EN TOUTE INTIMITE AVEC CHEIKHOU KOUYATE: de Khar-Yalla à West Ham parcours d'un leader-né

Chétif, timide, pieux et ambitieux ! Les qualificatifs ne manquent pas pour décrire le chouchou du quartier Khar-Yalla de Grand-Yoff. D’ailleurs, Cheikhou Kouyaté, capitaine de l’équipe nationale de football, a bien porté en bandoulière le nom de son quartier pour arriver à ses fins, c'est-à-dire devenir un footballeur professionnel par la grâce de Dieu. Son enfance, son cursus scolaire, ses débuts dans le milieu du foot… bref des anecdotes, il n’y a pas mieux placé dans sa famille que l’oncle paternel de Cheikhou Kouyaté pour en parler.




 
 
 
Oncle paternel de Cheikhou Kouyaté, Youssouf Kouyaté a été l’un des grands artisans de la réussite de l’actuel milieu de terrain des Lions du football. «Je m’appelle Youssouf Kouyaté, oncle de Cheikhou Kouyaté et petit-frère du père du footballeur. J’ai pratiquement éduqué Cheikhou Kouyaté, avec un de mes frères qui vit actuellement aux Usa. Pendant ce temps, son père était à l’étranger», narre  «le petit papa» de Cheikhou. Ce dernier de confier d’ailleurs qu’il est très à l’aise pour parler de l’enfance du pensionnaire de West Ham, puisque rien n’a changé chez le numéro 8 des Hammers. «Raconter l’enfance de Cheikhou Kouyaté, c’est très facile, parce qu’il n’a pas changé. En commençant par sa morphologie, il a toujours été chétif, mais aussi timide et pas du tout bavard. Seulement, quand il s’engage à faire quelque chose, il le fait  sans demi-mesure. Si c’était les études, il y allait à fond et itou pour le football».
Dès le bas-âge, celui qui sans doute portera le brassard de capitaine au Mondial affichait déjà l’esprit des grands compétiteurs : il détestait perdre. «Enfant, il n’aimait pas perdre. Quelle que soit la nature du match ou de la compétition, Cheikhou Kouyaté versait de chaudes larmes s’il était vaincu et cette hargne de compétiteur l’a suivie à l’école de football. Tout était compétition chez lui. Il ne voulait jamais rester en rade ou être le dernier en toute chose. Par exemple, au marché, il jonglait des chaussettes et il était le meilleur dans ce domaine. D’où son surnom de Yadel», dit-il.
 
Entre le but et la barre transversale, Cheikhou avait fait son choix
 
Pour revenir sur son surnom de Yadel, Youssouf Kouyaté rappelle cette relation particulière que Cheikhou entretenait avec ses amis Souleymane Sané et Am Sané, qui l’ont estampillé de ce sobriquet. «A l’école de football, Souleymane Sané jouait en pointe, mais quand il touchait la transversale, il était content. Quand ses amis se plaignaient de l’occasion qu’il a ratée, il leur disait que toucher la barre transversale était mieux que marquer un but, parce qu’un but peut être oublié, alors qu’une balle sur la transversale, on ne peut l’oublier», raconte-t-il. A la demeure familiale, c’était plus Papiss que Cheikhou, mais c’était «Papissi» pour sa grand-mère, Bambara. «On l’appelait aussi Papiss, parce que c’était l’homonyme de notre père mais ma mère ne pouvant pas prononcer Papiss disait Papissi, à l’instar des Bambaras ; et souvent les jeunes de son âge le taquinaient sur la façon dont l’appelait sa grand-mère».
 
A ses débuts Cheikhou dégageait une passion presque innée
 
Comme d’habitude, un jeune garçon embrasse par amour le métier de son père. En clair, Cheikhou Kouyaté a suivi les traces de son géniteur. «C’est un jeune qui a toujours eu la passion du foot. D’ailleurs son père jouait à l’Asc Jubbo comme axe central. C’était un excellent libéro et il était le capitaine de l’équipe. Un de nos amis qui s’appelle Ibnou Ndaw alias Muller, qui jouait en même temps que le père de Cheikhou Kouyaté, l’a pris avec lui en 1992. Par la suite, Assane Ndao, qui habitait dans la même maison que Cheikhou, a créé une école de football. Aussi bien Assane Ndaw que Ibnou Ndaw, chacun voulait l’avoir dans son équipe. Assane Ndao disait que s’il a besoin de Cheikhou Kouyaté, personne ne peut aller à l’encontre de sa décision. C’est là que je suis allé voir Muller, pour lui dire de laisser Cheikhou suivre Assane Ndao, comme c’est un frère».
 
