La chasse aux «moto-taximen» des éléments de la brigade de gendarmerie de Koungheul a entrainé l’irréparable. Une innocente mère de famille qui a fait les frais de ce qui est devenu le quotidien des conducteurs de moto Jakarta de la capitale du Bambouk.
La ville de Koungheul, chef-lieu de département situé dans la région de la Kaffrine, s’est réveillée, hier, dans la douleur, mais surtout dans une colère noire, pour marquer son indignation. La raison : la mort accidentelle de la dame Atta Boye. La bonne dame, la cinquantaine révolue, a en effet été fatalement heurtée par un moto Jakarta, dont le propriétaire cherchait à échapper à des éléments de la brigade de gendarmerie de ladite ville. Les faits, nous renseigne-t-on, ont eu lieu samedi, juste après la prière du soir. Alors qu’il roulait tranquillement, le conducteur de moto Jakarta a été pris en chasse par des gendarmes à bord de leur véhicule. Le jeune homme, envahi par la peur, panique et accélère sa mobylette. Il voulait sauver sa peau, mais au final, il a entrainé la mort d’une personne innocente, qui n’avait rien à voir avec cette «chasse à l’homme» entre gendarmes et conducteurs de moto Jakarta.
En effet, au détour d’un virage, juste derrière l’hôpital de la ville, le jeune conducteur de moto est tombé sur une femme âgée d’une cinquantaine d’années, qui vaquait tranquillement à ses occupations. Ainsi, le jeune conducteur de moto, qui avait toujours à ses trousses les gendarmes, heurte la bonne dame qui s’écroule et perd connaissance. Les secours débarquent sur les lieux après avoir été alertés. Très vite, ils entament l’évacuation de la blessée. Hélas, le pire était déjà fait et avant même de quitter le lieu du drame, la dame Atta Boye a succombé. Le jeune vélo taximan a été arrêté et conduit au poste de gendarmerie de la ville.
À Koungheul, cette nouvelle affaire est venue jeter de l’huile dans les relations déjà tendues entre conducteurs de moto Jakarta et gendarmes. De leur côté, les taximen ont décidé de prendre le taureau par les cornes. Ils disent à qui veut les entendre qu’il n’est pas question de rester les bras croisés face à ce qu’ils qualifient de volonté des gendarmes de faire de leur vulnérable situation un gagne-pain. «Partout au Sénégal les conducteurs de moto Jakarta payent la somme de 3000 francs quand ils sont interpellés pour ‘’non-port du casque’’. Mais, à Koungheul, les gendarmes se permettent de nous soutirer 6000 francs à chaque fois. C’est la raison pour laquelle il arrive que nous prenions la fuite quand nous les voyons», explique un Jakartaman contacté. Poursuivant, celui-ci regrette que ces genres de course-poursuite soient devenues monnaie-courante dans la ville. «Déjà, il y a quelque temps, les gendarmes ont failli tuer un conducteur de moto Jakarta et sa passagère qui était en état de grossesse. Il y a quelques jours, un autre conducteur de moto Jakarta a échappé à la mort, après avoir fait passer sa moto dans un espace tellement étroit qu’on croyait qu’il allait y rester», ajoute-t-il.
La corruption est un fait réel dans presque tous les secteurs d’activité au Sénégal. Et la gendarmerie ne semble pas faire exception à cette malheureuse règle. Dans une note de service datée du 28 novembre 2018 et qui avait été fuitée dans la presse, le commandant de la gendarmerie territoriale sénégalaise, le général Moussa Fall, révélait l'existence dans certaines brigades de caisses illégales alimentées par le fruit de racket sur les routes. Des caisses qui, selon lui, vont de 10.000 et 15.000 francs Cfa par jours à 100.000 par semaine et qui sont alimentées par un racket organisé par des responsables des brigades.
Sidy Djimby NDAO