ENJEUX DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES DU 17 NOVEMBRE 2024 : Un scrutin pour façonner l’avenir immédiat du Sénégal, un tournant décisif pour le Pastef et l’opposition




 
 
 
Les élections législatives du 17 novembre 2024 marquent une étape cruciale dans l’histoire politique du Sénégal. Après l’arrivée au pouvoir du Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) porté par Ousmane Sonko, ces élections détermineront la composition de l’Assemblée nationale et, par extension, l’avenir des réformes clés promises par le gouvernement. Par ailleurs, elles représentent une opportunité pour l’opposition, regroupée autour de grandes coalitions comme Takku-Wallu Sénégal, Jamm ak Njarin et Samm sa Kaddu, de renforcer leur influence sur le jeu politique. Il y a 41 listes libellées en respectant la parité homme-femme. Aucune femme n'est tête de liste.
 
 
 
Les candidats investis sur les 41 listes pour les élections législatives ont profité du dernier jour de campagne hier pour jeter leurs dernières forces dans la bataille. Le scrutin verra s’affronter notamment les deux anciens rivaux présidentiels Ousmane Sonko et Macky Sall. L’ex-président sénégalais qui a fait campagne depuis le Maroc, a pu compter sur ses équipes et colistiers pour mobiliser ses partisans à la veille des élections. Des élections législatives qui ont été annoncées après la dissolution du parlement sénégalais par le Président Bassirou Diomaye Faye. Ce dernier a enclenché le processus en déclarant que le parlement contrôlé par l’opposition l’empêchait d’agir et de mettre en place ses plans pour le gouvernement. Près de 7.4 millions d’électeurs inscrits, sur une population de 18 millions d’habitants, sont attendus dans les urnes.
 
 
Un match retour Macky Sall vs Ousmane Sonko
 
 
 
Macky Sall face à Ousmane Sonko. C’est l’affiche à laquelle beaucoup de Sénégalais se préparaient lors de la dernière présidentielle. Mais, au terme d’une crise politique sans précédent, le président sortant a finalement décidé de ne pas briguer un troisième mandat, et son principal opposant a dû laisser la tête d’affiche à Bassirou Diomaye Faye, qui a largement remporté l’élection. Huit mois plus tard, les législatives qui se tiennent ce dimanche 17 novembre ont donc tous les airs d’un « match retour » entre les deux hommes, chacun conduisant sa liste.
L’ex-président affirme avoir été « amené » à redescendre dans l’arène par « les circonstances de la vie politique sénégalaise ». Mais Macky Sall, qui a mené campagne depuis l’étranger, semble également être engagé dans une croisade personnelle contre son meilleur ennemi, tout en cherchant, selon nombre d’observateurs, à « se défendre » face au duo qui a pris les rênes du pays. Pour Macky Sall, « ces législatives constituent un enjeu d’immunité parlementaire. En se lançant à nouveau dans la bataille, il veut aussi freiner d’éventuelles poursuites », résumait un observateur de la vie politique, fin octobre, dans l’analyse des dessous du come-back de Macky Sall signé par Marième Soumaré et Hermann Boko.
Alors que pour l’actuel chef du gouvernement, il s’agit de reprendre la main. Pour Ousmane Sonko, en effet, l’objectif est clair : reprendre la main sur l’Assemblée nationale, en y faisant déferler une « vague Pastef » qui lui permettra d’appliquer la politique de « rupture » que le Premier ministre et le Président sénégalais promettent depuis leur arrivée au pouvoir. Ousmane Sonko, qui s’est montré particulièrement offensif dans cette campagne, multipliant notamment les attaques contre le prédécesseur de Bassirou Diomaye Faye, n’a en effet toujours pas prononcé son discours de politique générale devant le parlement sénégalais. Son pari ? Le livrer dès l’investiture de l’Assemblée qui sortira des urnes ce dimanche, et qu’il espère très largement acquise à sa cause.
 
 
Pour le Pastef, un test de légitimité et de gouvernance
 
 
 
Pour le Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) le scrutin de dimanche est un test de légitimité et de gouvernance. Pour Ousmane Sonko et Cie, ces élections sont un baromètre de la satisfaction populaire vis-à-vis de sa gouvernance.
Face à des défis majeurs tels que les réformes économiques, notamment la réduction des inégalités et l’optimisation des ressources pétrolières et gazières ; la justice sociale avec un engagement fort sur la lutte contre la corruption et la révision de la gouvernance publique ou encore la question des tensions politiques en visant à apaiser les divisions politiques nées de l’accession au pouvoir, le parti au pouvoir doit mobiliser sa base électorale tout en élargissant son soutien dans les zones rurales et urbaines, où les attentes sociales sont fortes. Une majorité parlementaire est cruciale pour mettre en œuvre son programme sans obstruction législative.
 
Pour l’opposition : une bataille pour le contrôle parlementaire
 
 
 
De son côté, l'opposition claironne qu'en huit mois Ousmane Sonko a beaucoup parlé et peu agi. Divisée en plusieurs coalitions, l’opposition se trouve à un carrefour stratégique. D’abord la coalition Takku-Wallu Sénégal dominée par l’Alliance pour la République (Apr) et le Parti démocratique sénégalais (Pds), mise sur l’expérience et le retour en grâce de figures politiques emblématiques pour séduire les électeurs nostalgiques des années Sall et Wade.
Il y a ensuite Jamm ak Njarin. Axée sur un discours de paix sociale et de justice économique, cette coalition amenée par Amadou Ba, candidat arrivé deuxième à la dernière élection présidentielle, incarne une alternative modérée et réformatrice. Plus radicale vis à vis du nouveau régime incarné par Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko, Samm sa Kaddu qui fédère des leaders émergents cherche à capter le vote des jeunes et des élites urbaines en quête d’un renouveau politique.
Pour ces coalitions, les législatives représentent une chance d’imposer une cohabitation qui pourrait freiner ou réorienter les politiques du Pastef. L’un des enjeux majeurs reste leur capacité à surmonter leurs divisions internes pour présenter un front uni face au parti au pouvoir.
 
 
Un scrutin sous haute tension politique et sociale
 
 
 
Ces élections se déroulent dans un contexte marqué par une forte polarisation politique, accentuée par les discours parfois virulents des différents camps ; par des attentes citoyennes élevées en matière de transparence électorale et de réponses aux problèmes socio-économiques mais également par une interrogation sur le rôle des jeunes et des femmes comme électorat décisif, notamment dans un pays où ces groupes représentent une grande partie de la population. La capacité de chaque camp à convaincre ces électeurs, notamment dans des régions stratégiques comme Dakar, Thiès, et Casamance, sera déterminante.
En tout état de cause, demain 17 novembre 2024 pourrait redessiner les contours de la politique sénégalaise. Si le Pastef aspire à consolider son pouvoir pour poursuivre son agenda, l’opposition, à travers ses diverses coalitions, voit cette élection comme une opportunité de rééquilibrer les forces et de freiner les ambitions du parti au pouvoir. Les résultats, au-delà de déterminer la majorité parlementaire, façonneront l’avenir immédiat du Sénégal.
 
 
 
 
 
Sidy Djimby NDAO
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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