Le capitaine Mamadou Dièye a parlé. L’ex-officier, fraichement viré des forces armées sénégalaises s’est adressé aux Sénégalais à travers un audio publié sur internet. Dans son enregistrement, le désormais ex-militaire avertit les autorités militaires et civiles et annonce sa descente effective dans l’arène politique.
«Je quitte le virtuel, maintenant je suis dans le réel». C’est en ces termes que le désormais ex-capitaine des armées sénégalaises a annoncé sa nouvelle posture, après sa sortie de cellule. Mais déjà, le capitaine Dièye, qui est intervenu, pour la dernière fois, selon ses mots, dans une plateforme de discussion en ligne, a tenu, avec toute la fermeté qui sied, avertit les autorités sénégalaises, militaires comme civiles. «Je ne suis ni Khalifa Sall, ni Karim Wade, je ne suis pas un politicien. Je suis un officier de l’armée. J’ai commandé des gens. J’ai formé des gens. Et ceux-là sont attachés à ma personne et ils croient en ce que je fais. Si quelqu’un, qui qu’il soit, veut violer mes droits, il y aura des problèmes dans ce pays», a d’emblée déclaré le capitaine Mamadou Dièye,
Poursuivant sa déclaration, le militaire revient sur les débuts de son engagement, mais aussi sur les péripéties de son arrestation qui a suivi son retour au pays. «C’est quand je me suis rendu compte que l’heure de ma mission individuelle avait sonné, que j’ai commencé à parler à des gens… Ma décision a été prise en toute responsabilité et en toute liberté. Personne ne m’a dicté quoi que ce soit, personne ne m’a conseillé sur comment procéder», soutient-il. Et d’ajouter : «ma propre famille, quand je me suis rendu compte qu’elle n’était pas prête à me suivre, j’ai coupé toute forme de communication entre elle et moi. Parce que je sais qu’elle ne fera que m’attarder dans ma mission».
«Je n’ai pas volé, j’ai respecté la loi»
Mais c’est parce que, pour lui, les courageux ne sont pas nombreux dans notre pays et que des personnes qui allient l’acte à la parole ne courent pas les rues. «Quand je revenais au pays, personne, mis à part celui qui est venu me chercher à l’aéroport, n’était au courant», dit-il, se désolant du fait que beaucoup de personnes aient parlé de son affaire sans comprendre.
En effet, assure le capitaine Dièye, «je n’ai pas volé, j’ai respecté la loi et je n’ai fait du tort à personne». Ainsi donc estime-t-il : «que ce soit le magistrat, l’avocat, le chef d’état-major général des armées ou n’importe qui d’autre jusqu’au président de la République, je les mets tous dans le même sac».
Et ceux qui soutiennent mordicus que rien de grave ne peut arriver au Sénégal sont en train de se fourrer le doigt dans l’œil, assure-t-il. «Cela pourrait être vrai si les autorités appliquaient les lois dans leur totalité, si chacun est respecté pour ce qu’il est», explique l’ancien militaire, invitant les autorités à faire les choses dans le respect des règles. «Si je suis fautif, on n’a qu’à me le notifier dans le respect des lois et règlements de ce pays. Si les choses étaient ainsi faites, il n’y aurait pas de problème».
«Le déserteur, c’est celui qui prend ses bagages et fout le camp»
Revenant sur les accusations des responsables de l’armée à son endroit, Dièye soutient que celles-ci ont tellement mélangé les choses que même certains, qui ont toujours soutenu sa position, ont fini par croire qu’il a déserté. «Le déserteur, c’est celui qui prend ses bagages et fout le camp. Alors qu’en ce qui me concerne, il y a nulle part où j’ai fauté. C’est pour cela que quand ils sont venus, la procédure était très simple… Il était prévu que la gendarmerie m’arrête. Il n’y a rien d’extraordinaire. Quand il y a un problème qui implique des parties, c’est normal que toutes les parties soient entendues. Dans le cadre de cette affaire, c’est les autorités militaires et moi-même. Les autorités militaires ont parlé partout et m’ont fait toutes sortes de menace… Quand ils m’ont déféré à Bargny après mon arrestation, je leur ai demandé de me notifier les raisons de ma détention. Personne parmi eux n’était en mesure de me répondre», dit-il.
«Je leur avais clairement dit que s’ils me gardaient plus de deux semaines, on allait foutre en l’air ce pays»
Avant d’ajouter qu’il avait fixé un ultimatum aux autorités. «De mon côté, je leur avais donné deux semaines. Je leur avais clairement dit que s’ils me gardaient plus de deux semaines, on allait foutre en l’air ce pays. Et je le disais avec conviction et engagement. Je l’ai déjà dit, pour moi, c’est la même chose que je sois Président (de la République) ou que je sois un vendeur de café», dit-il, révélant que des autorités du pays sont avec lui dans son combat.
Moment choisi par l’ex-capitaine pour appeler les autorités à faire face à leurs responsabilités. «Quand vous gérez un pays et qu’à un moment donné de l’histoire, il se passe des choses que le pays n’a jamais connues, si vraiment tu es un leader, tu dois marquer une pause et analyser le pourquoi de ce changement», dit-il. Terminant sa déclaration, Mamadou Dièye a remercié les Sénégalais, faisant part de sa volonté d’aller vers eux pour s’entretenir avec eux «dans le seul but de servir la nation».
Sidy Djimby NDAO