A moins d’un second tour pour éviter des violences postélectorales, le Sénégal est bien parti pour vivre une situation de tension. En effet, devant l’attente prolongée et l’incertitude qui plane depuis dimanche dernier, les jeunesses de l’opposition ont manifesté pour réclamer un second tour. C’est devant les grilles de la Rts qu’un groupe de jeunes, proches de la coalition «Idy 2019», a en effet manifesté hier et brûlé des journaux avant d’être dispersés à coups de grenades lacrymogènes par la police.
L’opposition n’a pas tardé à mettre à exécution sa menace de se faire entendre. Exit les réunions au siège de Bokk Gis-Gis pour l’organisation d’un second tour, les jeunesses de l’opposition sont descendues dans la rue. C’est devant les grilles de la Rts en effet qu’elles sont allées manifester. D’abord, contre certains journaux accusés de manipuler les résultats au profit du pouvoir en place, mais aussi pour dire que les jeunes n’accepteront pas les résultats de la Commission nationale de recensement des votes, si toutefois elle vient à donner Macky Sall pour vainqueur de ces élections au premier tour. D’après les partisans d’Idrissa Seck, un second tour est inévitable au regard des résultats sortis des urnes. «Nous n’accepterons pas que des médias manipulent des chiffres pour accorder à Macky Sall une victoire au premier tour», a déclaré hier Mory Guèye, (président des jeunesses de la coalition Idy 2019) devant les grilles de la Rts.
Selon lui, Idrissa Seck est allé au second tour et le second tour, c’est par la force. «C’est par la force que nous organiserons le deuxième tour, parce que Macky Sall a perdu. Il ne peut pas avoir 57%. Nous n’allons pas attendre vendredi pour sortir dans la rue. Tout le peuple sénégalais doit sortir. Macky Sall n’a pas dépassé les 44%. C’est cela la réalité. Certains organes (qu’il cite nommément) doivent faire attention à la manipulation des chiffres, parce que nous ne voulons pas de la radio Mille Collines. Si Macky Sall veut brûler ce pays, il n’a qu’à essayer le forcing ; il marchera sur nos cadavres», a dit Mory Guèye, qui laisse entendre que dans la presque totalité des départements qui concentrent le grenier électoral, Macky Sall a perdu.
«On ne peut pas perdre Dakar, Thiès, Touba, Ziguinchor, la diaspora et dire qu’on a remporté les élections au premier tour. C’est impensable. On hausse donc le ton pour lui dire que nous n’allons pas attendre vendredi, la Cena ou la commission pour des résultats. Le deuxième tour est très clair».
Ils supplient Macky de ne pas quitter le Sénégal et d’assister à ce qui va se passer
Un autre de ses camarades d’arracher le micro pour faire comprendre que, contrairement au passé, cette fois, ils ne laisseront pas Macky Sall quitter le pays comme si de rien n’était. «Ce que nous demandons à Macky Sall, c’est de ne pas quitter le pays. Qu’il reste pour voir les conséquences de son acte. Pour vivre avec tout le monde ce qui va se passer. Il ne peut pas mettre le feu dans le pays, pour prendre ensuite un avion comme si de rien n’était. Cette fois, on fera tout pour empêcher qu’il sorte du pays», a promis ce jeune.
«Le juge Demba Kandji voulait juste nous donner des calmants…»
Pour sa part, la seule fille du groupe d’ajouter qu’ils continueront leur plan d’action parce que le Sénégal n’a pas pour nom Sall, n’a pas pour nom Dionne. Il ne s’appelle pas non plus Boun. «Ce qui se passe actuellement, le Sénégal ne l’a plus vécu depuis 1993. Des résultats qu’on peine à publier depuis dimanche. Ce que le juge Demba Kandji a fait, hier, c’est de nous donner des calmants. Mais qu’il sache que nous ne sommes pas des enfants. Ce que nous avons fait, c’est exprimer notre volonté à travers les urnes et nous n’accepterons que cette volonté soit confisquée. Le deuxième tour, c’est par la force», déclare à son tour la fille. A peine elle a le temps de poser un autre mot que les gendarmes en charge d’assurer la sécurité de la Rts entrent en action.
Moussa Thiongane et Ass Malick arrêtés
Devant le refus des jeunes de quitter les lieux, la police venue en renfort va vite trouver la solution en balançant les grenades lacrymogènes. Deux des responsables seront arrêtés et mis dans la fourgonnette. Il s’agit de Moussa Thiongane des jeunesses de Guédiawaye, Ass Malick de Fass Colobane Gueule-Tapée.
Madou MBODJ