Assidu à l’école, fort sur le terrain, Cheikhou a forcé le destin
 
«Il a commencé son cycle primaire à l’école Derklé 3 et je peux vous garantir, en tant qu’enseignant, que Cheikhou n’était pas nul, au contraire, voilà un élève très assidu. Il ne sortait jamais des dix ou 15 premiers. J’allais souvent voir ses enseignants pour m’enquérir de son évolution. Il aimait les études. Après l’obtention de son entrée en sixième, il est parti au collège Ousmane Socé Diop, où il a obtenu son Bfem. A Blaise Diagne, il a fait la seconde et est parti en Grèce», soutient Youssouf Kouyaté. Comme tous les jeunes de son âge, Cheikhou a toujours eu un faible pour le ballon rond. «Seulement, on avait remarqué qu’il avait mis la priorité sur le football et en tant qu’enseignant, je ne pouvais pas laisser passer cela. Avec un de mes frères qu’on appelle Conan, on faisait tout pour que les enfants ne manquent de rien et nous mettions en avant l’éducation d’abord, avant le football. Mais en passionné, le football a finalement gâché ses études. Il disait que l’école demande beaucoup de temps et c’est plus rapide de s’en sortir avec le football», soutient l’oncle de Cheikhou.
 
Son premier contrat pro et sa première apparition méconnue du public sénégalais
 
Comme toujours, l’étoile qui brillera dans une génération n’est jamais facile à déceler. Personne ne savait que ce jeune qui était rentré en seconde période, lors d’un match en équipe nationale, au stade Iba Mar Diop, allait devenir le capitaine de l’équipe nationale du Sénégal, si ce n’est Cheikhou lui-même qui y croyait dur comme fer et son oncle. «Les gens ne savent pas que sa première convocation en équipe nationale espoir fut au stade Iba Mar Diop. Il était remplaçant et est rentré en seconde période. D’ailleurs, il avait raté un face-à-face avec le gardien adverse. Et c’est ce jour-là, dans la nuit, qu’il est parti en Grèce», dit-il. Avant de revenir sur  le premier contrat paraphé entre Cheikhou Kouyaté et le club belge d’Anderlecht. «Quand on s’est parlé au téléphone, son premier mot fut : Alhamdoulilah. Il a rendu grâce à Dieu et je lui ai dit que Dieu venait de lui donner une lourde mission, qui est d’aider ceux qui fondent espoir en lui. Donc je lui ai conseillé d’être humble et aussi de savoir comment dépenser son argent puisqu’il arrivera un jour où il rendra compte à Dieu».
 
«Cheikhou a récolté ce que son père était parti chercher en Europe durant 17 ans»
 
L’oncle de Cheikhou est d’autant plus fier de son protégé que ce dernier a obtenu ce que son père était parti chercher à l’étranger. «Du moment que son père était parti tenter sa chance à l’étranger, durant 17 ans, nous nous sommes engagés à faire de sorte que ses fils ne manquent de rien. Je ne sais si c’est le fruit du hasard, mais tout ce que son père était parti chercher en Europe, c’est Cheikhou Kouyaté qui l’a finalement eu», ajoute-t-il.
 
L’histoire insolite de ses premières godasses
 
Quand vint le moment où Youssouf Kouyaté raconte comment Cheikhou Kouyaté a obtenu ses premières godasses, il rit sous cape. «L’histoire de sa première paire de godasses. C’est Vieux Diola, qui jouait au Dial Diop, accompagné d’un jeune joueur de Walidan et qui s’appelle Jonas, est venu voir Cheikhou pour lui vendre des chaussures. Cheikhou m’a appelé pour que je lui achète les godasses. C’est vrai qu’en ce moment, j’enseignais dans le privé et les temps étaient durs. Je lui ai dit que j’allais acheter les chaussures, mais dans deux jours. Sur le coup, il a commencé à pleurer. Là j’ai dit à son ami que puisque ces chaussures coûtent 20.000 francs, je vais lui faire une avance de 10.000 francs et il garde l’une des chaussures jusqu'à ce que je lui donne le reste de l’argent», raconte-t-il. Cheikhou Kouyaté voulait les godasses même s’il n’aimait pas la marque. «C’étaient des chaussures de marque Bushkhari. Il me taquine souvent en m’appelant You Bushkhari. Il disait qu’il n’allait pas porter ces chaussures, parce que la marque était inconnue; par la suite, je lui ai acheté des Puma. Souvent, il parle de moi dans ses interviews, en disant que je lui ai acheté ses premières godasses, mais il a beaucoup fait pour moi», raconte l’oncle.
 
