ARRETÉ MINISTERIEL DECLARANT DES «ENFANTS ET PARENTS PROCHES D'HUISSIERS» APTES A EXERCER LA FONCTION D’HUISSIER DE JUSTICE: Le Rdses dit niet à la dévolution successorale de charges et attaque l’arrêté de Me Malick Sall devant la Cour suprême



 
Alors que 16 diplômés ont été déclarés aptes au stage d’huissier et attendent leur nomination, le ministre de la Justice, Me Malick Sall, a trouvé un raccourci – à travers un arrêté ministériel - pour déclarer  des «enfants et parents proches d'huissiers» aptes à exercer la fonction d’huissier de justice, alors que ces derniers n’avaient pas concouru ou ont échoué au concours. Le regroupement des diplômés sans-emplois du Sénégal (Rdses) s'est érigé contre cette discrimination, en déposant depuis le 11 mars dernier un recours en annulation de cet arrêté devant la Cour suprême.
 
«Le président de la République, dans son dernier discours à la Nation, n’a pas manqué de constater l’appel des jeunes ainsi que le taux de chômage élevé. Il est donc inadmissible que dans ce contexte, toujours dans certaines professions, des textes soient taillés sur mesure afin de faciliter la dévolution successorale de charges appartenant à l’Etat, donc aux Sénégalais !» C’est le constat amer fait par le Regroupement des diplômés sans-emplois du Sénégal (Rdses) dans un communiqué, suite aux actes aux allures de forfaiture posés par l’actuel ministre de la Justice ainsi que son prédécesseur. En effet, l’ancien ministre de la Justice, en 2016, avait par arrêté n°14919 du 4 octobre 2016 organisé un concours d’attribution des charges uniquement pour les clercs assermentés en exercice dans les études d’huissier de justice. En d’autres termes, regrette le Rdses, le concours était ouvert mais réservé aux enfants et parents proches d’huissiers de justice exerçant dans les cabinets. Un arrêté qui a été cependant attaqué devant la Chambre administrative de la Cour suprême qui a tranché en faveur du Rdses.
 
Me Malick Sall contourne l’arrêt de la Cour suprême et notifie par arrêté «aux parents et proches d’huissiers» qu’ils sont aptes à exercer…
 
A la suite de l’arrêt de la Cour suprême, le concours direct d’aptitude au stage d’huissier de justice a été ouvert et 16 diplômés ont été déclarés aptes au stage d’huissier de justice. Ainsi, après avoir effectué leur stage, ils attendent depuis lors leur nomination. Cependant, un nouveau décret portant statut des huissiers de justice a été adopté le 6 août 2020. Curieusement, le ministre de la Justice, Me Malick Sall, dans l’unique but de contourner l’arrêt de la Chambre administrative de la Cour suprême, y a inséré une disposition transitoire, se désole de constater le Rdses. «Il y exempte de concours ces clercs-là, dont certains s’étaient abstenus de se présenter au concours d’aptitude au stage à la profession, tandis que d’autres avaient concouru et échoué. Il n’a pas hésité à leur notifier un arrêté d’aptitude afin de les déclarer aptes à exercer la fonction d’huissier de justice, sans concours préalable et aucun mérite déterminant, en se fondant uniquement sur leur expérience professionnelle», charge le coordonnateur du Rdses, Yves Nzalé.
 
Le Rdses met en garde également la Chambre des notaires
 
Devant cette démarche discriminatoire, le Rdses n’a pas manqué de porter la réplique. En effet, soucieux des difficultés d’accès aux emplois publics des jeunes diplômés, le Regroupement des diplômés sans-emplois a encore attaqué cet arrêté d’un recours en annulation devant la Chambre administrative de la Cour suprême, le 11 mars dernier. «Nous lui rappelons que les huissiers de justice, au même titre que les notaires, sont des officiers publics et ministériels. Ils assurent une mission de service public. Ainsi, les critères posés pour l’exercice de ses professions ne devraient nullement exclure certains au profit d’autres. L’expérience professionnelle ne saurait être une dispense de concours, surtout que les employés de ces cabinets ne sont autres que les membres de leurs familles», martèle le coordinateur du Rdses, qui n’a pas manqué, dans la foulée, de mettre en garde la Chambre des notaires de «toute tentative d’insertion de leurs clercs ou précisément des membres de leurs familles» dans ladite profession. De l’avis des membres du Rdses, tout arrêté pris en ce sens est en violation flagrante de la légalité et sera déféré devant la Cour suprême.
Moussa CISS
 
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