ANNULATION DE LA PROCÉDURE: La défense bombarde le juge d’exceptions



 
Pour les avocats de la défense, la procédure est entachée de nullité depuis le début, au moment précisément de l’enquête préliminaire. Ils ont insisté sur le non-respect de l’article 5 du règlement 5 de l’Uemoa dont la Cour de justice de la Cedeao a constaté la violation. Mais, pour obtenir la libération du maire de Dakar et Cie, les conseils de la défense ont bombardé le juge Demba Kandji d’exceptions, dénonçant ainsi les irrégularités de la procédure.
 
 
 
La défense est revenue, hier, sur les exceptions de nullité, pour demander l’annulation de la procédure et la libération de Khalifa Sall et Cie. De bout en bout, pour les robes noires, la procédure a été viciée. Me François Sarr et Cie se sont d’abord appesantis sur l’arrêt de la Cedeao, qui a constaté la violation du droit à l’assistance d’un conseil. Selon Me François Sarr, la Cour d’appel doit tirer toutes les conséquences de cet arrêt. «L’arrêt a une force obligatoire et une force exécutoire. Les dispositions de l’arrêt de la Cedeao parlent de force obligatoire à l’égard de tous dans l’espace de la Cedeao. Tout ce qui est jugé par la Cour de la Cedeao a un caractère obligatoire. Ces violations des droits correspondent à celles des droits de la défense», a plaidé la robe noire.
Pour sa part, son confrère Me Abdou Dialy Kane a attaqué le jugement rendu par le président Lamotte. Selon lui, le juge d’instance a tout faux de considérer que la nullité portant sur le droit à l’assistance a acquis l’autorité de la chose jugée. «Cette décision rendue par le premier juge n’est pas fondée en droit», a martelé Me Kane. Pour lui en effet, la question de l’autorité de la chose jugée ne se confond pas avec la décision exécutoire. «Je ne vois pas par où on peut passer pour dire que la nullité n’est pas acquise», a soutenu l’avocat. Il a ainsi sollicité l’annulation du procès-verbal d’enquête préliminaire.
Me Borso Pouye a déclaré que les juges communautaires ont certes dit qu’ils ne se substituaient pas à la Cour d’appel ou aux juridictions internes, mais ils ont aussi dit que les dispositions contenues dans notre code ont été violées. «Et que la simple omission de cette formule rend nulle la procédure». Elle a demandé à Demba Kandji d’appliquer le droit.
 
 
 
Me Khassimou Touré : «notre gouvernance judiciaire souffre dans son âme et dans sa conscience. Ce procès n’a plus d’objet sur le plan de l’objectivité et sur le plan moral»
 
 
 
Constitué pour assurer la défense de son frère Mbaye Touré, Me Khassimou Touré a affirmé : «notre gouvernance judiciaire souffre aujourd’hui dans son âme et dans sa conscience». Selon lui, «ce procès n’a plus d’objet sur le plan de l’objectivité et sur le plan moral». «Il est manifestement établi que les droits de la défense ont été violés. Et lorsque l’arrêt a été rendu, je vous avais demandé de faire une annulation par voie de conséquence. Car, on ne peut pas l‘ignorer. Et lorsque la règle de droit est mal appliquée, il faut sanctionner l’acte juridique qui cause des dommages. Et le but recherché, c’est amener l’agent judicaire à respecter les règles», a-t-il martelé.
 
 
Seydou Diagne : «la Cour doit se méfier de l’Etat plutôt que de ses avocats»
 
«Je demande de prendre avec des pincettes les arguments de l’Etat du Sénégal. Car, il y a de nombreux revers, que ce soit en droit interne ou externe. Cela fait plus de 5 ans que l’Etat conteste toujours mes points. Et je pense que la Cour devrait se méfier de l’Etat du Sénégal et non de ses avocats», prévient, à son tour, Me Seydou Diagne. «Pourquoi Khalifa Sall ne doit pas sortir ? Qu’on le veuille ou non, c’est une affaire politique», a fustigé Me Moustapha Wade. Me Demba Ciré Bathily a plaidé la nullité du rapport de l’Ige. Aussi, il a soulevé l’inconstitutionnalité de l’article 139 du Code de procédure pénale, sur le mandat d’arrêt. Selon lui, l’article 139 visé par le jugement d’instance est une atteinte grave à la fonction de poursuite et du principe de séparation et d’impartialité. «Le procureur ne peut pas lier le juge d’instruction», martèle-t-il. En plus de cette exception d’inconstitutionnalité, l’avocat de Khalifa Sall a soulevé une irrégularité portant sur la levée de l’immunité parlementaire. A l’en croire, le Procureur ne doit pas demander à l’Assemblée nationale de lever l’immunité du député Khalifa Sall sans aviser le juge d’instruction qui lui avait envoyé le dossier pour règlement. Les avis qui leur ont été envoyés par le juge sont caducs, selon la robe noire, après la levée de cette immunité. Et du coup, d’autre avis devraient leur être envoyés. « Cela entache de nullité l’ordonnance du juge d’instruction», a plaidé Me Bathily. L’avocat a aussi soulevé l’inconstitutionnalité de l’article 169 du Code de procédure pénale qui fait que les avocats ne puissent pas faire d’observation par rapport au réquisitoire du Procureur. Pour lui, le règlement doit être contradictoire.
 
Fatou D. DIONE
 

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