Les députés étaient en plénière mardi dernier pour examiner le projet de loi de finances rectificative de l’année 2024. Le ministre des Finances et du Budget, chargé de défendre le dit projet de loi, a été interpellé sur beaucoup de points, notamment les conséquences de la non-sincérité du budget 2024 et tout ce qui tourne autour de l’indemnisation des victimes des violences politiques. Le parlement a finalement validé le projet de loi de finances rectificative de 2024 par 137 voix et 14 abstentions.
A presque une semaine de la fin de l’année, les députés ont validé la loi de finances rectificative pour l’année 2024, qui corrige les manquements du budget de l’année 2024. La quasi-totalité des députés de la majorité ont axé leurs interventions sur l’insincérité dudit budget, ce qui nous vaut la situation socio-économique tendue que nous vivons actuellement. Cheikh Thioro Mbacké, après avoir salué l’enveloppe de 5 milliards dégagée par l’Etat pour indemniser les victimes des manifestations, souhaiterait qu’Imam Alioune Ndao soit aussi indemnisée. «Le régime de Macky Sall a causé beaucoup de tort à Imam Alioune Ndao. J’estime que tout comme les victimes des malheureux évènements qui ont émaillé notre pays, l’Etat doit indemniser sa famille», dit-il. Seynabou Yacine Samb propose aux députés de donner chacun 100.000, ce qui fera plus de 16 millions, à remettre à la famille de feu Imam Alioune Ndao.
Alioune Ndao : «sur quelle base le montant pour l’indemnisation des victimes a été réajusté de 8 à 5 milliards ?»
Alioune Ndao se demande lui sur quelle base le ministère de l’Intérieur a réajusté le montant pour l’indemnisation des victimes, qui passe de 8 milliards à 5 milliards. Il invite aussi le ministre des Finances à identifier les bénéficiaires. «Il y a ceux qui ont été tués, ceux qui ont été blessés par balles, ceux qui ont été emprisonnés injustement durant une longue période avant d’être libérés sans jugement», déclare l’ancien procureur, qui indique que le collectif des victimes se sent abandonné par l’Etat. « Je connais leur état d’âme parce que mon propre fils a été empoisonné».
Mamadou Lamine Diaïté, lui, interroge : «j’ai vu dans les lignes, au niveau des autorisations d’exécution et des crédits de paiements, des écarts très importants pour la Présidence et pratiquement près de 2 milliards pour la Primature. J’aimerai savoir si le Palais et la Primature ont été vidés de leurs fonds avant l’arrivée du Président Diomaye ?».
Thierno A. Sall : «pendant que les recettes baisse, les dépenses augmentent, c’est paradoxal»
Thierno Alassane Sall, lui, a noté des situations assez curieuses. «Pendant que les recettes baissent de manière importante par rapport à la loi de finances initiale, les dépenses augmentent. Ce qui est totalement paradoxal parce que vous creusez le déficit de plus de 1500 milliards», lance Thierno Alassane Sall, qui souligne que ce déficit aurait dû être tourné dans l’amélioration de l’avenir, or «nous constatons un déficit qui sert essentiellement à subventionner de la consommation et pendant ce temps, vous avez fait le choix de ne pas rationaliser les agences».
Cheikh Tidiane Youm, quant à lui, relève une énorme différence entre les ressources internes et extérieures qui est chiffrée à 113 milliards contre 9 pour les ressources internes. «Cela peut traduire une faiblesse de notre administration», déclare le député du Pur qui pense qu’il faut revoir les subventions généralisées afin qu’elles profitent plus aux ménages les plus démunis.
Pour ceux qui assimilent ce vote de la loi de finances rectificative à une reddition des comptes, Djimo Souaré demandera de se détromper, c’est juste un exercice normal. Par rapport à l’indemnisation des victimes des manifestations, M. Souaré se demande si une commission en charge de la question a été déjà mise en place, si ces dernières ont été déjà identifiées parce qu’on l’a inclus dans cette loi de finances rectificative alors qu’on est à quelques jours de la fin de l’année 2024. Et concernant la question de la dette, Djimo Souaré voudrait savoir s’il existe d’autres circuits d’endettement, est-ce que le régime du président Sall aurait trompé la vigilance de la Cour des comptes ou bien la Cour des comptes est complice de ces agissements ? « Il faut nous dire si vous pensez que le Sénégal recevait l’argent emprunté par avion et les rendait aussi par avion. Le Sénégal ne dispose-t-elle pas d’un compte de dépôt à la Banque centrale où elle aussi est complice ?», ironise le natif de Goudiry qui demande l’impact qu’a eu la fameuse conférence de presse sur les finances publiques. «Il y avait 200 milliards de dons budgétaires prévus en 2024, mais on s’est retrouvé avec rien dans cette rubrique. C’est à se demander si l’Etat du Sénégal a un problème avec ses partenaires financiers», fulmine-t-il.
