INTERDIT DE SORTIE DU TERRITOIRE FRANCAIS: Un Sénégalais empêché par la justice française de venir au Sénégal pour assister à l’enterrement de son frère



 
 
En France, la justice a refusé à un Sénégalais vivant dans la commune de Stains de se rendre à l’enterrement de son frère au Sénégal. En décembre dernier, le jeune homme de 31 ans avait été condamné à cinq ans d’interdiction de sortie du territoire français. Pourtant, la justice française a eu à prendre de telles décisions, même si celles-ci sont rares. 
 
 
C’est toute la ville de Stains, une commune française située dans le département de la Seine-Saint-Denis, en région d’Île-de-France, qui était dans l’émoi à la tombée de la décision du tribunal, avant-hier. La justice française a, en effet, pris la décision d’interdire à un Sénégalais qui voulait se rendre dans son pays pour assister à l’enterrement de son frère, de quitter le territoire français. 
Tout a commencé dans la nuit du 15 au 16 juillet 2019. Ce jour-là, deux jeunes hommes de 29 et 26 ans sont mortellement fauchés par plusieurs rafales d'arme à feu. Un troisième est gravement blessé. Parmi les deux morts, un est originaire du Sénégal. Quinze jours plus tard, alors que l'enquête est toujours en cours, c'est le temps des adieux : l'enterrement du plus âgé des trois hommes a eu lieu, hier mercredi, au Sénégal, le pays d'origine de sa famille.
Mais son frère aîné, jugé l'an dernier dans une affaire de trafic de stupéfiants, ne pourra y assister. En décembre 2018, il a été condamné par le tribunal correctionnel de Bobigny à 30 mois de prison. Il n'est pour l'instant pas détenu, dans l'attente d'une convocation du service d'application des peines du Val-d'Oise, département où il réside. Les juges avaient assorti cette peine d'une interdiction de quitter le territoire français pendant cinq ans. Il espérait tout de même pouvoir assister aux obsèques de son jeune-frère. Son avocat avait, dans ce sens, écrit au parquet de Bobigny et avait transmis les billets d'avion pré-réservés, aller et retour. La réponse est tombée en fin de semaine dernière : demande refusée.
Une décision que notre compatriote et son avocat ont vite fait de rejeter. Et depuis, Me Steeve Ruben ne décolère pas. «C'est totalement injuste. Mon client le vit très mal, il n'arrive pas à y croire. La justice ne peut pas refuser à un homme la possibilité de quitter le territoire pour dire adieu à son frère, c'est faire totalement abstraction d'une situation imprévisible. C'est une décision dénuée de toute humanité», martèle la robe noire.
De son côté, une source judiciaire citée dans la presse française estime que le tribunal a bien fait. «Le tribunal correctionnel est intelligent : s'il a prononcé cette condamnation aussi sévère, c'est qu'il a de bonnes raisons, la décision de justice doit s'appliquer. C'était sans doute un peu tôt pour envisager une mesure exceptionnelle», commente la source. 
Selon le secrétaire général de l'Union syndicale des magistrats (Usm), ce cas de figure est assez rare : «d'habitude, on a le schéma inverse : une personne est incarcérée et demande à sortir pour assister à des obsèques. Alors, le juge d'application des peines est saisi : il peut accepter ou refuser s'il y a un risque d'évasion ou de renouvellement des faits. L'appréciation se fait, chaque fois, au cas par cas», explique Jacky Coulon. 
À l'automne 2015, la décision d'un juge d'application des peines de l'Isère avait provoqué la fureur d'une cinquantaine de personnes qui avaient notamment incendié des palettes et des voitures, semant la pagaille dans la petite ville de Moirans. Cette fois-là, la justice avait refusé à un jeune homme de 24 ans, incarcéré, de se rendre aux obsèques de son jeune-frère.
 
Sidy Djimby NDAO
 

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