DES MILLIARDS PERDUS DURANT LES MANIFESTATIONS : Le secteur privé évalue les dégâts




 
 
 
Le Conseil national du patronat (Cnp), par la voix de son président, a déploré la perte de centaines de milliards de francs Cfa dans de nombreux secteurs lors des manifestations qui ont éclaté après la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko. Face à la presse, différents secteurs ont étalé leurs pertes et frustrations dix jours après les manifestations.
 
Le Bureau exécutif du Conseil national du patronat (Cnp) s’est réuni hier, au regard de la gravité des tensions socio-politiques, pour parler de l’ampleur des préjudices subis par les entreprises qui composent le Cnp. Baïdy Agne, qui présidait la réunion, s’est dit préoccupé et éprouvé par les évènements particulièrement tragiques et violents. De la destruction des biens privés et d’investissements des entreprises, la perturbation ou l’arrêt d’activité économique et la mise au chômage technique et le licenciement des travailleurs, les conséquences après les manifestations suite à la condamnation de Ousmane Sonko sont énormes. «D’abord, les entreprises du secteur bancaire, du pétrole et du gaz, de la grande distribution, des télécommunications et du numérique et aussi des travaux publics ont été brûlées, pillées et vandalisées. Ensuite un arrêt d’activités économiques quasiment pendant trois jours et enfin des centaines de milliards perdus en investissement et en chiffre d’affaires», liste-t-il.
Avant de poursuivre : «il n’est pas acceptable et compréhensible que l’entreprise continue d’être ciblée, saccagée, pillée, brûlée et sacrifiée en raison de différends et de divergences politiques. Aujourd’hui, inquiétude et incertitude nous animent tous. Alors si cette violence continue, nous risquons de subir une crise beaucoup plus profonde que celle du Covid-19», a tranché Baïdy Agne.
 
Bocar Sy : «plus de 3 milliards pour la remise en état des 31 agences saccagées»
 
Président de l’Association professionnelle des banques et des établissements financiers, Bocar Sy a présenté un bilan sombre. «Nous avons été 14 banques à être impactées à travers 31 de nos agences essentiellement dans la banlieue et dans une moindre mesure dans les régions. Le service bancaire qui est bloqué et c’est le service public de banque qui est perturbé. Nous avons essayé de rapatrier toutes nos opérations possibles à nos sièges respectifs, ce qui est assez gênant, car c’était la fin du mois et surtout dans cette période des préparatifs de la Tabaski. Nous sommes en train d’évaluer et si nous estimons le coût de la remise en l’état d’une agence, c’est 150 millions par agence sur 31 agences au bas mots 3 milliards et quelques. Pour le moment, nous avons du mal à approvisionner les agences de l’intérieur du pays».
 
Mouhamed Chaabouni : «3 milliards de dégâts en 2023 et 3,5 milliards en 2021»
 
Directeur de Vivo Energy et président du groupement des pétroliers professionnels, Mouhamed Chaabouni a donné des chiffres qui font froid au dos. «Ce n’est pas la première que nous vivons cette situation. Nous l’avons déjà vécue en mars 2021. Nous avons connu des dégâts sur une centaine de stations-service. Par exemple Vivo Energy a perdu 17 stations, Total 27 stations, Ola 6 stations, Elton 5 stations… Zenith qui vient de démarrer, une petite société, a vu ses deux et uniques stations détruites. C’est un Sénégalais qui n’a plus les ressources pour reconstituer les fonds afin de démarrer une nouvelle fois. Donc toutes les sociétés ont été touchées. Nous sommes en train d’évaluer les dégâts et déjà ça va dépasser les 3 milliards de francs. Déjà en mars 2021 les dégâts étaient évalués à 3,5 milliards de F Cfa et nous n’avons rien reçu comme indemnisations».
 
Momar Seyni Lo, Auchan : «7 magasins saccagés…»
 
Auchan fait partie des plus grandes cibles des manifestants. Momar Seyni Lô révèle l’étendue des dégâts. «Nous concernant, on a eu 7 magasins attaqués, pillés et vandalisés et en termes d’impact, cela fait beaucoup. C’est 300 collaborateurs qui vont partir en chômage technique et en termes de dégâts, nous sommes en train d’évaluer les coûts. En 2021, c’était 19 magasins qui avaient été attaqués, c’est-à-dire plus de 15 milliards. C’est nous les Sénégalais qui y travaillons qui allons subir cet impact.»
 
Karim Mbengue : «Sonatel estime les pertes à 677 millions avant la finalisation de l’évaluation»
 
Représentant de la Sonatel , Karim Mbengue a donné les chiffres non exhaustifs. «Comme beaucoup de secteurs, celui de l’économie numérique a été impacté. Deux aspects de l’évaluation ont été faits : les saccages et la coupure de l’internet. Nous sommes en train de faire l’évaluation des dégâts pour la coupure de l’internet, mais nous avons pu faire l’évaluation des dégâts matériels et nous l’estimons autour de 677 millions de francs Cfa. Cela concerne l’agence Limamoulaye aux Parcelles Assainies. C’est une agence qui nous a couté 500 millions de F Cfa. 300 kiosques de nos partenaires distributeurs ont été détruits pour un montant d’environ 154 millions de francs Cfa. Donc 309 agents sont en chômage technique… Il y a aussi les conséquences extrêmement néfastes d’une suspension de l’internet mobile».
 
Coura Sène, Wave : «une baisse de 40% de nos activités...»
 
Pourtant opérateur de transfert préféré des Sénégalais, Wave a été fortement impactée selon sa Directrice Coura Sène. «Sur les coupures directes de l’internet, ça a été vraiment problématique. Nous proposons des services basés sur l’internet donc basé sur le téléphone. Nous avons constaté une baisse de 40% d’utilisation de nos services aussi bien le dimanche que le lundi. Au-delà des effets économiques importants sur Wave et sur l’ensemble de l’environnement autour de Wave, la baisse significative se traduit aussi par des effets sociaux très graves».
 
Samba THIAM
 
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