Alors qu’elle doit faire bloc pour espérer peser sur le processus démocratique, la société civile sénégalaise continue de se déchirer. Après les fissures enregistrées en son sein après la déclaration de Ousmane Sonko disant qu’il ne signerait pas la charte de non-violence du cadre unitaire de l'Islam au Sénégal, les choses se compliquent au niveau de la société civile sénégalaise. Hier, le collectif Noo Lank a publié un communiqué pour se démarquer de l’approche de l’autre partie de la société civile, l’accusant de manquer de réalisme et remettant en question leur engagement à jouer le rôle d'arbitre du jeu politique. À l’origine de ce clash, le refus d’une partie des acteurs d’inscrire dans la charte de la paix «le principe élémentaire de la non candidature du Président Macky Sall en 2024», demandé par le collectif Noo Lank.
Considérée par certains comme l’arbitre du jeu démocratique, la société civile sénégalaise semble se perdre dans sa mission. En tout cas, les acteurs ne parlent plus le même langage et certains, dépités par le comportement d’autres, commencent à quitter le cadre devant servir à les regrouper. Dans un communiqué publié hier, Noo Lankse démarque de l’approche de l’autre partie de la société civile, l’accusant de manquer de réalisme et de remettre en question leur engagement à jouer le rôle d'arbitre du jeu politique. «Le collectif Noo Lank, après avoir discuté avec les organisations de la société civile, a décidé de s'écarter de leur approche qui manque de réalisme et remet en question leur engagement à jouer le rôle d'arbitre du jeu politique», a accusé le collectif citoyen.
La pomme de discorde
Et d’expliquer sa décision par le refus des acteurs d’inscrire dans la charte de la paix le principe élémentaire de la non candidature du Président Macky Sall en 2024.«Dans le cadre de ces échanges pour structurer les principes d'une charte applicable jusqu'en 2024, le collectif a développé, insisté et réitéré que les acteurs de la société civile qui veulent porter la charte de la paix affirment dans celle-ci le principe élémentaire de la non candidature du Président Macky Sall en 2024, puisque le niveau actuel des violences dans l'arène politique et leurs occurrences multiformes est déterminé par une source principale : le forcing d'une troisième candidature», a fait savoir Noo Lank.
Ainsi, estimant qu'il suffirait que le président de la République annonce sa non candidature en 2024 pour que la tension et le niveau des enjeux reviennent à une intensité normale, Noo Lank regrette que «cette candidature forcée que le Président et son équipe cultivent par la ruse et la sanction systématique de ceux qui s'y opposent et la protection de ceux qui l'encouragent doit être stoppée».«Elle vaut pour eux toute la violence politique nécessaire. Elle est le risque n° 1 de déstabilisation du pays», ajoute encore Noo Lank, indiquant que cette question doit être adressée dans le cadre de la dynamique de paix qu'il entend promouvoir avec la société civile et les acteurs politiques.«De ce point de vue, les acteurs qui veulent porter un discours de paix doivent aussi porter un discours de vérité et non se limiter à énoncer des principes généraux de paix, auxquels tout le monde adhère, mais qui ne changeront pas la tension, les enjeux et surtout la source majeure de cette tension que constitue la posture et les manœuvres du Président et ses hommes pour s'éterniser au pouvoir», accuse encore l’organisation de la société civile.
«Il faut des acteurs dont la déférence au président de la République ne les empêche pas de dire et défendre la vérité»
Mais s’il en est ainsi, c’est que, croit savoir Noo Lank, «ne peuvent jouer le rôle d'arbitres neutres des organisations ou personnalités qui ne peuvent dire haut et clairement ce que les Sénégalais savent tous : que le Président Macky Sall n'a pas droit à un troisième mandat».
Pour eux, ne pas reconnaître ce problème comme la source principale des forcings et stratégies de violences politiques développées par le pouvoir, c'est manquer de réalisme. Ce handicap mènera la charte à l'échec.«La charte et la dynamique de paix durable ont besoin d'acteurs dont la déférence au président de la République ne les empêche pas de dire et défendre la vérité. C'est la sincérité et la vérité profonde de ce discours qui résonnera positivement avec les Sénégalais et les acteurs politiques et non uniquement la déférence à leur statut de représentants éminents d'organisations de la société civile ou religieuse. Les Sénégalais ont dépassé ce stade», ajoute Noo Lank qui précise avoir décidé de ne pas s'engager dans cette impasse et entend développer d'autres voies.
Sidy Djimby NDAO