Le Grand Serigne de Dakar Pape Ibrahima Diagne ne partage pas le combat du collectif «And Samm Jikko Yi» pour la criminalisation de l’homosexualité. A l’en croire, si c’est au nom de l’Islam que le collectif agit, il ne devrait pas se limiter à combattre l’homosexualité, mais aussi interdire l’alcool, la prostitution, les jeux de hasard, le vol, etc. Pire, dans un pays ou on peut accuser à tort et à travers, on risque, dit-il, de tuer des innocents.
En marge d’une rencontre dans le cadre des élections locales, le Grand Serigne de Dakar, Pape Ibrahima Diagne, a remis sur la table le débat sur la criminalisation de l’homosexualité. Et, c’est pour dénoncer la position équivoque du collectif de défense des valeurs, «And Samm Jikko Yi». «Il faudrait qu’on s’accorde sur une chose, l’homosexualité ne sera jamais acceptée au Sénégal. Même si c’est officialisé, le peuple ne l’acceptera pas», a d’emblée averti le Grand Serigne de Dakar, qui fait remarquer, à l’endroit du collectif de défense des valeurs qui a soulevé la question de la criminalisation de l’homosexualité en période électorale, que le moment était mal choisi et le débat inopportun. «Si c’est au nom de l’Islam ou de la Charia qu’ils (les acteurs de And Samm Jikko Yi) agissent, ils ne devraient pas se limiter à la criminalisation de l’homosexualité. Ils doivent être plus conséquents dans leur démarche. Outre l’homosexualité, ils devaient inclure dans leur combat l’alcool, la prostitution, les jeux de hasard et le vol qui sont pourtant interdits par l’Islam», explique Pape Ibrahima Diagne, qui n’a pas manqué de rappeler la sentence de la Charia contre un voleur et un fornicateur.
Si c’est au nom de l’Islam, ils ne devraient pas se limiter à la criminalisation de l’homosexualité
Il s’agit de couper la main du voleur et de lapider à mort le fornicateur. Face à cette situation, il n’a pas manqué de s’interroger sur le mode de gouvernance voulu par le collectif de défense des valeurs : une République Islamique ou une République laïque ? Or, de l’avis du Grand Serigne de Dakar, c’est eux (les défenseurs des valeurs) qui ont choisi la laïcité. «Même si la religion est le soubassement de leur combat, ajoute Pape Ibrahima Diagne, ils ne doivent pas choisir de combattre un point (l’homosexualité) et d’occulter les autres interdits de la religion. Les femmes se prostituent légalement et peuvent passer avec leurs conjoints trois jours dans une auberge sans que cela n’émeuve personne. Pourquoi ils n’en parlent pas ?», fulmine le Grand Serigne de Dakar.
Au Sénégal, pour un oui ou pour un non, on peut accuser une personne d’être homosexuel
Il est en outre revenu sur le danger que peut constituer la criminalisation de l’homosexualité. «Si on criminalise l’homosexualité, on risque de tuer des innocents. Au Sénégal, pour un oui ou pour un non on peut accuser une personne d’être un homosexuel ; tout simplement parce que vous n’avez pas la même vision ou parce que vous n’avez pas le même engagement politique. Pour des accusations infondées, on risque de tuer d’honnêtes citoyens», sérine Pape Ibrahima Diagne alors que la Charia recommande dans le cas d’une fornication, au moins la présence de quatre témoins oculaires sur les lieux et de provenances diverses.
M. CISS