la politique se résumait à attendre le jour des élections pour aller voter pour son candidat et revenir sans histoire, il n’y aurait pas de problème. Mais les tensions qui en découlaient n’en valaient pas la peine. Serigne Touba doit être notre dénominateur commun, et cela rien ne doit l’altérer, même pas la politique».
Abordant la brûlante question de l’assainissement, Serigne Bassirou Abdou Khadre soutient que «les premières opérations pour l’assainissement de la ville de Touba étaient un projet de serigne Saliou Mbacké, qui avait déboursé 600 millions en 1993», renseigne-t-il tout en listant les projets pilotés par les différents Khalifes généraux qui se sont succédé depuis lors.
«Les inondations sont devenues un réel problème à Touba»
La véritable cause des problèmes d’assainissement, dit-il, c’est qu’il y’a un grand décalage de plus de 100 ans entre la création de la ville sainte et les premières opérations d’assainissement. «Et tout ce qui a suivi depuis lors découle essentiellement de mes initiatives : d’abord avec le Président Abdoulaye Wade qui a fait de son mieux. En 2012, on se souvient encore des grandes inondations qui avaient plongé la ville sainte sous les eaux. Serigne Sidy Moctar avait dégagé un milliard pour tendre la main aux fidèles talibés afin de régler le problème. Heureusement, le Président Macky Sall avait pris aussitôt des engagements», dit-il. «L’Etat est certes une continuité, mais croire que les nouvelles autorités peuvent régler le problème des inondations en quatre mois, c’est rêver debout. Ils sont à pied d’œuvre pour soulager les populations, mais la situation demeure difficile», déclare Serigne Bassirou Abdou Khadre.
«Les nouvelles autorités n’ont pas cerné au début la source du problème des eaux à Touba»
L’autre difficulté rencontrée par les services de l’Etat dans ce domaine, c’est qu’ils n’ont pas cerné le problème au début. «L’année dernière, on avait installé au niveau du bassin de Keur Niang une motopompe d’une capacité de 6000 m3, raison pour laquelle les eaux étaient évacuées très vite. Malheureusement, au début de l’hivernage, c’est une motopompe de 2800 qui était installée à Keur Niang», affirme le porte-parole du Khalife général des Mourides, qui assure avoir fait la remarque au ministre de l’Hydraulique et de l’Assainissement lors de sa visite à Touba et ce dernier lui a répondu que ses services s’occupent du problème même s’il y a un petit retard. A l’en croire, ce sont ces retards qui favorisent les inondations à chaque fois qu’il pleut. «Ils viennent d’être installés et nous ne voulons pas donner l’impression de leur mettre la pression. Il est impossible de résoudre le problème de l’assainissement en ce laps de temps, mais ils peuvent aider les populations à évacuer les eaux stagnantes dans les maisons», fait savoir le porte-parole qui demande aussi à l’Etat de prendre toutes les dispositions pour la disponibilité de l’eau potable durant le Magal.
«Aucun homme politique ne peut donner au Khalife un cadeau que les talibés ne lui ont déjà donné»
En ce qui concerne les solutions avancées pour sortir les populations des eaux, Serigne Bass Abdou Khadre soutient : «certains nous suggèrent de loger les sinistrés dans les maisons de Serigne Touba, mais il y a deux problèmes à ce niveau : elles ne sont pas nombreuses et nos hôtes qui viennent au Magal y sont logés. Et cela ne couvre même pas les besoins, nous louons des maisons pour presque une dizaine de millions», révèle le porte-parole du Khalife qui précise qu’il n’est pas dans la logique de démentir tout ce qui se dit, mais qu’il est important des fois de faire quelques précisions. «Les gens ont la fâcheuse tendance à raconter n’importe quoi et malheureusement certains y croient tête baissée. Sachez qu’aucun homme politique ne peut donner au Khalife un cadeau que les talibés ne lui ont déjà donné. Je peux témoigner ici qu’il n’utilise même pas les cadeaux qu’il reçoit. Les deux régimes dont j’ai été témoin de nos interactions, ce qu’ils donnaient pour leur participation dans le Magal était presque inférieur au budget dégagé pour leur berndé», assure-t-il.
Baye Modou SARR