CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME DE L’ONU : Le projet de résolution des États africains sur la lutte contre le racisme systémique voté au forceps



Le projet de résolution déposé par les États africains n’est pas passé hier comme lettre à la poste à Genève. Après plusieurs péripéties émaillées par de fortes pressions venant de certains Occidentaux, notamment la France, le projet a été voté. Cependant, le texte a été édulcoré et de la commission d’enquête souhaitée ils en sont venus à un simple rapport du Haut-Commissaire. Le manque de sincérité des Occidentaux a par ailleurs été noté.

La journée d’hier n’a pas été simple pour les membres de la Commission des droits de l’homme de l’Onu. Le projet de résolution déposé par les États africains et qui a été examiné hier laisse des sueurs froides, de grosses inquiétudes pour les noirs. Et comment ! Dans le projet de résolution, les États africains ont bien mentionné dans le texte leur exigence de création d’une commission d’enquête indépendante «pour établir les faits et les circonstances liés au racisme systémique, les violations présumées du droit international des droits de l’homme et les abus contre les Africains et les personnes d’ascendance africaine aux États-Unis d’Amérique et dans d’autres parties du monde récemment touchées par les forces de l’ordre, en particulier les incidents qui ont entrainé la mort d’Africains et de personnes d’ascendance africaine, en vue de traduire en justice les coupables».

La France, l’Angleterre et le Mexique s’opposent

Mais lors des débats, les États occidentaux ont montré une forte opposition par rapport à cette demande. Ils ne voulaient pas d’une commission qui fait des études sur des spécificités de violences policières motivées par le racisme aux Usa. Ainsi, ils ont «exigé» que le nom des Usa soit enlevé. Pire, ils ne voulaient pas non plus d’une commission d’enquête qui, à leur avis, est trop forte à cette occasion. Ainsi, de fortes pressions ont été exercées sur les pays africains notamment la Libye, le Maroc, l’Égypte, le Sénégal et le Burkina Faso, pour saper leur consensus. Cette pression a été exercée par la France, l’Angleterre et le Mexique. Quelque peu ébranlés, les États africains ont su résister, tout de même.

Le cas Georges Floyd…

En outre, une autre demande a été faite par les États africains à la Haut-Commissaire aux droits de l’homme, avec l’aide des titulaires de mandat spécial concernés, de « préparer un rapport sur le racisme systémique, les allégations de violations du droit international des droits de l’homme contre les Africains et les personnes d’ascendance africaine par les forces de l’ordre, en particulier les incidents qui se sont soldés par la mort de Georges Floyd et d’autres Africains et de personnes d’ascendance africaine, pour contribuer à la responsabilisation et à la réparation des victimes».
A la suite d’un long débat, le projet de loi a été voté, mais en lieu et place de la commission d’enquête réclamée, ils ont retenu la rédaction d’un rapport par la Haut-Commissaire aux droits de l’homme. Tout de même, le nom de Georges Floyd sera mentionné ainsi que les circonstances de sa mort, sans citer le nom du pays où il a été tué. Un tout petit lot de consolation pour les pays africains qui ne laisse pas de marbre les défenseurs des droits de l’homme sénégalais.

Me Amadou Aly Kane : «Les Occidentaux ne sont pas sincères dans leur volonté de lutte contre le racisme systémique»

«Tous ces pays occidentaux qui ont fait pression n’étaient manifestement pas dans leur peau. Cela montre que cette résolution a été adoptée finalement par consensus, mais les péripéties qui ont entouré cette adoption ont démontré que les pays occidentaux ne sont pas sincères dans leur volonté de lutter contre le racisme systémique. C’est cela la réalité. Vous voyez qu’ils ont réussi à édulcorer le texte de départ», a martelé Me Amadou Aly Kane que nous avons joint au téléphone.

Alassane DRAME
LES ECHOS

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