L’attente pour la mise en place du nouveau gouvernement a été longue et beaucoup d’alliés du président de la République ont nourri l’espoir de se voir confier un département ministériel. Abdoulaye Baldé en fait partie, hélas, le Président Macky Sall l'a encore zappé au profit de nouveaux alliés. Unedernière couleuvre que les partisans de l’ancien maire de Ziguinchor refusent d'avaler simplement. Le porte-parole de l’Union centriste du Sénégal (Ucs) estime qu’Abdoulaye Baldé ne mérite pas ce manque de respect et de considération et promet que le parti va répondre à la hauteur de l’affront, après avoir boudé le poste de président de la commission de Défense et Sécurité.
Les Echos : on s’attendait à voir Abdoulaye Baldé dans le nouveau gouvernement, mais il a encore été zappé par le Président Macky Sall. Comment l'avez-vous vécu ?
Aboubacar Diassy :Abdoulaye Baldé avait sa place dans ce nouveau gouvernement, par rapport à son bagage intellectuel, mais aussi le poids de son parti. Nous avons donc constaté son absence avec beaucoup de dégoût et de désolation. C’est un énième coup de massue sur le dos de l’Ucs. Nous constatons, comme la plupart des Sénégalais,que le Président Macky Sall, depuis notre entrisme au sein de la majorité en 2018, pose des actes qui laissent entrevoir une velléité manifeste d’anéantir Abdoulaye Baldé. Nous avons l’impression qu’il y a un contentieux non vidé, symptomatique des innombrables coups subis injustement au bas de la ceinture. Comment pouvez vous comprendre que des partis politiques moins représentatifs que l’Ucs aussi bien en termes de poids électoral qu’en termes d’apport intrinsèque, soient à la table du conseil des ministres au détriment de l’Ucs qui, il faut le dire, reste la deuxième force politique de la région de Ziguinchor à la sortie des dernières élections locales ?Il est grand temps que le Président Macky Sall dise aux militantes et militants de l’Ucs son vrai problème avec Abdoulaye Baldé.
Victorine et Doudou Ka ministres, cela ne décrète-t-il pas la mort politique de Baldé à Ziguinchor?
Non, du tout, je n’ai pas l’habitude de personnaliser le débat. D’ailleurs, vous me donnez l’occasion de souhaiter aux deux ministres de la région de Ziguinchor plein succès dans leursnouvelles fonctions. En d’autres termes, il ne faut pas se voiler la face, l’Ucs est la seconde force politique de la région de Ziguinchor après le Pastef. Lors des dernières élections municipales et locales, Bby est arrivée troisième derrière l’Ucs ne totalisant qu’à peine le tiers de nos voix ; cela est assez révélateur.
L’exemple atypique, le contrôle de Niaguis vaut environ 6.000 voix, l’équivalent d’un bureau ou bien d’un centre de vote de la région de Ziguinchor. C’est une appréciation technique qu’il ne faut pas occulter.Au plan national, l’Ucs compte plus de 600 conseillers municipaux et départementaux, elle a gagné 7 mairies à elle seule et est présente dans les assemblées électives (Assemblée nationale, Hcct). Nous sommes un grand parti, il faut le reconnaître. Abdoulaye Baldé est à la tête d’un parti politique qui a un ancrage au plan national et international, il n’est pas cantonné dans le sphère régionaliste. Alors je ne comprends pas en quoi ces nominations peuvent-elles décréter la mort du parti. Au contraire, cela permet de faire un choix assumé dans les meilleurs délais pour l’avenir.
Le Président Sall lui a quand même donné la commission Défense et Sécurité de l’Assemblée nationale…
Justement ! C’est un manque de respect notoire envers l’Ucs et son président. Qu’on se le tienne pour dit, nous ne sommes pas intéressés, nous n’en voulons pas et nous en informons l’opinion nationale et internationale. Le poste lui a été attribué sans son consentement. D’ailleurs, le député Abdoulaye Baldé n’était pas présent à l’hémicycle ce jour. Que le Président Macky Sall nous respecte quand même. Trop c’est trop.
Comment qualifierez-vous votre compagnonnage avec le Président Macky ?
C’est un compagnonnage mi-figue mi-raisin. Honnêtement, ma conviction est faite qu’il a plus profité à Macky Sall qu’à l’Ucs, car au bout du bout, Abdoulaye Baldé et son parti en ont subi des coups de tout genre au bas de la ceinture. L’inélégance par des débauchages tous azimuts de la part de hauts responsables de l’Apr dans nos rangs, sans scrupules, profitant de leurs positions de ministres et de DG ; s’y ajoutent l’ostracisme et l’absence de générosité du Président Macky Sall vis-à-vis du parti. L’Ucs n’a jamais bénéficié d’un décret du Président Macky Sall.
Alors, quel avenirpour l’Ucs dans la coalition Benno ?
L’avenir appartient au bon Dieu! A mon humble avis, le parti doit réagir et dans les meilleurs délais. C’est le sentiment partagé dans toutes les bases affectives au plan national comme international. Un compagnonnage n’a de sens que lorsque les fondamentaux sont établis sur une base de vérité.
Est ce que cela pourrait conduire à un rapprochement avec Ousmane Sonko?
Croyez-moi, l’Ucs prendra ses responsabilités dans les heures qui suivent. La riposte sera à la dimension du coup subi injustement.En politique, tout ce qui se fait sans toi est contre toi donc en agissant ainsi, le Président a clairement rompu le lien avec l’Ucs. Permettez-moi de rappeler que le président de l’Ucs, Abdoulaye Baldé, par nature, est un homme modéré qui entretient des rapports civilisés avec quasiment tous les leaders au delà des contingences politiques et autres appartenances partisanes. C’est d’ailleurs une des raisons qui rendront très intéressante notre future posture, au vu de la nouvelle configuration géopolitique qui devra prendre forme pour faire face aux joutes électorales de 2024.
Quid du Yewwi avec les Ousmane Sonko, Khalifa, Déthié, Aar Sénégal avec mes grands frères Abdourahmane Diouf, Thierno Bocoum, mais aussi de Pape Djibril Fall sur le troisième axe en tant que centriste comme nous, semble tout à fait challenging dans le cadre d’une recomposition politique. J’allais oublier Karim Wade, ami du président Baldé pour avoir ensemble constitué un duo exceptionnel dans le passé. Tout compte fait, le parti ne ferme aucune possibilité, il appréciera au moment opportun en fonction des réalités et vicissitudes politiques de l’heure. Ce qui est clair, c’est que plus rien ne sera comme avant.
NdèyeKhadyDIOUF