Après que les 22 témoins ont été appelés à la barre, hier, lundi 5 février 2018, lors de l’entame du fond des débats sur le procès de la caisse d’avance qui met en cause Khalifa Sall et ses 7 coinculpés. Ces témoins ont été tous renvoyés jusqu’au mercredi, sur ordre du tribunal, aux fins de ne pas assister aux débats, comme le règlement le souhaite. Khalifa Sall et ses co-prévenus ont fait face au juge correctionnel de Dakar et Fatou Traoré était la première à être appelée à la barre.
Ce fut d’abord un bras de fer sur la prise de parole, entre les différentes parties qui avaient toutes oublié que c’est le président du Tribunal qui avait la police de l’audience et qui devait donc dire qui devait parler le premier. Pour les avocats de Khalifa Sall, le Tribunal doit commencer par entendre le maire de Dakar avant tout autre prévenu, au motif que c’est lui, dans cette affaire, qui est le prévenu principal. Me Ousseynou Fall a été le premier à revendiquer la parole et à fustiger le choix du Tribunal d’interroger d’abord la dame Fatou Traoré. Me Khourechi Ba a abondé dans le même sens, en déplorant aussi cette volonté de commencer par, dit-il, «la maille la plus faible pour finir par donner l’impression de faire en sorte que l’étau se resserre autour du maire Khalifa Sall». Reprenant de nouveau la parole, Me Ousseynou Fall paraphrase Bokassa qui disait, lors de son procès, qu’«il se sent déjà condamné devant ce tribunal».
Le procureur Serigne Bassirou Guèye est alors intervenu pour prendre le contrepied de la défense, en soutenant qu’il ne voit que des prévenus. «Pourquoi le prévenu Khalifa Sall devrait être le prévenu principal ?», s’est interrogé le procureur de la République, avant d’inviter le Tribunal à rejeter cette demande et à poursuivre sa logique. Le bâtonnier Me Félix Sow s’est rangé dans le même sillage. «Une différenciation des prévenus entraine déjà une appréciation sur la responsabilité de Khalifa Sall», souligne l’avocat de l’Etat. A son tour, l’agent judiciaire de l’Etat (Aje) a indiqué qu’il ne voyait aucun inconvénient que la dame passe d’abord devant le juge, avant le reste des prévenus. «A l’heure où nous parlons, tous les mis en cause sont renvoyés devant le Tribunal comme des prévenus. Nous estimons que l’ordre par lequel vous décidez d’appeler les prévenus échoit au Tribunal», a déclaré Antoine Diome.
L’avocat de la mairie de Dakar, Me Ousseynou Gaye, s’est inscrit dans la logique des avocats de Khalifa Sall. Il a reconnu, tout de même au tribunal sa liberté de choisir qui passe avant l’autre. «A partir du moment où vous ne devez pas me dire ce que je dois dire, au cours de ma plaidoirie, moi j’estime que je ne dois pas vous dire comment vous devez procéder», a-t-il précisé.
Le juge Malick Lamotte a salué les propos de Me Gaye, tout en précisant à l’attention de tout le monde : «depuis que le Tribunal a commencé à gérer des affaires correctionnelles, jamais on ne lui a dicté qui interroger le premier. Pourquoi vouloir aujourd’hui chercher ce qui n’existe pas ? La direction des débats revient au Tribunal. C’est le Tribunal qui voit comment doivent se dérouler les débats». Le débat est clos, le juge a décidé de commencer par Fatou Traoré.
Fatou D.DIONE (Stagiaire)