CRIMINALISATION DE LA LOI SUR L’HOMOSEXUALITÉ : Le Conseil constitutionnel rejette le recours de Mamadou Lamine Diallo et Cie, valide la décision de l’Assemblée nationale et donne ses motivations



 
 
Clap de fin sur la fameuse affaire de la loi criminalisant l’homosexualité. Le Conseil constitutionnel vient de clore les débats dans ce dossier en rendant sa décision concernant le recours des députés Mamadou Lamine Diallo, Alioune Souaré et Cheikh Abiboulaye Dièye. Se prononçant sur ce dossier, le conseil a rejeté tout bonnement le recours des parlementaires. Le journal «Les Echos» revient sur les motivations des 7 sages.
 
A quel saint Cheikh Abiboulaye Dièye, Mamadou Lamine Diallo et Alioune Souaré vont maintenant se vouer pour leur combat pour la criminalisation de l’homosexualité ? La pertinence de la question porte sur le fait que le Conseil constitutionnel, qui a été saisi d’un recours après une décision de rejet de la proposition de loi au niveau de l’Assemblée nationale, ne leur a pas donné gain de cause. Dans leur recours, les députés de l’opposition soutenaient avoir d’abord déposé une requête à l’Assemblée nationale, portant sur une proposition de loi «visant à modifier l’alinéa 3 de l’article 319 de la loi N°65-60 du 21 juillet 1965 portant code pénal modifié, criminalisant les actes contre-nature suivants : Homosexualité, Lesbianisme, Bisexualité, Transsexualité, Nécrophilie et Zoophilie». Selon les parlementaires, l’Assemblée nationale a déclaré leur proposition de loi irrecevable. Mamadou Lamine Diallo et Cie ont  ainsi porté des griefs à l’Assemblée nationale, notamment la «violation de l’article 60 du Règlement intérieur» en son article premier, en ce que Moustapha Niasse n’a ni donné connaissance de la proposition de loi ni informé par écrit les auteurs de ladite proposition de loi. Il y a également, selon eux, que le «bureau s’est prononcé sur l’opportunité et la pertinence de la proposition de loi alors qu’à lesen croire, le Règlement intérieur ne lui confère que le pouvoir limitatif de vérifier la recevabilité financière des propositions de loi et amendements formulés par les députés».
Par conséquent, les requérants demandent aux 7 sages de se déclarer compétents et de dire que la décision de l’Assemblée nationale est «contraire aux dispositions de l’article 60 du Règlement intérieur en ses alinéas 4 et 6 en en tirer les conséquences de droit».
 
 
 
Le Conseil rejette le motif portant sur la violation du Règlement intérieur et le contrôle de la régularité de la procédure
 
 
Malheureusement pour eux, les 7 sages, qui ont statué sur leur requête le 23 juin dernier, ont rejeté leur demande. Plusieurs motifs ont été évoqués par les sages du Conseil constitutionnel pour justifier leur décision. Dans ses considérants, le Conseil souligne d’emblée que concernantla recevabilité des propositions de loi et des amendements d’origine parlementaire, il peut être saisi «dans les cas prévus aux articles 82 et 83 de la constitution». L’article 82, rappellent ensuite les sages, dispose : «les propositions et amendements formulés par les députés ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence, soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique, à moins que ces propositions ou amendements ne soient assortis de propositions de recettes compensatrices». Or, pour les 7 sages, «lorsque le grief tiré de la violation de ces dispositions, le Conseil constitutionnel ne peut être saisi que dans le cadre d’un contrôle de constitutionnalité sur le fondement et dans les conditions de l’article 74 de la constitution».
 Un premier motif donc de rejet du recours des députés de l’opposition. Quant à l’article 83 de la constitution, il prévoit : «s’il apparaît, au cours de la procédure législative, qu’une proposition ou un amendement n’est pas du domaine de la loi, le Premier ministre et les autres membres du gouvernement peuvent opposer l’irrecevabilité. En cas de désaccord, le Conseil constitutionnel, à la demande du président de la République, de l’Assemblée nationale ou du Premier ministre, statue dans les huit jours». Et selon les sages, «cette disposition, à laquelle renvoie notamment, l’article premier de la loi organique relative au Conseil constitutionnel, invoqué par les requérants, vise les propositions ou amendements qui ne sont pas du domaine de la loi et ne confère pas à ces derniers, qualité à saisir le Conseil constitutionnel». Les requérants ne sont donc pas les personnes appropriées pour saisir le Conseil constitutionnel dans le cas d’espèce.
Les juges rappellent ainsi à Mamadou Lamine Diallo et Cie, pour clore, «que le Conseil constitutionnel ne tient ni de la Constitution ni de la loi organique n°2016-23 du 14 juillet 2016 le pouvoir de statuer un moyen tiré de la violation du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale». Ainsi, il rejette la requête des députés.
Une décision ne sera certainement pas du goût des opposants politiques, encore moins des associations islamiques qui avaient longuement tiré à boulets rouges sur les députés du régime.
 
Alassane DRAME
 
 
LES ECHOS

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