INTERPRETATION DE LA DECISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL : Les experts électoraux parlent d’incohérences, d’incompréhension et de coup d’Etat de la démocratie



 
La décision du Conseil constitutionnel est tombée vendredi tard fans la nuit et elle continue de défrayer la chronique. Les sept sages ont décidé de suivre le ministre de l’Intérieur en invalidant la liste des titulaires de Yewwipour le scrutin proportionnel et la liste des suppléants pour la coalition Benno Bokk Yakaar.  Cette divisionde la liste qui est une première est incompréhensible pour les experts électoraux.
 
 
L’histoire retiendra que c’est lors des élections législatives 2022 que la liste nationale composée de titulaires et de suppléants a été scindée en deux pour la première fois. Un fait nouveau dans les annales de l’histoire électorale qui laisse même perplexesles experts du processus électoral.Ngouda Mboup, qui n’a pas cessé de décrier les vices notés lors de cette procédure, estime qu’avec cette décision,  aussi bien le ministre de l’Intérieur que le Conseil constitutionnel doivent des explications précises aux Sénégalais et aux électeurs.
 
Ngouda Mboup: «quelle photo doit figurer sur la liste nationale de la coalition YewwiAskan Wi ?»
 
S’exprimant sur sa page facebook, il indique : «si Ousmane Sonko dirige la liste des titulaires et tout autant la liste des suppléants, avec l'irrecevabilité déclarée de la liste des titulaires, qui dirigera la liste des suppléants ?», s’interroge le constitutionnaliste, qui convoque l’article L.173-2 du Code électoralqui rend obligatoire, selon lui, l’indication du nom du candidat  occupant le 1er rang sur la liste nationale, c'est à dire le 1er candidat titulaire.
Poursuivant, Ngouda Mboup souligne qu’il en sera de même pour la photo qui doit figurer sur la liste.«Si la photo d'Ousmane Sonko doit figurer sur la liste nationale, avec l'irrecevabilité déclarée de la liste des titulaires, quelle photo doit figurer sur la liste nationale de la coalition Yewwi Askan Wi ?», se demande Ngouda Mboup, qui invite ces derniers à ne pas jouer avec le droit.
 
Alioune Souaré : «admettre ce vide juridique relève à mon avis d’une incohérence»
 
Sur sa page facebook, le député sortant quant à lui parle d’incohérence. Selon Alioune Souaré, avec la liste majoritaire de Yaw à Dakar, le Conseil constitutionnel a évoqué deux principes sur lesquels il s'est appuyé pour régler le problème : en premier lieu «le principe général du droit, "ce qui n'est interdit soit permis" et deuxièmement,le fait qu’il appartienne au Conseil constitutionnel d'user de son pouvoir d'interprétation, en cas d'absence de texte, pour assurer la mise en œuvre du droit».
Mais pour sa décision concernant  la recevabilité des listes de Yewwi Askan Wi et Benno Bokk Yakaar, avec seulement des titulaires pour la première  nommée ou des suppléants pour la deuxième, au scrutin proportionnel, «le même Conseil constitutionnel valide ces listes incomplètes et évoque un vide juridique comme motif de rejet des  recours déposés».
Les explications données par les sept sages ne convainquent pas du tout Alioune Souaré. «Il écrit au point 7 de sa décision et, sur le lien entre titulaire et suppléant d'une liste proportionnelle:Aucune disposition du code électoral ne prévoit d'un vice entachant l'une des listes puisse avoir des répercussions sur l'autre», souligne le parlementaire, qui ajoute : «admettre ce vide juridique relève, à mon avis,d’une incohérence. D'autant plus que le Conseil constitutionnel dispose d’un pouvoir d'interprétation en l'absence de texte comme il l'a souligné sur l'affaire de la liste majoritaire de Yaw àDakar», dit-il.
 
Ndiaga Sylla :«cela est assimilable à un coup d'État de la démocratie»
 
Moins tendreque ses prédécesseurs,Ndiaga Sylla, a lui aussi utilisé sa page facebook, pourparler d’écroulement du socle de la démocratie avec cette décision. «Lorsqu'on rend inéligibles des adversaires à laprésidentielle et irrecevables des candidatures del'opposition aux législatives par crainte d'une cohabitation ;lorsque le Juge électoral valide les décisions du ministrechargé des Élections avec des motivations laconiques oude simples affirmations, en violation du droit fondamentalde suffrage, lorsque l'Administration et le Juge s'arrogent le droit dedécider à la place des citoyens/électeurs, cela est assimilable à un coup d'État de la démocratie !C'est le socle de la République qui s'écroule.C'est la stabilité politique et la paix sociale qui sontmenacées», déplore Ndiaga Sylla selon qui «il devient impératif de mener le combat pour sauver notre république».
NdèyeKhadyDIOUF
 
 
LES ECHOS

Dans la même rubrique :