Racky Diallo interpelle à son tour le ministre des Finances sur le scandale de l’Onas qui oppose Cheikh Dieng à Cheikh Tidiane Dièye. Sur un autre registre, cette dernière fait noter qu’il et bien beau de prôner le Jub Jubal Jubbanti, mais ce slogan ne peut prévaloir quand on affame la population.
Abdou Mbow : «ils sont sur le point d’acheter des véhicules pour les députés et les salaires vont aussi augmenter»
Abdou Mbow rappelle à ses collègues qui accusent l’ancien régime d’avoir établi un budget non sincère que Cheikh Diba était le directeur de la Programmation budgétaire et les collaborateurs qui l’accompagnent ont été là depuis des années à élaborer le budget de la République du Sénégal. «Nous avons voté des lois de finances initiales mais aussi des lois de règlement jusqu’en 2022. Celle de l’année 2023 a été validée et certifiée par la COUR des comptes, déposée à l’Assemblée nationale et même programmée pour une session extraordinaire, avant d’être retirée plus tard par le gouvernement (…) donc ne parlons plus de sincérité budgétaire, c’est derrière nous », explique Abdou Mbow, qui fait remarquer que tout comme les recettes de 2024, celles du budget de 2025 sont aussi surévaluées de 20%. Abdou Mbow d’alerter l’opinion public sur les «futurs gaspillages» au parlement. A l’en croire, les nouvelles autorités sont sur le point d’acheter des véhicules pour les députés. Il y aura aussi une augmentation de salaire aussi très prochainement, d’après M. Mbow. Guy Marius Sagna assure qu’ils n’ont aucune leçon à recevoir, surtout venant de voleurs de deniers publics. «Nous ne sommes plus à l’étape d’alerte, mais de constatation. Macky Sall et son régime ont ruiné le Sénégal», s’indigne Guy Marius. Pour lui, l’ancien pouvoir a laissé un message, une menace à tous les fonctionnaires quand il a décidé de renvoyer Ousmane Sonko, mais c’en est fini, cette situation de peur.
Tafsir Thioye : «c’est la première fois depuis 30 ans que nos comptes atteignent un tel niveau de dégradation»
Tafsir Thioye remarque lui que les comptes publics se sont fortement dégradés. «C’est la première fois depuis 30 ans que nos comptes atteignent un tel niveau de dégradation : le déficit qui était de 3,9% est passé à 11,6%. Nous avons aussi constaté la place préoccupante que la charge de la dette occupe dans nos dépenses, presque 900 milliards et le besoin de financement dépasse les 4500 milliards (…)», explique M. Thioye.
Aïssata Tall : «vous nous demandez de serrer la ceinture et vous augmentez vos dépenses de prestige et confort»
Aïssata Tall Sall relève des curiosités sur la loi de finances rectificative. «Si nous devons resserrer les recettes, nous devons en faire de même pour les dépenses. Vous nous demandez de serrer la ceinture et vous augmentez les dépenses de plus de 194 milliards et cela concerne les dépenses de fonctionnement qui font référence au prestige et le confort du gouvernement», explique-t-elle. Cette loi de finances est illégale, selon Aïssata Tall Sall, elle devait être présentée en cours d’exercice et nous sommes à 4 jours ouvrés de l’exercice.
Ayib Daffé ne comprend pas lui comment les «néo-opposants ont pu valider la loi de finances rectificative en commission et venir faire du théâtre en plénière». Pour Aïssata Tall, le président du groupe parlementaire Pastef explique ses «divagations» par ses absences en commission où le ministre des Finances a donné toutes les explications à ses préoccupations. «Cette loi de finances rectificative respecte intégralement l’article L47 de la loi organique relative aux lois de finances», assure M. Daffé.
Ndèye Khady D. FALL