EXPULSION DES ANCIENS MILITAIRES ET LEURS FAMILLES DE TERME SUD (OUAKAM) SUITE A UNE DECISION DE JUSTICE: C’était chaud entre la gendarmerie et les occupants



 
Ils y ont passé une vie. Certains en gardent les plus beaux souvenirs de leur existence. D’autres y ont vu leurs enfants grandir, devenir adultes et fonder un foyer, mais ils n’auront pas la chance de les voir vieillir dans ce quartier. Les occupants du titre foncier numéro 1143/Nga, Terme Sud Ouakam, ont été contraints à vider les lieux.
 
Ils auront résisté, mobilisé femmes, enfants, toutes les énergies possibles pour ne pas se faire déguerpir, mais, au terme d’une folle journée passée à échanger des pierres contre les grenades des forces publiques de sécurité comme la gendarmerie, les occupants du titre foncier numéro 1143/Nga, Terme Sud à Ouakam, n’ont pas eu gain de cause. Les forces de sécurité étaient de loin supérieures. Aussi bien en nombre, qu’au vu des moyens à disposition.
 
 
Deux gendarmes blessés
 
 
Il y avait presque une quinzaine de véhicules de la gendarmerie remplis d’éléments, compte non tenu des éléments du bataillon des sports et autres militaires en tenue qui étaient mobilisés pour l’opération. Conséquences : malgré les pneus brûlés, la mobilisation exceptionnelle des femmes (aux premières loges pierres en main, mouchoirs bien noués à la ceinture pour les femmes plus âgées et tenue de sport ou jeans tee-shirt pour les plus jeunes), les barricades érigées un peu partout, la gendarmerie n’a pas eu trop de mal à les repousser et à enlever les obstacles mis en place pour empêcher le déploiement des hommes. A part deux gendarmes blessés dont l’un qui a reçu une pierre à la tête, les forces de sécurité n’ont eu aucun mal à faire appliquer la décision de justice.
Ils ont tout simplement maté la résistance avant que la Dscos, sous la supervision d’un huissier de justice, ne procède à l’expulsion des familles. Pour certains, ce sont les éléments du bataillon des sports de l’armée qui sortaient les meubles de ces familles d’anciens militaires qui, pour la plupart, ont passé la nuit à la belle étoile avant-hier, parce que ne sachant où aller et que faire dans un délai si court avec le trop plein de bagages.
Ces derniers disent être les ayants droit légaux, pour avoir fait valoir leur droit de préemption auprès de l'État du Sénégal en vue de bénéficier de ces logements ; et aussi bien le Président Wade que le Président Macky Sall avaient émis un avis favorable. Mais la Comico, suite à l'ordonnance délivrée par la Cour suprême au mois d'août, a fait déployer les gros moyens pour déloger ces anciens militaires du site ; mettant ainsi fin à un litige foncier vieux de 11 ans, opposant la hiérarchie militaire sous le couvert de la Comico aux anciens militaires qui logent avec leurs familles dans ces bâtiments depuis plus de 40 ans.
Madou MBODJ
 
 
 
ENCADRE
 
Ce que dit la Dscos pour se tirer du tribunal populaire
 
 
Pour expliquer la décision d’expulsion des occupants du terrain de la Comico sis à Ouakam Terme Sud, le colonel Matar Diop, Directeur de l’information et des relations publiques des armées, dans un communiqué signé ce 28 septembre dernier, écrit que «par arrêt n°48 du 26 décembre 2019, la Cour suprême a confirmé la pleine propriété de la Comico sur l’extrait du titre foncier N 1143/Nga sis à Ouakam Terme Sud qu’elle a acquis à titre onéreux auprès de l’Etat du Sénégal le 16 octobre 2018. Elle a ainsi débouté le collectif formé par les occupants de ce site, d’anciens militaires à qui des logements avaient été attribués pour nécessité de service à Terme Sud et qui n’ont pas voulu les libérer une fois partis à la retraite», dit le colonel Diop, pour expliquer que la Cour suprême ait ordonné l’expulsion de ces occupants irréguliers des lieux occupés. Et la Comico, selon lui, a commis un huissier aux fins de leur notifier leur expulsion.
«A l’issue de cette notification d’expulsion, les habitants ont introduit un référé sur difficultés auprès du Tribunal de Grande Instance Hors classe de Dakar. Après deux séances au Tribunal en présence de leurs avocats, le juge des référés a décidé, par l’ordonnance N°274 du 28 août 2020, que la Comico peut continuer la procédure d’expulsion sans délai et sans nouveau référé. Au total, la Comico a été confirmée dans ses droits par une ordonnance de justice définitive», dira le chargé des relations publiques des armées avant d’avertir.
«La Dscos a été saisie et toutes les dispositions seront prises pour la poursuite des programmes d’habitat au profit des adhérents de la coopérative, qui sont constitués de militaires de l’armée, de la Gendarmerie nationale et de la Brigade nationale des sapeurs-pompiers et de membres des corps paramilitaires (police, Douane etc.)».
Aux dernières nouvelles, l’armée et la gendarmerie ont procédé dans la soirée à plusieurs interpellations de protestataires qui ont été embarqués dans des camions pour des destinations pour le moment inconnues. Il s’agit des nommés Papa Laye Wade, Benoit Sagna, Maïmouna Badji, Ernest Clément Ndecky, Ibrahima Sow, Fodé Mballo, Abdoulaye Mballo, Melo, Alfa, Mamoudou Diallo, Amadou, Fallou, Boubacar, Ameth, Hubert Ndecky, Moustapha Sow… Tout ce monde a été arrêté et se trouverait entre les mains des gendarmes. L’activiste Guy Marius Sagna, qui suit à la minute l’évolution de cette affaire, dit exiger au nom de tous ses camarades de Frapp/France Dégage leur libération et le respect du droit au logement des résidents de Terme Sud.
Des informations qui ne sont pas encore confirmées font état que l’électricité serait coupée dans les maisons pour pousser les familles qui restent à partir d’elles-mêmes.
MM
LES ECHOS

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