MACKY SALL CREVE L’ABCES : Le pays soulagé, Benno cherche la perspective, Sonko dans l’expectative




 
La gestation a été longue mais au bout, la délivrance s’est opérée sans complication. Ce 3 juillet, dans la trajectoire de la nation sénégalaise, sera marqué d’une pierre blanche. Le soulagement sans être intégral ne peut être nié. Car le président de la République, dont la décision était attendue de tous bords à propos d’une troisième candidature, a enfin crevé l’abcès : il ne sera pas de la course de février 2024. Une décision forte, qui va résonner longtemps dans les oreilles des membres de sa coalition Benno Bokk Yakaar, de ses partisans à l’Apr, mais qui va avoir de profondes répercussions sur le large spectre du landernau politique sénégalais.
 
 
Cette déclaration de non candidature à sa propre succession du président sortant, après qu’il a appelé urbi et orbi ses partisans à l’union et à la solidarité, va en effet l’obliger à pousser son camp à se retrouver autour d’un candidat le plus consensuel possible. Une tâche titanesque, au vu du niveau d’organisation aussi bien de sa propre formation politique que de la coalition Bby. Mais également du vide que lui-même aura entretenu autour de sa personne en termes de numéro 2 ou de dauphin.
 
Les fidèles du cercle restreint
 
Le retour du poste de Premier ministre peut faire penser que l’occupant de la fonction pourrait être naturellement désigné comme possible successeur. Amadou Ba, pour ne pas le nommer, porte depuis quelque temps la casaque de numéro 2 politique sans que celle-ci lui soit officiellement remise. Il devra donc être confirmé dans cette posture et mis en selle pour mener les troupes. Ce qui ne coule évidemment pas de source, puisque l’homme est loin de faire l’unanimité dans le camp présidentiel. D’autant que d’autres personnalités dans le cercle restreint du Président Macky Sall peuvent se prévaloir de prétentions similaires, à l’instar du fidèle Directeur de cabinet Abdoulaye Daouda Diallo, du beau-frère Mansour Faye ou du ministre de l’Agriculture Aly Ngouille Ndiaye. Mais le plus difficile dans la manœuvre sera de continuer à driver l’équipe, à bien sûr maintenir la cohésion, la solidarité et l’union autour de ce choix quelque peu impromptu. Même si l’on comprend maintenant toute l’allergie récemment réitérée du Président Macky Sall à supprimer le cumul des fonctions de chef d’Etat et de chef de parti.
 
L’allergie à supprimer le cumul des fonctions de chef d’Etat et de chef de parti
 
Toutefois, Macky Sall peut également se tourner vers son successeur institutionnel, l’actuel président de l’Assemblée nationale, Amadou Mame Diop, pour lui mettre le pied à l’étrier. Un choix qui ne serait pas surprenant et qui aurait l’avantage de plaire à l’entourage familial. Le personnage déjà mis à la tête de la 2e institution du pays à la surprise générale pourrait mettre d’accord tous ceux qui jouaient des coudes. Néanmoins, quel que soit le choix définitif du Président Sall quant à son candidat pour lui succéder, il restera à le faire accepter par son camp. Certains sans nul doute refuseront de s’aligner derrière ce choix d’un homme à qui il ne reste que quelques mois de pouvoir, les uns par conviction et voulant se lancer dans la course présidentielle, les autres par pur opportunisme lié à la météo politique qui suggère de quitter un bateau qui coule.
 
Des départs par conviction ou opportunisme
 
Quoi qu’il en soit, le Président Macky Sall n’en a pas encore fini avec l’exercice du pouvoir. Il lui faudra, comme il l’a déclaré à la nation, conduire son mandat jusqu’au bout en sauvegardant la paix, la sécurité, l’unité et l’ancrage démocratique du pays.
Mais tout n’est pas de ne pas briguer un troisième mandat par le Président Macky Sall pour que les nuages soient dégagés de l’horizon sénégalais. Et le soulagement généralisé pourrait n’être que de courte durée C’est vrai que le dialogue national, dont les conclusions vont incessamment être soumises à l’aval de l’Assemblée nationale, a élagué certains problèmes cruciaux liés au processus électoral et aux candidatures, mais une grosse ombre reste au tableau.
 
Sonko le dindon de la farce
 
Le cas de Ousmane Sonko, celui que tous les sondages donnent victorieux à la prochaine présidentielle, actuellement barricadé chez lui par les forces de l’ordre et condamné par les tribunaux à une peine le rendant inéligible, reste à être élucidé. Qu’il soit arrêté et son procès repris, pour avoir été condamné par contumace, tout concourt aujourd’hui à lui faire subir le sort du dindon de la farce. Certes, le risque de violence est amoindri du fait de la déclaration de non candidature de Macky Sall, mais il reste latent. Qu’on soit parvenu à isoler politiquement le leader du Pastef, c’est désormais évident, mais sa popularité reste intacte et rien ne semble décourager ses partisans à le porter au palais. Pour dire qu’une nouvelle distribution des cartes est en train de s’opérer et que les prochaines semaines nous édifieront.
Mansour KANE
 
LES ECHOS

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