La ville de Dakar n’a pas aimé le geste du maire de la commune de Dakar-Plateau qui a procédé à la démolition du marché Sandaga, en août dernier. En fait, l’arrêté est illégal, selon le conseil de la ville de Dakar. Il a saisi la Cour suprême par un recours en annulation de l’arrêté du maire autorisant la démolition du marché, au motif qu’Alioune Ndoye outrepasse ses prérogatives et qu’il a donc fait un excès de pouvoir. A son tour, l’édile de Dakar-Plateau a riposté en balayant d’un revers de mains les arguments du conseil de la ville de Dakar. D’ailleurs, selon les conseils de Alioune Ndoye, le recours est sans objet puisqu’intervenu après la démolition. La Cour devrait statuer bientôt.
La ville de Dakar et la commune de Dakar-Plateau se chamaillent toujours autour du marché Sandaga. Chaque partie se prévaut d’un statut d’autorité légale. Ce combat se poursuit actuellement devant la Cour suprême. Car, la ville de Dakar a saisi la chambre administrative de la haute juridiction pour demander l’annulation de l’arrêté du maire Alioune Ndoye autorisant la démolition du marché. Une requête qui a été faite après que le marché a été totalement rasé. La ville, via son conseil Me Demba Ciré Bathily,a soulevé quelques griefs. Le Conseil de la ville de Dakar a en effet argué d’un état de droits réels en date du 10 août 2021 signé par le conservateur de la propriété foncière de Dakar-Plateau. Evoquant en outre l’arrêté 2711 du 3 mai 2006, il soutient que le marché Sandaga est classé monument historique et qu’il bénéficie d’un régime urbanistique spécial. Ainsi, selon lui, «la commune ne dispose d’aucune habilitation législative ou réglementaire pour procéder à la signature de l’arrêté portant démolition d’un site ou monument historique». L’avocat de la ville de Dakar a aussi évoqué un deuxième moyen tiré de la violation de l’article R 106 du décret n°2009-1450 du 30 décembre 2009 portant partie réglementaire du code de l’urbanisme. «La commune de Plateau qui ne dispose que d’un transfert de compétence se limitant à la surveillance et suivi de la conservation des sites et monuments historiques, ne peut, sans violer les articles 170 et 311 du code général des collectivités locales, signer un arrêté portant autorisation de démolir le bâtiment abritant le marché Sandaga, qui est inscrit sur la liste des monuments et sites historiques de la Région de Dakar», a précisé le conseil de la ville de Dakar.
Le recours arrivé après la démolition risque d’être déclaré sans objet
Seulement, c’est sans compter avec l’avocat de la commune de Dakar-Plateau qui a balayé d’un revers de mains les arguments du conseil de la ville de Dakar. A en croire Me Baboucar Cissé qui plaide d’abord l’irrecevabilité du recours, la ville de Dakar ne prouve pas sa qualité de propriétaire de l’immeuble abritant le marché Sandaga. Dans son argumentaire, il souligne : «il ressort de l’état de droits réels que l’immeuble objet n°4804/DK est la propriété de la commune de Dakar de 193 grevés de charges avec une affectation comme marché communal de Sandaga dévolu par l’Etat à la commune de Dakar-Plateau». Or, toujours selon lui, la ville de Dakar est de création récente et elle ne saurait se prévaloir de sa qualité de propriétaire. Il y a mieux, selon Me Cissé qui précise que le recours «est devenu sans objet» d’autant que le marché a été démoli le 13 août 2021. «La démolition du marché est antérieure à la session du Conseil municipal de la ville de Dakar en date du 16 août et de sa saisine», a encore souligné l’avocat. En outre, selon Me Cissé, la commune de Dakar-Plateau est une commune de plein exercice depuis l’avènement de l’Acte 3 et qu’elle est maintenant une collectivité territoriale compétente pour délivrer les permis de démolir après traitement technique et avis favorable des services de l’Etat et que cela ne relève plus de la ville. «L’arrêté du maire de la commune de Dakar-Plateau n’a rien d’illégal puisqu’il est approuvé par le représentant de l’Etat», a également souligné Me Cissé.
Après avoir fait remarquer que la démolition du marché relevait d’une impérieuse nécessité étant donné l’état de ruine dans lequel il se trouvait, le conseil de la commune de Dakar-Plateau a demandé à la Cour de déclare irrecevable le recours pour excès de pouvoir et subsidiairement de le rejeter comme mal fondé. La Cour va statuer bientôt.
Alassane DRAME