Bocar Diongue n’est pas d’accord avec cette volonté qui est prêtéeau président de la République de vouloir mettre Pape Diop commeprésident de l’Assemblée nationale. Dans cet entretien qu’il nous a accordé, il dit haut ce qu’il pense de cette histoire. De Mme Mimi Touré qu’il voit déjà dans les habits de la future présidente de l’Institution et Macky Sall qu’il invite à une redistribution des rôles au niveau des Parcelles Assainies.
«Les Echos» : Le président de la République a reçu samedi les députés de la majorité. Pensez-vous que c’est une bonne idée à la veille de l’installation de la 14e législature ?
Bocar Diongue : Oui, oui, je pense qu’à la veille de la formation même du gouvernement et du bureau de l’Assemblée nationale, il est normal que le président de la République reçoive les nouveaux élus, les briefer et pour mettre en place une grande équipe parlementaire en vue de soutenir ses actions quotidiennes pour l’émergence du pays.
Au niveau des Parcelles Assainies, vous avez été battus aux élections municipales et aux législatives. Ne pensez-vous pas qu’il est temps de procéder à l’évaluation et d’aller vers la redistribution des responsabilités ?
Ce qui est arrivé aux Parcelles Assainies ne nous a pas surpris. Parce que déjà, dès l’entame de la campagne, nous nous sommes abstenus. Nous avons démissionné de tout ce qui avait trait à la campagne, parce que nous n’avions pas vu le sérieux et on savait qu’on allait perdre les Parcelles. Ici, nous trainons toujours les conséquences des élections locales pour le choix qui avait été fait. Ce n’était pas le bon choix. Ne l’ayant pas fait pour des raisons obscures, pour des raisons de calculs politiciens ou de je ne sais quoi, ça nous a valu ce qui est arrivé : un écart abyssal, une défaite mémorable qui actuellement sème le doute. Est-ce qu’actuellement, les Parcelles Assainies n’ont pas basculé dans l’opposition ? La réflexion s’impose. C’est une recomposition qui s’impose. Nous, en tant que cadres, nous ferons bloc et nous ferons face, parce que nous n’accepterons plus ce qui est là. L’actuel coordonnateur a atteint ses limites (ndlr : Amadou Bâ). Et objectivement, dans les jours à venir, nous nous érigerons en bouclier pour le triomphe du Président Macky Sall et pour la reprise des activités du Benno Bokk Yakaar sérieusement au niveau des Parcelles Assainies. Parce qu’on ne peut pas rester en hibernation dans son château féérique, attendre simplement qu’il y ait élection pour débarquer aux Parcelles.Ce qui est arrivé aux Parcelles mérite quand même une recomposition et on l’imposera.
Vous êtes entrain de dire que vous ne voulez plus d’Amadou Ba là…
Oui, oui, nous sommes dans cette dynamique. D’ailleurs, je vous apprends dès à présent que nous sommes dans la dynamique du : «Amadou Yoni», ça suffit !Parcequ’il a montré ses limites. Même si Macky compte sur lui, ce n’est plus possible. Lui-même, je pense, va démissionner de lui-même. Parce qu’il sait qu’il ne pourra plus passer. Quand en tant que coordonnateur, il ne parvient pas à fédérer le BennoBokkYakaar des Parcelles à 100%, il y a problème. Lorsqu’à l’unanimité nous l’avons accepté comme coordonnateur, il a eu des résultats, mais malheureusement, quand cela arrive, c’est toujours un groupuscule qui essaie de tirer la couverture, pensant que c’était eux ; or j’avais prévenu, j’avais dit que les Parcelles, c’est nous d’abord. Il pensait que c’est en toisant les gens ou en les regardant de haut qu’il va réussir. Il a vu ce qu’il a vu.
Mais, est-ce qu’on peut aussi imputer toute cette défaite à Amadou Bâ, quand on sait les rivalités qu’il y a entre Moussa Sy, Mbaye Ndiaye, Maïmouna Cissokho et vous-même ?
