FAIT INEDIT A LA COUR SUPREME DANS L’AFFAIRE NGOR DIOP La Chambre retire le dossier au rôle et donne une seconde chance à l’agent judiciaire de l’Etat



 
C’est hier que la Cour suprême devait statuer sur le recours pour excès de pouvoir du juge Ngor Diop. Cependant, l’affaire qui était bien inscrite au rôle de la Chambre administrative a été retirée, selon le président de la Chambre, au motif qu’il y a une pièce du dossier que devait rendre l’agent judiciaire de l’Etat et qui n’y figure pas. Un argument qui ne convainc pas les avocats du juge selon qui le dossier constitue une patate chaude pour la Cour qui ne veut pas désavouer le président de la République.
 
 
Alors qu’elle devait statuer, hier, sur le recours en annulation du juge Ngor Diop, la Cour suprême a fait faux bond aux avocats. En effet, la Chambre administrative a retiré le dossier de son rôle. Motif évoqué : il y a une pièce du dossier visé dans l’acte de nomination que devait produire l’agent judiciaire de l’Etat et qui n’a pas été versé dans son dossier. Du coup, le président a fait savoir aux conseils du requérant qu’il va adresser une lettre pour demander la production du dossier. Selon la Chambre administrative, elle veut juste être exhaustive et donc prendre tout en compte. Du coup, une lettre sera adressée à l’agent judiciaire de l’Etat par le président de la Chambre, pour lui demander de produire la pièce. Un fait tout à fait inédit pour ne pas dire un coup de théâtre.
 
L’agent judiciaire de l’Etat… absent
 
 
La question principale est de savoir pourquoi la Chambre n’a pas seulement ordonné le renvoi à une autre date ou au moins un renvoi sine die au lieu de retirer tout bonnement le dossier du rôle ? Ce, surtout que l’agent judiciaire de l’Etat n’était même pas présent à l’audience. L’autre interrogation est de savoir si la Chambre allait avoir le mêmecomportement si c’était la partie requérante qui avait omis de joindre le dossier.
 
 
 
Les avocats de Ngor Diop choqués
 
 
Dans le camp du magistrat Ngor Diop, on est tout simplement dépité. Selon un conseil du juge, la Chambre est coincée parce que le recours est bien argumenté et elle ne veut pas annuler le décret pour créer une jurisprudence et mettre mal à l’aise l’autorité suprême. En clair, le dossier ne sera plus jamais enrôlé, selon lui. «En fait, le dossier est une patate chaude pour la Cour suprême qui ne sait pas quoi faire ; voilà pourquoi ils n’ont même pas renvoyé sine die ou renvoyé à une autre date. Cela aurait des conséquences graves pour l’Etat s’ils annulaient le décret, parce que plus jamais l’Etat ne pourrait user de consultation comme ils ont l’habitude d’en user et d’en abuser en évoquant la nécessité de service ; également, cela va carrément révolutionner le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature», peste la robe noire.
En fait de pièce manquante, il s’agit de «l’avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature». «Ils savent que cet avis n’existe pas et même s’il existait, l’Etat n’allait jamais le produire. C’est tout simplement une échappatoire qu’ils cherchent, sinon, ils pouvaient renvoyer et non retirer le dossier», fulmine encore l’avocat.
Faut-il le souligner, le retrait de l’affaire du rôle signifie que le dossier va être remis au Parquet général qui décidera de l’enrôlement à la date qui lui conviendra. Pour notre interlocuteur, si c’était la partie requérante qui avait omis d’introduire une pièce dans son dossier, la Chambre allait directement «en tirer les conséquences», statuer immédiatement et «rejeter le dossier».
Rappelons que Ngor Diop avait déposé un recours pour excès de pouvoir après qu’il a été affecté à Thiès par consultation sur place. Ce, simplement parce qu’il a refusé d’obtempérer à l’instruction de la chancellerie de libérer un guide religieux.
 
 
Alassane DRAME
 
LES ECHOS

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