L’affaire Farba Ngom suit son cours à l’Assemble nationale. La commission ad hoc avait organisé l’audition du concerné hier. Mais Farba, s’appuyant sur l’article 52 du Règlement intérieur de l’Assemble nationale, s’est fait représenter par son défenseur, Aïssata Tall Sall. Malheureusement, cette dernière n’a pas pu manœuvrer lors de cette réunion. La présidente du groupe parlementaire Takku-Wallu a dû quitter la salle après sa demande du dossier de Farba Ngom. En effet, renseigne cette dernière, on ne lui a donné que 4 lettres de transmission des parquets. Elle a boudé et quitté la salle, mais cela n’a pas empêché la commission d’entériner la décision de proposer à la plénière la levée de l’immunité parlementaire du député Farba Ngom.
Aïssata Tall Sall et Djimo Souaré ont fait face à la presse hier après la réunion de la commission ad hoc chargée d’étudier la demande de levée de l’immunité parlementaire de Farba Ngom. Ce dernier ne s’est pas présenté à son audition qui a eu lieu hier, parce qu’il a choisi Aïssata Tall Sall pour le défendre devant ladite commission.
«J’ai demandé le dossier de Farba, on m’a remis 4 lettres de transmission entre les procureurs»
Donc les rumeurs sur le refus de Farba Ngom de répondre à la convocation de la commission ad hoc sont totalement infondées, selon la présidente du groupe parlementaire Takku-Wallu. «Il est à son quatrième mandat de député. Comme le prévoit l’article 52 de notre Règlement intérieur, il avait soit la possibilité de venir ou bien de se faire représenter par un autre député devant cette commission et il a choisi la deuxième option. Il a convenu avec moi que j’aille le représenter. En réalité, Farba voulait mettre à l’aise les membres de ladite commission. Il a voulu laisser ses collègues libres de toute pression morale», fait savoir Aïssata Tall Sall, avant d’entamer les explications sur sa mission devant la commission ad hoc en tant que défenseur. «Quand je suis arrivée, j’ai soulevé une question préjudicielle pour réclamer le dossier de Farba Ngom, puisque personne ne l’a vu jusqu’ici. Depuis le début de cette affaire, on évoque des hypothèses, on fait des supputations, mais personne en dehors de quelques autorités judiciaires, ne sait ce qu’on lui reproche : on ne sait pas si on lui reproche des coups et blessures volontaires, un accident de la circulation. La seule chose que l’on sait, c’est ce que le procureur a dit. C’est pourquoi j’ai demandé à la commission le dossier de Farba Ngom pour que nous puissions le défendre», explique-t-elle.
Aïssata Tall Sall affirme qu’elle a d’ailleurs adressé un courrier au président de la commission lundi dernier dans ce sens «Je lui ai demandé les éléments des faits qui sont reprochés à Farba Ngom pour assurer sa défense. Et le président m’a envoyé les lettres de transmission qui ont été écrites entre les différents procureurs. Le dossier de Farba Ngom est donc constitué d’une lettre du Parquet financier au Parquet général, une autre lettre du Parquet général au ministre de la Justice et aussi une lettre du ministre de la Justice au président de l’Assemblée nationale», révèle la présidente du groupe parlementaire Takku-Wallu, qui se demande si l’Assemblée nationale a constitué une commission d’enquête parlementaire pour étudier quatre lettres. «Si le dossier n’est composé que de quatre lettres, ce n’était pas la peine de mettre en place une commission d’enquête, il aurait suffi de venir en plénière et de dire : ‘’on lève l’immunité parlementaire de Farba Ngom’’», soutient-elle.
«Cette Assemblée nationale est toujours à la remorque du gouvernement»
Aïssata Tall Sall déclare qu’elle a décidé en tant que défenseur de Farba Ngom de ne pas s’associer «à cette parodie de commission d’enquête parlementaire. J’ai dit au président de la commission que si le vrai dossier n’est pas mis à notre disposition, je quitterai la commission d’enquête parlementaire. C’est vrai qu’il appartient à la justice de qualifier les faits, mais moi il me revient le droit de connaître les faits qui sont reprochés à Farba Ngom». Pour elle, par respect au pouvoir législatif, le pouvoir judiciaire devrait spécifier les faits reprochés à un député. «Je n’ai pas défendu Farba et ils ont décidé de poursuivre la procédure. J’ai donc quitté la salle les laissant libres à eux d’apprécier. Nous considérons que cette Assemblée nationale est toujours à la remorque du gouvernement. A chaque fois que le gouvernement a demandé quelque chose, on s’est précipité, sans analyse, de répondre aux desiderata du gouvernement. Ce n’est pas l’idée qu’on se fait d’une vraie Assemblée autonome, souveraine, dans le respect de la séparation des pouvoir», fulmine-t-elle.
Djimo Souaré : «ils ont décidé de proposer à la plénière la levée de l’immunité parlementaire de Farba Ngom»
Djimo Souaré, qui représente le groupe Takku-Wallu à cette commission d’enquête parlementaire, abonde dans le même sens que Aïssata Tall Sall. «J’avais demandé moi aussi au président de disposer des documents qui nous permettraient d’avoir les éléments d’appréciation pour juger de la pertinence de la levée de l’immunité parlementaire de notre collègue ou non, lors de notre réunion du vendredi 17 janvier. Et beaucoup d’autres collègues avaient soulevé la même question», révèle M. Souaré. Le vice-président du groupe parlementaire Takku-Wallu soutient que le président avait déclaré, dans un premier temps, que le rapport de la Centif était à disposition au secrétariat général de l’Assemblée nationale, mais que c’est un document estampillé confidentiel. «Suite à cela, certains membres ont fait savoir qu’on ne pouvait pas auditionner notre collègue sans avoir les éléments d’appréciation. Le président m’a personnellement appelé pour m’informer que les documents étaient disponibles au niveau du secrétariat de l’Assemblée nationale et quand je suis allé les récupérer, il s’est trouvé que les documents en question n’étaient que des lettres de transmission entre les procureurs».
Djimo Souaré estime que c’est la dignité de l’Assemblée nationale qui est en jeu. «Il ne s’agit pas tout simplement d’une question de procédure, mais d’ôter l’immunité parlementaire, qui est un droit constitutionnel, à un député. Il apparaît clairement qu’il y a une instrumentalisation de la justice derrière cette affaire», dénonce-t-il avant d’ajouter : «puisque Pastef dispose de la majorité, ils ont décidé de proposer à la plénière la levée de l’immunité parlementaire de Farba Ngom», martèle M. Souaré, qui reconnaît qu’il y a eu des levées d’immunité parlementaire pendant les autres régimes, mais la justice a toujours transmis les dossiers à l’Assemblé ; «à travers Farba Ngom, on veut atteindre sa famille politique, mais il faut que le régime sache que la fonction de député n’est pas à banaliser».
Ndèye Khady D. FALL