ATELIER DE SENSIBILISATION A L’INITIATIVE FITI: Les acteurs exposent les goulots qui freinent la transparence dans le secteur de la pêche



 
La transparence dans le secteur de la pêche est une préoccupation du Forum civil qui a initié, hier, un atelier de sensibilisation sur les standards Fiti dans le secteur de la pêche. Ce, pour corriger le manque de données et d’informations relatives aux emplois générés par le secteur de la pêche, aux navires qui s’y activent, entre autres. Auparavant, Birahim Seck a invité le chef de l’Etat à concrétiser son adhésion à l’initiative Fiti.   
 
 
 
Le Forum civil a organisé, hier, un atelier de sensibilisation des journalistes sur les standards Fiti (fisheries transparency initiative) ou transparence dans le secteur de la pêche, dans un contexte de rareté de la ressource halieutique et d’émigration. En effet, même si le Sénégal a adhéré à l’initiative Fiti depuis février 2016 en Mauritanie, Birahim Seck révèle que le Sénégal n’a pas encore rempli toutes les étapes pour concrétiser son adhésion. «Cette déclaration était certes importante, mais insuffisante, au vu des standards Fiti, parce qu’il y a d’autres étapes, d’autres actes que le Président devrait impérativement poser pour concrétiser l’adhésion du Sénégal à l’initiative Fiti, en l’occurrence la désignation du ministère chargé de recevoir l’initiative Fiti au niveau du Sénégal, mais aussi de la désignation de la personne responsable de la Fiti», indique le coordonnateur du Forum civil. 
En effet, l’intérêt à l’adhésion à l’initiative Fiti, c’est la transparence dans l’accès à l’information dans le secteur de la pêche. Cependant, de l’avis du coordonnateur Fiti de l’Afrique de l’Ouest, Mansour Ndour, le secteur de la pêche souffre d’un manque de données, tant sur les ressources, le nombre de personnes, que les différents navires qui s’activent dans le secteur. Ainsi, les rares données dont dispose le Sénégal datent depuis des années et méritent d’être réactualisées. C’est le cas des emplois directs et indirects générés par le secteur de la pêche qui stagnent à 600.000 depuis les années 1980. Quant à la production qui est de 531.331 tonnes pour 227 milliards en 2018 et dont 80% de ces ressources proviennent de la pêche artisanale, ces données ont été remises en cause par les acteurs de la pêche industrielle et artisanale. 
 
 
 
Un besoin de transparence par les acteurs
 
 
 
Ce qui fait dire à Mansour Ndour qu’une pêche durable a besoin de transparence qui passe par la collecte et le partage des données entre les parties prenantes. A l’en croire, il y a 12 types d’information aux standards Fiti à respecter pour la transparence dans le secteur de la pêche par les pays adhérents. Il s’agit, entre autres, d’avoir un registre public des lois et règlement ; de disposer d’un régime foncier à la pêche ; la publication de tous accords de pêche ; le registre des navires de la pêche industrielle et artisanale. Concernant le secteur de la pêche industrielle, Fatou Niang Ndiaye, vice-présidente du Gaipes, plaide pour l’identification de tous les acteurs du secteur, de la liste de tous les bateaux et la mise à jour régulière de toutes ces informations. Poursuivant, Mme Ndiaye a dénoncé les sociétés écrans dans le secteur de la pêche industrielle. En effet, certains pays comme la Chine ou la Russie, pour contourner les licences de pêche, viennent dans le secteur et s’associent faussement avec des Sénégalais. Une pratique qui avait poussé le Gaipes à saisir l’Ofnac en 2019. Pire, certains, bateaux, révèle-t-elle, ne figurent même pas dans le registre. Les mêmes complaintes ont été notées dans le secteur de la pêche artisanale, avec cette «nébuleuse» qui entoure les licences de pêche. Or, dit-il, les ressources halieutiques appartiennent au peuple. A cet effet, il invite les autorités étatiques à faire comme le Libéria, dont les licences de pêche sont gérées par les fonctionnaires, avec une publication et une mise à jour régulière des navires bénéficiaires. Contrairement au Sénégal, qui prétend avoir du poisson au point d’attribuer des licences à des bateaux étrangers, au moment où, dit-il, nos pêcheurs artisanaux se font tuer en Mauritanie parce qu’ils quémandent du poisson. Ce qui lui fait dire que nos autorités ne disent pas la vérité dans ce secteur de la pêche. 
 
Rareté du poisson à l’origine de l’émigration clandestine 
 
Contrairement aux acteurs de la pêche, le haut conseiller des collectivités territoriales, Thierno Mbengue, estime que les acteurs sont à l’origine des difficultés dans le secteur de la pêche. En effet, il accuse les pêcheurs de pêcher n’importe comment et n’importe quand en utilisant le plus souvent des filets non homologués. S’y ajoutent les déchets déversés dans la mer qui contribuent à la rareté des poissons. Ce qui lui fait dire que le secteur n’est pas règlementé. Cependant, il n’est pas d’avis que les jeunes qui s’engagent dans les embarcations clandestines sont des pêcheurs et que ce n’est pas le manque d’emploi qui les pousse à partir. Une posture vertement critiquée par les acteurs de la pêche. Même le point focal Fiti au ministère la Pêche et de l’Économie maritime, Chérif Samb, a pris son contrepied en confirmant que parmi ces jeunes qui partent, une forte majorité est constituée de pêcheurs. Une position confortée par Gaoussou Guèye, qui révèle que l’émigration clandestine est exacerbée par la rareté du poisson. Une rareté du poisson confirmée par le coordonnateur Fiti de l’Afrique de l’Ouest qui révèle que les stocks ont chuté de 50%. Or, la rareté du poisson entraine la baisse des rendements, la perte d’emploi, entraine des pertes économiques, des conflits sociaux et une menace également à la sécurité alimentaire.
 
 
Moussa CISS 
 
LES ECHOS

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