Me Augustin Senghor, était l’invité du club de presse de l’Anps. Le président de la Fédération sénégalaise de football s’est livré, dans cet entretien, sur la fin polémique du championnat local, sur les projets d’infrastructures de la Fsf ainsi que sur une potentielle co-organisation de la Can avec la Guinée en 2025. Concernant sa candidature à sa propre succession à la tête de la Fsf et à la présidence de la Caf, Augustin Senghor, reste «sur ses principes…»
Avec une éventuelle reprise des championnats, avez-vous pensé à une formule ?
Il y a trois semaines à un mois, le Comité d’urgence avait fait une proposition de reprendre plus tard au mois de novembre, parce qu’il ressortait des informations fournies par les autorités, notamment du discours du chef de l’Etat, que la pandémie ne pourrait pas être régulée avant le mois de septembre. Partant de là, on s’est projeté en novembre et c’est pourquoi nous avions revu la formule pour garder l’intégrité de la saison suivante 2020-2021 et pouvoir la démarrer en janvier au moins. Il fallait alors changer de formule. C’est ainsi qu’après un large partage au sein des instances de décision, le Comité d’urgence avait proposé cette formule des play-offs qui permettrait de finir la saison sur le terrain et d’attribuer les bénéfices à chacun selon son mérite sportif. A la lumière de ce qui s’est passé ces derniers jours, le Comité d’urgence s’est réuni et a proposé de convoquer le Comité exécutif, le mois prochain, pour étudier les possibilités d’anticiper sur ce mois de novembre. Cela voudrait dire que nous pourrions envisager de terminer la saison en jouant les phases retours de Ligue 1 et L2, sans oublier les autres championnats amateurs. Ce sera juste une étude mais la décision initiale prise par le Comité d’urgence reste de rigueur.
Pourquoi n’avoir pas arrêté les compétitions, déclarer le champion, comme ailleurs en Afrique ?
Chaque pays a ses réalités. Au Sénégal, on n’a joué que la moitié du championnat en ce qui concerne les Ligues d’élite 1 et 2. On a joué 13 journées sur 26 possibles. Il y avait 39 points à prendre. La difficulté, c’est qu’il nous paraissait difficile - sans qu’on nous le reproche ou que ça ne fasse des griefs aux autres équipes - de déclarer Teungueth FC champion. Même en Ligue 2, les équipes sont très proches, mise à part la Linguère qui a 6 points d’avance sur le 2ème, l’Uso. C’était difficile d’attribuer le titre, de décider qui allait descendre ou monter. Ça posait problème et on estime que jouer la moitié du championnat ne suffisait pas, même si TFC a une longueur d’avance sur ses adversaires. C’est pourquoi nous avions pensé à cette formule qui serait moins injuste, sans remettre en cause le mérite des équipes qui ont engrangé des points sur la phase aller.
Le stade Demba Diop sera-t-il rasé et repris ou réhabilité ?
Notre orientation, c’est une réhabilitation et une modernisation. Il suffira juste de faire les commodités d’accès, de sortie, de fluidité, d’organisation, du confort, des panneaux d’affichage modernes, des sièges assis de 15 à 18.000 places… Et si c’est possible, nous irons jusqu’à 20.000 places. Ce sera modernisé pour en faire des lieux où les gens viendraient pour la restauration ou des boutiques de vente de maillots. Le stade Demba Diop, fermé depuis 2017, pose beaucoup de préjudices au football et particulièrement au football dakarois. Il est important, vu la place du stade dans la vie du football sénégalais et des autres sports, qu’il soit réhabilité et rouvert. Nous voulons en faire un petit modèle sénégalais des stades anglais. Tous les sièges seront assis et nous allons aussi réorganiser pour que la distribution change. On se rend compte que tout le monde est à l’étroit, tribune de presse, espace VIP, même le salon d’honneur est un petit cagibi sous les tribunes, les toilettes et vestiaires sont accolés au salon. Pourquoi ne pas déplacer les vestiaires du côté de la tribune couverte, entre autres travaux.
Qu’en est-t-il de vos autres projets d’infrastructures, notamment le nouveau siège de la Fsf ?
Nous sommes à l’étroit dans l’actuel siège qui ne reflète pas le niveau de rayonnement de notre football, surtout avec les performances de notre sélection A, nos jeunes qui brillent partout, les filles qui gagnent et surtout le Beach Soccer, roi d’Afrique depuis 10 ans ou plus. A cela, il faut ajouter le rayonnement de notre fédération qui est très respectée en Afrique et dans le monde, sans oublier nos dirigeants reconnus partout dans le monde. Il est temps d’avoir ce siège qui sera logé dans les locaux de l’ancienne ligue de football du Cap-Vert, au Point E. Ce sera un immeuble R+6 extension que nous voulons moderne et fonctionnel, où toutes nos administrations seront logées avec des salles de réunion et autres. Il y a aussi l’hôtel fédéral, centre d’hébergement de haut niveau qui sera à Toubab Dialaw. Il faut y ajouter tous les investissements qui seront faits à Guéréo sur une plateforme de 20 hectares pour en faire un centre d’excellence international qui pourra accueillir des équipes nationales ou des clubs internationaux en bord de mer pour se préparer.