Il ne s’agit pas de rivalités. Au niveau des Parcelles, nous n’avons pas des problèmes de rivalités, ce dont il s’agit, c’est d’avoir un leadership fort parce qu’Amadou Bâ, on lui a tout accepté. Mbaye Ndiaye était à ses côtés pour battre campagne. Mais ça ne suffit pas. Les véritables cadres, responsables ici, se sont abstenus de l’accompagner. D’ailleurs, ils ont battu campagne seuls. Ce, pour dire que ce sont les résultats et les conséquences du comportement de Amadou vis à vis des responsables que nous sommes. Il ne peut pas passer son temps à nous toiser et attendre qu’il y ait élection pour venir afin que nous travaillions à ses côtés. Pour les élections législatives, on n’a vu que son Directeur de campagne, qui ne vote même pas aux Parcelles, un inconnu au bataillon, à ses côtés pendant des responsables étaient aux figurants.
Pour en revenir aux législatives, comment appréciez-vous l’acte politique posé par Pape Diop?
Je ne vais pas trop m’y épancher parce que jusque-là, je ne maîtrise pas les tenants et les aboutissants. Il a parlé de patriotisme et tout. Mais nous pensons plutôt à des négociations. Nous attendons plutôt ce que le parti lui offrira. Je présume que les leçons ont été tirées. C’est connu maintenant ; que tous ces transhumants qui affluent vers le pouvoir posent plus préjudice au pouvoir que des apports positifs. Je pense que le président de la République a besoin de s’entourer de gens sûrs. Si c’est par patriotisme que Pape Diop est venu ou préserver les intérêts du Sénégal comme il l’a dit, c’est une bonne chose. Mais s’il y a une contrepartie tendant à promouvoir des pro Pape Diop ou autres, ce serait dommage encore pour le président ; parce que plus que jamais aujourd’hui, le président a besoin de s’entourer de compagnons sûrs, loyaux qui peuvent le mener à bon port. Mais des gens qui sont là par circonstances ou pour des raisons purement politiciennes ; s’attendant à des rétributions ou des postes, ce n’est pas bon.
A vous entendre, vous ne serez pas d’accord qu’il soit choisi président de l’Assemblée nationale ?
Ce serait une grosse erreur de mettre Pape Diop comme président de l’Assemblée nationale. En quoi est-il plus méritant que d’autres qui sont là, qui se sont battus autour du Président Macky Sall ? Ce serait une position arriviste de sa part et ce serait incongru. Franchement, je ne suis pas pour ça et je le dis ouvertement. Qu’est-ce que cela apporterait au Benno ? Non, il y a de meilleurs profils que Pape Diop pour la présidence de l’Assemblée nationale. Ça nous le disons dès à présent, nous sommes contre.
Vous pensez à qui ? A Mimi Touré, c’est ça ?
C’est un excellent profil. Elle a le mérite d’avoir battu campagne. Elle s’est donnée corps et âme. Sa loyauté, son engagement et sa détermination auprès du président de la République ne font aucun doute et je pense que tous les Sénégalais attendent du président de la République qu’il mette Mme Aminata Touré présidente de l’Assemblée nationale. Elle le mérite amplement.
L’actualité, c’est aussi la constitution prochaine d’une nouvelle équipe gouvernementale. Comment voyez-vous cette équipe?
Nous attendons du président de la République un gouvernement jeune. De gens quand même sûrs. On ne le dira jamais assez, le président a besoin de fantassins, de gens qui sont là prêts à se battre pour son triomphe. Des personnes loyales, des personnes sûres, à l’orée de 2024, prêtes à l’accompagner.
Que vous inspire la candidature annoncée de Sonko pour 2024 ?
Il est libre comme tout Sénégalais. Mais je pense qu’il devait plutôt attendre que la justice ait fini de se prononcer entre lui et celle qui l’accuse de l’avoir violée. Il s’est empressé, c’est mon avis, d’annoncer sa candidature. Il aurait dû exiger le procès plutôt que de parler de 2024. Il aurait dû exiger de laver son honneur dans cette affaire de mœurs plutôt que de dire qu’il va être candidat.