Entre Ousmane Sonko et les députés de la majorité, c’est le désamour total. Coupable d’avoir décrié certaines tares du régime, il a fait l’objet d’un lynchage verbal avec des mots qui ont parfois frôlé l’injure. En tout cas, s’il n’en tenait qu’au député Me Djibril War, son collègue du Pastef ne serait pas sur les listes suite à sa radiation pour défaut de respect du secret professionnel.
Dans son intervention, Ousmane Sonko a décrié l’endettement du Sénégal. «Tous les pays s’endettent. Mais les pays auxquels notre pays se compare disposent de trois outils que le Sénégal n’a pas. Ils ont une excellente capacité à mobiliser les ressources fiscales. Au Sénégal, nous ne pouvons pas mobiliser nos ressources à cause des mauvaises pratiques fiscales. Les conventions fiscales font partie des mauvaises pratiques fiscales. L’année dernière, j’avais décrié les conventions fiscales entre le Sénégal et le Luxembourg et l’Ile Maurice, mais la majorité les avait adoptées. Aujourd’hui, l’histoire m’a donné raison, car le gouvernement vient de dénoncer la convention avec l’Ile Maurice. Les contradictions dans vos politiques font perdre au Sénégal des milliards que personne ne peut estimer», charge Ousmane Sonko, avant de révéler que ces pays auxquels le Sénégal se compare ont leur monnaie et une banque centrale qui définit les taux d’intérêts et la politique de change. Ce dont le Sénégal ne dispose pas. «Si le gouvernement veut s’endetter dans ces conditions, il se leurre. De plus, tous ces pays qui s’endettent ont réussi la prouesse de gérer leurs ressources naturelles. Ce qui n’est pas le cas du Sénégal», dit-il.
L’Assemblée nationale, une zone de non droit budgétaire
Sur un autre registre, Ousmane Sonko a fustigé les 120 milliards alloués aux pouvoirs publics et qui seront votés, dit-il, sans débats, avec une exécution opaque sans aucun contrôle. A cet effet, il révèle que «l’Assemblée nationale est une zone de non droit budgétaire. J’avais dit qu’il y a de la fraude fiscale à l’Assemblée nationale. Vous (Abdoulaye Daouda Diallo) en savez quelque chose puisque vos services ont redressé l’Assemblée nationale. J’avais soutenu qu’il y avait du blanchiment d’argent à l’hémicycle. J’espère que le blanchiment de drogue n’a pas encore élu domicile au sein de l’hémicycle. Il y a même du blanchiment d’escrocs publics à l’Assemblée nationale, car la commission d’enquête parlementaire a tenté de blanchir des personnes», dénonce le député de Pastef qui révèle dans la foulée que «l’Ofnac a déposé son rapport sur la table du procureur, confirmé ses dires à propos des 94 milliards et demandé l’ouverture de poursuites contre les personnes concernées». Ousmane Sonko n’occulte pas les surfacturations, les passations de marchés douteuses à l’Assemblée nationale, mais aussi des distributions d’argent….
Cheikh Tidiane Gadio sermonne Sonko
Même si le député de Pastef a le droit de mener ses enquêtes et de les partager, Cheikh Tidiane Gadio estime cependant, sans le citer, qu’il doit faire attention dans ses propos. En effet, avec le contexte difficile qui sévit dans la sous-région, marqué par l’insécurité et l’instabilité, Gadio trouve qu’un tel débat ne doit pas être soulevé à l’hémicycle. A l’en croire, dire que le trafic de drogue est présent à l’Assemblée nationale est déplacé de la part d’un député. «Critiquer ne veut pas dire discréditer. Ce n’est pas bon de discréditer nos institutions. C’est une catastrophe pour notre pays. Il faut faire attention dans nos paroles», martèle Cheikh Tidiane Gadio. Répondant à Ousmane Sonko sur l’argent distribué à l’Assemblée nationale, Abdou Mbow révèle : «je crois que l’information n’est pas passée, mais le président de leur groupe a reçu une enveloppe pour le fonctionnement de leur groupe. Ils n’ont qu’à régler ça entre eux», lance-t-il.
Djibril War : «une personne de cette nature ne devrait pas être député»
«La valeur la plus fondamentale, c’est la pudeur», Me Djibril War dixit. Poursuivant à l’endroit de Ousmane Sonko, il révèle que la radiation est la sanction la plus infâme parce que c’est l’ignominie qui est sanctionnée. A l’en croire, une personne radiée pour défaut de respect du secret professionnel, ne devrait même pas être député. «J’aurai été à la même place du garde des Sceaux ou du ministre de l’Intérieur, il n’allait pas figurer sur les listes», dit-il, avant d’ajouter : «tant qu’il n’est pas capable d’avoir des attitudes morales pour être un chef de service, il ne doit pas prétendre à diriger un Etat», martèle Me War.
Woré Sarr : «Hott, comme ôter les maigres ressources des sénégalais»
Dans son intervention, la députée libérale Woré Sarr n’a pas raté le ministre de l’Économie Amadou Hott. A l’en croire, il est à l’origine de tous les malheurs vécus par ses compatriotes. A peine nommé, avant même que vous perceviez votre premier salaire, vous nous surprenez avec cette hausse de l’électricité alors que vous devriez permettre aux Sénégalais, avec leurs maigres ressources de pouvoir faire des économies. Mais, cela ne nous surprend pas, puisque votre nom Hott signifie ôter les maigres moyens des Sénégalais», raille l’ancien maire de Gounass, avant de tresser des lauriers au ministre des Finances Abdoulaye Daouda Diallo. Cependant pour renflouer les caisses de l’Etat, elle invite le gouvernement à récupérer les 47 milliards de Singapour et les 4000 milliards qu’auraient détournés Karim Wade.
Briser les barrières idéologiques et culturelles
Pour sa part, Mamadou Diop Decroix est persuadé que les inégalités se creusent et l’extrême pauvreté omniprésente. «La corruption n’est pas combattue du fait de l’impunité comme en attestent les rapports de l’Ofnac qui dorment dans les tiroirs du procureur de la République. Enfin, le trafic international de drogue et la pandémie de la fausse monnaie participe au décor de la mauvaise gouvernance», ajoute le député.
M. CISS