JOURNEE DE LA MEDIATION : A l’heure de la conciliation comme mode de règlement des litiges




 
 
Pour la présidente du Tribunal du Commerce hors classe de Dakar, Aïssatou Ndiémé Diallo, il faut mettre un terme à la logique du tout judiciaire, car le procès n’est plus la seule solution. Elle préconise ainsi la médiation et la conciliation comme mode de règlement des litiges. En effet, selon l’expert Abdoulaye Rokhaya Wane, l’accumulation des dossiers au tribunal fait baisser la côte de crédit du Sénégal, présenté au niveau international comme un pays où il n'est pas sûr d'investir.
 
 
 
« La Journée de la médiation s’inscrit dans la logique des efforts du gouvernement à engager le Sénégal dans la modernisation des voies d’accès à la justice. En effet, le Gouvernement du Sénégal a entrepris, ces dernières années, dans le secteur de l'administration judiciaire, des réformes majeures visant à améliorer l'environnement des affaires et à faire du Sénégal un pays attractif pour les investissements. C'est dans ce contexte que le décret n°2014-1653 du 24 décembre 2014 relatif à la médiation et à la conciliation a été adopté pour promouvoir la culture et la pratique de ces modes alternatifs de résolution des litiges », déclare la présidente du Tribunal du Commerce Aïssatou Ndiémé Diallo à l’occasion de la Journée de la médiation. Le but recherché, précise Mme le juge, étant le désengorgement des tribunaux, ainsi que la réduction des délais et des coûts de procédure ; d’autant plus que l’institution du juge de la mise en état, rappelle-t-elle, n'a pas permis de mettre fin aux contraintes liées aux lenteurs dans la mise en état des affaires et à l'encombrement anormal des rôles des juridictions. « La médiation et la conciliation sont apparues comme étant des procédures consensuelles de règlement des litiges, lesquelles reposent sur la volonté des parties. Elles se caractérisent par l'intervention d'un tiers neutre et indépendant et offrent l'avantage considérable pour les parties de résoudre leur différend d'une manière confidentielle selon des modalités convenues », explique la présidente du Tribunal du Commerce de Dakar, avant de revenir sur le rôle des parties dans ce mode de règlement des litiges.
 
Le procès n’est plus la seule solution
 
« Pour nous les juges, il s’agira de comprendre le rôle qui nous est assigné. A titre principal, nous devons faire la promotion des Modes alternatifs de règlement des différends (Mard) plutôt que d’en être des acteurs. Encombrer les juges avec des dossiers de médiation ou de conciliation c’est engorger de plus belle le Tribunal avec la conséquence certaine d’exacerber le ralentissement du traitement des dossiers. Certes, il nous incombe d’observer l’étape nécessaire de la conciliation des parties, mais cela consiste plus, à les encourager à recourir aux Mard avant l’étape du procès. C’est pourquoi, avec l’accord des parties, nous comptons dorénavant renvoyer vers des professionnels de la médiation et de la conciliation, les affaires qui n’ont pas encore été jugées », ajoute Aïssatou Ndiémé Diallo qui invite, dans la foulée, les avocats, maillon essentiel de la chaîne judiciaire, à sortir des sentiers battus. « Il leur appartient de mettre un terme à la logique du tout judiciaire. Il est acquis à notre époque que le procès n’est plus la seule solution. Les avocats sont donc les mieux placés pour faire entendre raison à leurs clients et nous comptons sur eux pour faire évoluer les mœurs. Les notaires, principaux rédacteurs des conventions, je les invite à inclure dans les contrats comportant leur seing des clauses de règlement alternatifs des différends etc. », tranche la présidente du tribunal du Commerce de Dakar.
 
Quand l’accumulation des dossiers au Tribunal baisse la côte de crédit du Sénégal et le présente comme un pays où il n’est pas sûr d’investir
 
Le consultant Abdoulaye Rokhaya Wane qui accompagne le tribunal du commerce dans le cadre des reformes de la justice commerciale au Sénégal, dira : « la médiation et la conciliation, c’est le propre de tous les pays qui marchent. Vous allez en Inde, vous allez à Maurice, c'est la même chose. Le Sénégal n'est pas hors du monde. Nous devons avec intelligence regarder ce qui marche ailleurs et voir comment l'adapter à notre environnement. C'est ce qu'on essaie de faire pour encourager et promouvoir la médiation conciliation au Sénégal », indique l’expert, avant de poursuivre : « c'est très important d'anticiper. Au Sénégal, nous avons du gaz et du pétrole. Ce sont des contentieux auxquels on n'est pas habitué. Il faut préparer nos magistrats, nos avocats et nos experts. Dans le monde, tous ces contentieux gaz, pétrole sont gérés généralement par la médiation et la conciliation et non pas par la voie juridictionnelle qui est longue et coûteuse », précise M. Wane. A l’en croire, lorsque les dossiers sont accumulés au Tribunal, ça fait du crédit non recouvré. C’est surveillé sur le plan international et ça baisse la cote de crédit du Sénégal. Ça présente le Sénégal comme un pays où il n'est pas sûr d'investir. On doit tous travailler à changer de paradigme et c'est pour ça qu'il faut encourager partout la médiation conciliation comme solution aux différents litiges. L’expert a cependant révélé, selon une étude de la Banque mondiale, que depuis un an, une baisse de 25% des contentieux par les actions de règlement des contentieux à l’amiable qui ont déjà commencé au tribunal du commerce. Selon le consultant, c’est mieux d’aller s’entendre, discuter en affaire que de faire des procédures devant des tribunaux qui durent très longtemps et qui sont coûteuses.
 
M. CISS
 
 
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