Cheikhou, le «Ñieexu daxxaar», le «Yeet»….
 
Côté gastronomie, Cheikhou avait des préférences particulières. «Quand sa cousine préparait du riz au poisson, elle y mettait souvent de la sauce au tamarin (Ñieexu daxxaar). Il aimait tellement cette sauce qu’il se battait avec son petit-frère. Un jour, sa cousine n’avait pas préparé cette sauce et quand Cheikhou s’en est rendu compte, il a pété les plombs. Il a fallu que ma mère, paix à son âme, le réprimande pour le ramener à la raison», affirme Youssouf. Et de poursuivre : «autre aliment qu’il aimait aussi, c’est le cymbium  (Yeet). Lui, ses frères et cousins le croquaient à tour de rôle. Seulement, quand venait son tour, il mettait tout dans sa bouche et ses frères n’en voulant plus, il prenait tout pour lui».
 
Son vœu d’emmener sa grand-mère à La Mecque, l’Islam…
 
Youssouf Kouyaté se souvient d’un jeune très sensible aux efforts fournis par ses parents. «Ma mère mettait souvent de côté un bol pour lui et ses amis, afin qu’ils se restaurent une fois de retour du terrain de foot. Ce qui m’a le plus marqué, c’est qu’il est venu me voir et m’a parlé des repas que préparait ma mère pour ses amis, chaque jour, alors que chacun d’eux habite dans une maison. Donc, il m’a dit qu’il faut qu’il se batte pour réussir dans le foot et emmener ma mère à La Mecque. Il disait qu’il ne pouvait mourir en paix s’il ne réalisait pas ce vœu. De là, j’ai su que ce gosse avait de l’ambition ; même si la réussite dépend de Dieu, mais l’envie de réussir l’habitait déjà», explique-t-il. Pour ce qui est de sa religion, Cheikhou ne badine pas avec. «Notre père nous a éduqués dans l’Islam. Nous avions l’obligation d’apprendre le Coran. J’avais ouvert une école coranique et il était parmi les élèves. D’ailleurs, il ne rate pas les heures de prière. A chaque fois qu’il vient au Sénégal, même s’il y a beaucoup d’invités dans la maison, il fait tout pour prier à l’heure», témoigne son oncle.
 
Cheikhou, sa copine et le nom du parfum…
 
Etant jeune, Cheikhou avait une copine qu’il cachait à son oncle. «Cheikhou avait un copine qui s’appelle Maï et il me le cachait, parce qu’en tant que jeune voulant faire carrière dans le foot, on ne pouvait se permettre certaines choses. Un jour, sa copine est venue lui rendre visite, Cheikhou est allé voir sa cousine pour avoir un peu de parfum. Sa cousine lui a donné un parfum qui s’appelle Farala avec inscrit sur le flacon le numéro 33. Quand sa copine lui a demandé le nom du parfum, Cheikh s’est juste rappelé du numéro et a répondu 33», dit-il.
 
Le capitanat, son véritable poste…
 
«En bas-âge, il était déjà un meneur», soutient Youssouf Kouyaté. «C’est un leader-né. Il voulait toujours être capitaine. Le capitanat ne nous surprend pas, parce qu’il s’attendait à ça et moi aussi. Mais, il est conscient de la responsabilité que cela exige», ajoute l’oncle. D’ailleurs, il soutient que «Cheikhou n’a toujours pas joué à son véritable poste ; c’est un 10 de métier. Il était aussi très habile dans les coups francs. En 2004, lors d’un finale Liberté 4 contre Yoon wi, Cheikhou avait tellement étalé son talent que les supporters de Liberté 4 l’applaudissaient. Alors que, durant ce match, il y avait une rivalité énorme entre lui et le meneur de jeu de Liberté 4. A la fin du match, vaincu, il pleurait, mais le président de Liberté 4 est descendu sur le terrain et lui a donné de l’argent pour l’encourager, mais il a jeté l’argent parce qu’il voulait la victoire», dit-il. Pour finir, son oncle confie que Cheikhou avait deux idoles dans le football à savoir Henri Camara et Zidane. «Il aimait beaucoup Henri Camara, en 2002 et il se faisait même appelé Henri Camara. Aussi, des amis à moi disaient que c’est le futur Zidane».
 
 

Youssouf Kouyaté oncle de cheikhou kouyate
Youssouf Kouyaté

cheikhou kouyate à yeggo




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