Votre mandat se termine en août 2021. Serez-vous candidat à votre propre succession ?
J’ai été élu pour un mandat de 4 ans et il reste à peu près 15 mois, durant lesquels je suis tourné vers mon travail, ma mission et les engagements que j’avais souscrits en 2017. Ce qui nous intéresse, c’est de laisser un legs aux générations futures et aux futurs dirigeants des acquis qui leur permettront de maintenir les progrès en cours. Nous voulons laisser sur place une bonne organisation, des infrastructures, des équipes compétitives pour pouvoir rester le plus longtemps possible au sommet du football africain, glaner des trophées pour rattraper le temps perdu depuis les indépendances. Ma candidature, ce n’est pas ce qui compte, Je suis focus sur ma mission et mon travail. Tout n’a pas été toujours rose, c’est normal aussi quand on a une méga fédération, avec près de 400 membres. Installer un débat sur des candidatures ou des élections, ce serait nous détourner de l’essentiel. Ça me fait plaisir que certains pensent que je dois continuer le travail. Il y a eu tellement de crises à l’issue desquelles j’aurais dû partir, je me dis que je suis un miraculé.
On vous présente comme un profil intéressant pour la Caf
Ça se dit, mais j’ai eu à me prononcer là-dessus. Je reste sur mes principes qui veulent que je sois quelque part pour apporter ma contribution aux côtés d’autres. Chacun a son rôle et j’essaie d’apporter ma pierre à l’édifice. Le jugement des autres est important pour chaque être humain. Mais, l’essentiel est de rester sur ses principes et de travailler pour l’intérêt général. Notre sort n’est pas le plus important. Je crois fortement au destin. Les destins sont écrits pour chacun d’entre nous. Laissons le destin faire son chemin et ses choix. Demain, on saura ce qui adviendra. Ce qui est important pour moi, c’est que je ne me couche jamais en pensant à un poste de président de la Caf. Par contre, je me couche tous les jours pensant à une Caf rayonnée et j’y travaille aux côtés du président Ahmad Ahmad pour bâtir un football africain fort. C’est ça notre objectif, nous y travaillons et sans aucune ambition personnelle. Le travail est toujours sanctionné positivement ou négativement. Tout le monde ne sera pas président de la Caf. C’est un poste prestigieux, mais chacun a son destin et son mérite. Il ne faut pas oublier qu’être président de la Caf demande un investissement beaucoup plus important que celui de président de fédération. Au-delà de la volonté individuelle, il faut le backing de tout un pays, d’un Etat, d’un gouvernement, car il s’agit de conquérir des voix. Je ne suis pas dans ce projet. Je suis dans le projet de jouer pleinement mon rôle dans le Comité exécutif, avec les responsabilités nombreuses qui me sont confiées.
Qu’en est-t-il des nouveau maillots Puma pour le Sénégal ?
Je pense que nous avons les plus beaux maillots d’Afrique. Ces maillots sont beaux. En plus, la demande est forte. Il faut rappeler que nous avons signé avec Puma avant la Coupe du monde. On était obligé de travailler sur l’existant et non pas de créer un maillot spécifique. Nous avons fait des choix avec Puma sur des lignes de maillots que nous avons validées ensemble. Je peux vous garantir que ce sont de jolis maillots et les Sénégalais s’y reconnaîtront.
Co-organisation Can avec la Guinée, qu’en pensez-vous ?
Je dois d’abord dire clairement que la Can 2025 a été attribuée à la Guinée et non pas aux deux pays. Aujourd’hui, nous n’avons pas les cartes en main. C’est la Guinée qui doit dire si elle est prête ou non à organiser seule ou s’ouvrir à d’autres pays. Je me suis prononcé une fois sur cette question en disant que ce serait une excellente chose de le faire. Notre Président et son gouvernement ont mis en branle un certain nombre de projets qui nous permettront d’avoir 4 ou 6 stades internationaux plus la réfection de Demba Diop. C’est autant de facteurs qui montrent que le Sénégal se prépare pour organiser dans quelques années. Si une co-organisation sera plus légère, il ne faut pas oublier que cette Can quand on la donnait à la Guinée, c’était avec 16 équipes, maintenant c’est 24. C’est lourd pour n’importe quel pays africain, à l’exception de deux ou trois. Il faut nous Africains qu’on puisse avoir l’humilité de faire les choses ensemble. Cette Can à 24 n’aura de sens que si on arrive à pousser les pays voisins d’aller vers des co-organisations. Je suis certain que ça sera de belles fêtes, des Can bien organisées ou les vols seront distants d’une à deux heures. Chaque pays pourra se doter d’infrastructures et avoir un héritage post-Can pour pouvoir développer son football. Je pense que c’est l’avenir de cette Can si on veut la maintenir à 24 pays.