APRÈS DEUX ANNÉES D’ENQUÊTE :Un douanier de nationalité franco-sénégalaise arrêté en France pour avoir aidé des trafiquants de drogue pendant deux ans




 
 
Cité comme modèle par ses collègues, le douanier Bocar a dû décevoir bien de ses amis. Ce franco-sénégalais est en effet suspecté d’avoir aidé des trafiquants de drogue à éviter des contrôles. Agé de 35 ans, il est accusé d'avoir aidé pendant deux ans des trafiquants à importer de la cocaïne en provenance d'Amérique du Sud. Il a été placé en garde à vue, comme 12 autres personnes, en région parisienne.
 
Une vaste opération antidrogue menée à Grigny, Viry-Chatillon (Essonne) et à l’aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle (Val-d’Oise) a permis l’arrestation d’une quinzaine de personnes mercredi après-midi par les enquêteurs de la Direction régionale de la police judiciaire de Versailles. Ces dernières sont suspectées d’être impliquées dans une affaire de trafic de drogue. Parmi les accusés, Bocar, un douanier d’origine sénégalaise. Lui est en effet suspecté d'avoir aidé des trafiquants de cocaïne à échapper à des contrôles.
 
 
Il aidait au transport de 60 kg de cocaïne par semaine
 
 
Les surveillances, mises en œuvre par la Brigade de recherche et d’intervention (Bri), ont permis de matérialiser une livraison par semaine, avec des quantités d’environ 60 kg de cocaïne. De la drogue d’une valeur de 1,9 million d’euros au prix du kilo en France et à plus de 3,9 millions si on prend en compte le prix de vente au détail.
La poudre blanche était acheminée par avion depuis le Mexique avec la complicité de l’agent. Ce dernier aurait été payé 40.000 euros par valise pour aider à la sortie de la marchandise. Et il arrivait souvent qu’elles soient en double. «L’homme de nationalité française, d’origine sénégalaise, aurait investi dans la construction de maisons dans ce pays», explique une source proche du dossier qui s’est confiée au site Le Parisien.
 
 
L’enquête a débuté en 2021
 
Tout commence il y a deux ans, lorsque les policiers de l’antenne d’Evry (Essonne) de la police judiciaire de Versailles commencent à apercevoir un jeu plutôt insolite. En effet, des passagers fantômes, munis de billets, se rendent en zone d'embarquement. Mais au lieu de prendre l’avion, ils se dirigent vers la zone des bagages et quittent l'aéroport avec une à deux valises de 30 kilos chacune. Et ce n’est pas chose rare. Chaque semaine, c’est le même scénario qui se déroule. Et les enquêteurs remarquent que le manège ne se produit que lorsque le douanier Bocar est en service.
Et pire, le fonctionnaire conduisait près d’une vingtaine d’agents dans un des terminaux de l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle, où il gérait notamment les plannings et écrivait les procès-verbaux. D’après les premiers éléments de l’enquête, il a pleinement profité de ce trafic et aurait gagné entre 45.000 et 50.000 euros par valise de cocaïne qui partait de l’aéroport.
Lorsqu’il a été arrêté en compagnie de passagers fantômes, deux valises contenant 60 kilos de cocaïne ont été saisies. Elles provenaient du Mexique ou de Colombie. Les enquêteurs travaillent activement pour retracer le parcours de la drogue.
D’après les enquêteurs, les trafiquants interpellés en même temps que le douanier seraient des criminels de haut vol. Parmi eux, deux frères bien connus de la justice, les frères D., qui sont considérés pour le moment comme les organisateurs du trafic et implantés dans la cité de la Grande Borne à Grigny (Essonne).
La cocaïne qu’ils arrivaient à faire passer par Roissy était ensuite acheminée partout en région parisienne, pour alimenter le marché de la drogue en Île-de-France. Certains membres de ce groupe ont notamment été aperçus au Maroc ou à Megève (Haute-Savoie).
 
 
Qui est Bocar ?
 
 
Âgé de 35 ans, notre compatriote est un ancien militaire de l’armée de terre. Il atterrit à la douane comme informaticien. Il est en poste au Havre (Seine-Maritime). Puis en 2014, il occupe des fonctions de contrôleur et de chef d’équipe au terminal 2E au sein de la plus grosse brigade de l’hexagone.
Pour ses collègues, c’est quelqu’un qui a eu un parcours atypique. «Ses affaires sont nombreuses et les contentieux parfois insolites. Ils gardent en mémoire notamment cette affaire de cocaïne dissimulée à l’intérieur de plusieurs noix de coco. Au total, deux kilos de cocaïne sont récupérés par B. et son équipe». C’est notamment grâce à ce fait d’arme qu’il avait pu défiler à Paris.
Le compatriote avait même eu droit aux honneurs de son portrait dressé par sa hiérarchie, juste avant le défilé sur les Champs-Élysées. «Si B. a décidé de défiler en ce 14 juillet 2022, c’est avant tout pour partager la fierté qu’il a de représenter l’administration qui lui a donné une chance en le recrutant», peut-on lire sur le site internet des douanes.
 
 
Khadidjatou D. GAYE
 
LES ECHOS

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