Quinze jours après la tenue de l’élection présidentielle, les responsables du Pds semblent sortir de leur hibernation politique. Le chargé des élections du Parti démocratique sénégalais (Pds) aborde dans cet entretien les différentes questions liées à l’organisation de cette élection, à l’actualité politique, mais aussi à l’avenir de la formation libérale.
Après le boycott de la présidentielle du 24 février dernier décidé par le secrétaire général du Pds, le maire de Djeddah Thiaroye Kao aborde la question de l’élection. Pour Dr Cheikh Dieng, Me Abdoulaye Wade a malheureusement eu raison sur tout le monde. «Me Abdoulaye Wade a été très clair depuis 2017, et personne n’a voulu l’écouter. Il a eu raison sur toute la ligne. Le Président Macky Sall avait verrouillé le système, de telle sorte que les résultats de cette élection lui seraient favorables dans tous les cas ; et ça, Me Wade l’avait compris très tôt», note le chargé des élections du Pds, avant de souligner : «il a toujours été logique et cohérent dans sa démarche. Wade avait raison de boycotter, parce qu’il ne servait à rien d’aller à une élection déjà gagnée par le président sortant, l’opposition n’avait aucune chance de gagner cette élection», dit-il.
«La victoire ‘’éclatante’’ de Macky Sall a un goût d’inachevé»
Selon Dr Cheikh Dieng, on a assisté à une parodie d’élection, avec des résultats contestés, avant même l’organisation du scrutin, en raison de l’élimination des candidats les plus compétitifs au moyen du bras armé de la justice ou d’une procédure nébuleuse de sélection des candidats à travers une procédure fort controversée de parrainage décriée par l’ensemble de la classe politique. Ce qui a donc installé le pays dans un climat de torpeur grosse de tous les dangers. Pour lui, la victoire «éclatante» de Macky Sall a un goût d’inachevé. «Le Président nouvellement réélu avec une ‘’majorité confortable‘’ de 58% a certainement compris l’urgence de pacifier le climat social en lançant l’idée d’un dialogue national dès les heures qui ont suivi la proclamation officielle des résultats par le Conseil constitutionnel. Un Conseil constitutionnel fortement discrédité par l’opposition qui, malgré le rejet des résultats provisoires, s’est abstenu de le saisir de tout recours, comme pour punir et humilier cette institution au motif de sa totale soumission au chef de l’Etat», affirme l’édile de Djeddah Thiaroye Kao.
«Si la dissolution de l’Assemblée émanait d’un membre de l’Apr, la supercherie aurait été découverte, ils ont donc envoyé la nouvelle alliée transhumante»
En ce qui concerne la proposition de Me Aïssata Tall Sall pour la dissolution de l’Assemblée nationale, Dr Cheikh Dieng est catégorique : c’est un ballon de sonde envoyé par la majorité. «La majorité présidentielle entend tirer un profit maximum du contexte de victoire pour assurer un quinquennat paisible et c’est la nouvelle alliée transhumante qui est mandatée pour lancer le ballon de sonde pour une dissolution anticipée de l’Assemblée nationale, qui permettrait de renouveler la majorité à l’Assemblée nationale et éviter toute probabilité de cohabitation dans 2 ans. Une telle proposition émanant des responsables de l’Apr serait en effet louche et la supercherie évidente serait vite éventrée», fait-il remarquer, avant d’expliquer : «Aïssata est donc envoyée au charbon pour vendre la marchandise pourrie ; piège dans lequel certains opposants sont tombés tête baissée, pensant prendre bien vite leur revanche sur l’élection présidentielle. Quelle naïveté ! Ils oublient que les mêmes causes produiront les mêmes effets», dit-il.
«Oui, pour un dialogue pour une réforme en profondeur de notre système électorale, judiciaire»
Pour le maire libéral, les enjeux d’une refondation de notre démocratie et de notre Etat de droit dépassent les intérêts de l’un et l’autre.«Le vague appel au dialogue dont les contours seront définis par le chef de l’Etat, au lendemain de sa prestation de serment, ne peut avoir pour finalités ni de trouver des compromis pour modifier le calendrier républicain, ni de colmater un processus électoral fondamentalement corrompu, ni d’adoucir les modalités du parrainage comme lui-même le suggère, encore moins ‘’d’amnistier’’ Karim Wade ou de ‘’gracier’’ Khalifa Sall, tous deux sacrifiés par une justice aux ordres sur l’autel d’un second mandat aux forceps. Ismaïla Madior Fall mérite bien le sobriquet ‘’tailleur de la constitution’’», a fait remarquer Cheikh Dieng.
«Ismaïla Madior Fall mérite bien le sobriquet de ‘’tailleur de la constitution’’»
Abordant la sortie du ministre de la Justice par rapport à un éventuel 3e mandat du Président Macky Sall, Dr Cheikh Dieng brûle Ismaïla Madior Fall. «Il était un universitaire respecté, mais maintenant, nous sommes habitués à ses manipulations des concepts juridictionnels à sa guise. Il ne cesse de surprendre son monde avec ses ‘’en principe’’. Maintenant, quand il parle, nous ne le percevons plus comme un spécialiste en droit, mais un simple partisan politique», clame le maire de Djeddah Thiaroye Kao.
Ndèye Khady D. FALL