Dans cette 2e partie, le SG de la Cnts lance un appel à la paix et à la stabilité par le dialogue permanent entre pouvoir et opposition. Mody Guiro évoque également la situation des renouvellements entre patronat et syndicats à ladirection de l’Ipres et de la Css, dont la fusion agitée n’est pas encore à l’ordre du jour. A l’en croire, les élections de représentativité syndicale auront bien lieu cette année et que l’Etat du Sénégal doit impérativement aller vers les pays hôtes de travailleurs sénégalais pour des accords de coopération en matière de sécurité sociale.
Les Echos : La situation politique nationale est très clivée aujourd’hui entre opposition et pouvoir. Quelle est la position de la Cnts dans les débats qui agitent le landernau ?
Mody Guiro : La Cnts, c’est l’unité des contraires. Nous avons tous les partis politiques dans la Cnts. Nous n’avons de problème avec aucun parti. Mais, la Cnts est une institution, qui travaille avec toutes les institutions de la République. Tous ceux qui viennent ici, nous les recevrons cordialement et discuterons avec eux de tous les problèmes d’intérêt national. Nous laissons la liberté à chaque membre d’adhérer ou de militer au parti de son choix.
Quel serait le message de la Cnts en direction des Sénégalais dans la perspective de l’échéance électorale de 2024 ?
Notre attente est qu’il y ait une stabilité. Nous sommes un pays de dialogue. Il faut donc que le dialogue s’instaure. Il faut créer les conditions d’un dialogue sincère entre l’opposition et le pouvoir, c’est notre souci. Parce que dans chaque pays, il faut une opposition face au pouvoir et qu’un dialogue permanent s’instaure entre les deux parties. Nous pensons aussi qu’il faut renforcer le dialogue social, entre les organisations d’employeurs, de travailleurs et l’Etat. Il faut également que le secteur privé national puisse jouer sa partition dans le développement du pays. Comme le chef de l’Etat a dit que 2023 sera une année sociale, nous espérons que les retombées du pétrole et du gaz puissent bénéficier aux populations et aux travailleurs que nous sommes. Nous attendons que les négociations puissent démarrer le plus rapidement possible pour voir comment améliorer le pouvoir d’achat des travailleurs en général, en particulier ceux du secteur privé qui attendent des augmentations de salaires.
Qu’en est-il aujourd’hui des élections de représentativité ? A quand les renouvellements ?
Normalement, on devrait pouvoir les faire cette année 2023, même qu’elles devaient se tenir en 2022. Mais cette année, après les élections des organisations des enseignants, je pense qu’on va pouvoir les organiser.
Les secrétaires généraux des centrales syndicales sont considérés comme des mammouths, des dinosaures qui ne bougent pas, excepté à la Csa. Est-ce qu’à la Cnts, Mody Guiro pense à organiser son départ ?
Il faut d’abord dire que nul n’est éternel et nous sommes à la tête de la Cnts grâce à la confiance des travailleurs. Il faut aussi dire que nous n’avons pas de limitation de mandats, contrairement à la Csa que vous citez en exemple. Mais les organisations syndicales doivent avoir un comportement démocratique et à échéance, remettre en compétition les postes de responsabilité. Aller en congrès, redonner la voix aux travailleurs à qui revient la décision de maintenir ou de révoquer le dirigeant. A ce niveau, nous n’avons pas de problème à la Cnts. Nous avons toujours renouvelé à date échue et si les travailleurs décident de ne pas nous reconduire, nous l’accepterons. Maintenant, les changements interviendront le moment venu, quand ils en décideront. En tout cas, nous restons des démocrates, nous voulons avoir une organisation syndicale démocratique et nous voulons également maintenir toujours le leadership de la Cnts. A ce niveau, je pense que nous sommes très conscients de notre responsabilité et le moment venu, nous ferons ce qui est nécessaire.
Parlons des institutions sociales. A l’Ipres, par exemple, ne se pose-t-il pas un problème d’alternance directionnelle entre patronat et travailleurs ?
Non. Il n’y a pas un problème d’alternance entre les patrons et les syndicats. Aussi bien à l’Ipres qu’à la Caisse de sécurité sociale, on parle de renouvellement des instances. Il n’y a pas de problème entre syndicats et patronat, c’est plutôt un problème de calendrier de renouvellement. Ces institutions sont restées presque 8 ans sans être renouvelées, aussi bien l’Ipres que la Css. A la Caisse de sécurité sociale, c’est Mademba Sock qui est là-bas comme Pca et à l’Ipres c’est Racine Sy qui y est. Il faut simplement renouveler.
Et comment se passent ces renouvellements ?
Ce sont les organisations les plus représentatives qui décident. Vous avez les travailleurs, vous avez les patrons. Si ce sont les travailleurs qui sont là, les patrons viendront 2 ans après.
Alors qu’est-ce qui bloque ?
Je ne sais pas... Il n’y a pas de conflit sur cette question. Ce qu’il faut, c’est aller vers des renouvellements.
L’Etat parle beaucoup de fusion des deux institutions Ipres et Css. Qu’en est-il exactement ?
Ce sont les employeurs qui en parlent. C’est quelque chose qui est avancé mais qui n’est pas encore acté. Je crois que nous sommes dans une formule de coopération entre les deux institutions, surtout en ce qui concerne le système d’information, qu’il y ait une seule déclaration de la part des employeurs. Mais la fusion n’est pas encore à l’ordre du jour.
Quelles solutions aux difficultés des travailleurs sénégalais expatriés sur la question de la couverture par la sécurité sociale ?
Il faut d’abord dire que chaque pays a sa législation spécifique en matière de sécurité sociale. Pour les travailleurs sénégalais à l’étranger, il faut que l’Etat du Sénégal puisse signer une convention en matière de sécurité sociale avec le pays hôte. Si l’Etat du Sénégal ne signe pas un accord avec l’Italie, par exemple, il sera extrêmement difficile que le retraité sénégalais dans ce pays puisse toucher sa pension au Sénégal. Il va falloir qu’il retourne en Italie pour toucher sa pension. Ce qui sera différent dans un autre pays avec qui le Sénégal a signé un accord de coopération en matière de sécurité sociale. Pour d’autres pays où le Sénégal n’a pas signé d’accord, la Hollande par exemple, les travailleurs sénégalais retraités dans ces pays, s’ils veulent toucher leurs pensions en venant ici, ne toucheront en fait que la moitié alors qu’ils ont besoin de la totalité. D’où la nécessité pour notre pays de visiter tous ces pays où nous avons des compatriotes et voir dans quelles conditions signer ces accords de coopération en matière de sécurité sociale. Voilà un peu la question de fond qui se résume à un problème diplomatique d’Etat à Etat. Nous encourageons donc sur ce plan l’Etat du Sénégal à vraiment développer cette coopération et aller négocier et signer des accords en matière de sécurité sociale.